Corticothérapie inhalée et risque d’infection à mycobactérie typique : un risque réel, mais moindre que celui des pneumopathies

L’auteur déclare ne pas avoir de lien d’intérêt avec cet article.
Les corticoïdes inhalés (CI) sont au coeur du traitement de l’asthme et sont fréquemment prescrits dans la BPCO, en particulier chez les patients exacerbateurs. [ 1. Van Andel AE, Reisner C, Menjoge SS, et al. Analysis of inhaled corticosteroid and oral theophylline use among patients with stable COPD from 1987 to 1995. Chest 1999 ; 115 (3) : 703-7.] , 1  Leur efficacité thérapeutique est due à leur effet anti-inflammatoire lié à l’inhibition de l’immunité innée et acquise. Le corollaire de cet effet est une augmentation de la fréquence des pneumopathies aiguës communautaires et des tuberculoses pulmonaires chez les patients traités par CI pour un asthme ou une BPCO.2, 3, 4 Aucune donnée n’existait concernant l’influence des CI sur l’incidence des infections à mycobactéries atypiques, infections difficiles à traiter, impactant la qualité de vie des patients et dont un des facteurs de risque est l’existence d’un trouble ventilatoire
obstructif.
Brode, et al. ont donc mené une étude cas-témoins afin de comparer l’incidence des infections à mycobactéries atypiques chez les patients présentant un trouble ventilatoire obstructif (TVO) et traités ou pas par CI.5 Les objectifs secondaires de cette étude étaient de caractériser le risque en fonction du type et de la dose de CI reçue. Les auteurs ont collecté les données auprès de l’Institute for Evaluative Clinical Sciences. Étaient analysées les données de tout patient de plus de 66 ans ayant un TVO, vivant dans l’Ontario et traité par bronchodilatateur de longue durée d’action, CI entre janvier 2001 et décembre 2013. Une infection à mycobactérie atypique était définie par l’identification d’une mycobactérie différente d’un bacille de Koch sur deux examens des crachats ou sur un prélèvement profond. Cette étude a porté sur 417 494 patients. Un diagnostic d’infection à mycobactérie atypique a été porté chez 2 966 d’entre eux. Pour chaque cas diagnostiqué, les auteurs ont sélectionné quatre patients contrôles appariés sur l’âge, le sexe, le type de TVO sous-jacent et la durée de son évolution.
Les patients atteints d’infections à mycobactéries atypiques vivaient plus souvent en zone urbaine, étaient moins souvent diabétiques et atteints de pathologie rénale que les sujets contrôles. En revanche, ils présentaient plus fréquemment des dilatations des bronches ou une pneumopathie interstitielle diffuse que les patients contrôles. L’utilisation quotidienne de CI était associée à un risque augmenté d’infection à mycobactérie atypique (OR ajusté 1,86 ; IC : 95 % 1,50-2,07, p <0,001). Cette association restait statistiquement significative chez les patients traités par fluticasone (OR ajusté 2,09 ; IC : 95 % : 1,80-2,43) mais pas par budésonide. Il existait par ailleurs une relation effet-dose entre la dose cumulée de CI et l’incidence d’infection à mycobactérie atypique.
D’autre part, le risque infectieux était différent en fonction du TVO sousjacent. Les patients atteints de BPCO et traités par CI avaient un risque augmenté de développer une infection à mycobactérie atypique (OR 1,96 ; IC 95 % : 1,62-2,36), mais ce résultat n’était pas retrouvé chez les patients asthmatiques.
La force de cette étude est le grand nombre de données analysées, même si l’on regrette que les auteurs aient exclu les patients de moins de 66 ans.
Les corticoïdes inhalés augmentent le risque de développer une infection à mycobactérie atypique chez les patients présentant un TVO ; néanmoins ce risque reste très inférieur à celui de développer une pneumopathie aiguë communautaire.
En conclusion, la prescription de CI, en particulier dans la BPCO, doit être considérée au regard de la balance bénéfices-risques infectieux. En cas de prescription, il conviendra de privilégier l’utilisation de la dose la plus faible possible.

[hr]

Aurélien Justet, Service de pneumologie A , Hôpital Bichat-Claude Bernard

IR

InfoRespiration N°144- Avril  2018

  1. From the Global Strategy for Asthma Management and Prevention, Global Initiative for Asthma (GINA) 2015. Available from : http://www.ginasthma.org/
  2. Crim C, Calverley PMA, Anderson JA, et al. Pneumonia risk in COPD patients receiving inhaled corticosteroids alone or in combination : TORCH study results. Eur Respir J 2009 ; 34 (3) : 641-7.
  3. Suissa S, Patenaude V, Lapi F, Ernst P. Inhaled corticosteroids in COPD and the risk of serious pneumonia. Thorax 2013 ; 68 (11) : 1029-36.
  4.  Kim JH, Park JS, Kim KH, et al. Inhaled corticosteroid is associated with an increased risk of TB in patients with COPD. Chest 2013 ; 143 (4) : 1018 – 24.
  5. 6. Brode SK, Campitelli MA, Kwong JC, et al. The risk of mycobacterial in
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