Peut-on dès l’enfance prévenir l’apparition d’un SAHOS à l’âge adulte ?
Le Dr Jessica Taytard a présenté les différents types de prévention pouvant s’envisager dans l’enfance pour prévenir le syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil à l’âge adulte.
Le Dr Jessica Taytard (Paris) a segmenté cette présentation en trois types de prévention : prévention universelle (toute la population quel que soit état de santé), sélective (sous-groupes de patients) et ciblée (personnes ayant un facteur de risque, une pathologie les identifiant avec un risque élevé). Elle a rappelé que les troubles respiratoires obstructifs du sommeil (TROS) de l’enfant se répartissent en trois catégories : TROS de type 1 (hypertrophie lymphoïde, âge 3-8 ans), TROS de type 2, (enfant obèse volontiers de sexe masculin), et enfin TROS de type 3 (anomalies anatomiques et génétiques).
Prévention des TROS de type 3
Chez les patients présentant un TROS de type 3, on pratiquera une prévention ciblée, mais chaque anomalie est unique et nécessite une prise en charge spécifique 1. La physiopathologie de chaque anomalie est également différente mais regroupe en général l’association de différents facteurs : malformations maxillofaciales (micro-rétrognathie, dysmorphie, hypoplasie faciale), hypotonie, anomalies du tissu lymphoïde, glossoptose, macroglossie. On retrouve dans cette catégorie de TROS les patients présentant des anomalies craniofaciales, les maladies neuromusculaires (qui peuvent donner un TROS indépendamment du trouble ventilatoire restrictif éventuel), les achondroplasies, les paralysies cérébrales, les malformations de Chiari, la trisomie 21 et le syndrome de Prader-Willy. Chaque pathologie a une fréquence de syndrome d’apnées-hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS) qui lui est particulière, mais elle va jusqu’à 80% dans les séries pour la trisomie 21, l’achondroplasie, le syndrome de Prader-Willi, ou la séquence de Pierre Robin. La prise en charge de ces enfants doit se faire de façon multidisciplinaire en centre de référence, et associe à la ventilation, la chirurgie, le désencombrement, la mise en décubitus ventral (pour le Pierre Robin), l’orthodontie, la nutrition et parfois la thérapie génique.
Prévention des TROS de type 2
Les patients présentant un TROS de type 2 font également l’objet d’une prévention sélective. Il existe un rôle du genre, le genre masculin étant associé à une persistance plus fréquente à l’adolescence et l’âge adulte, et à une plus grande sévérité. Les facteurs de persistance à l’âge adulte d’un TROS de type 2 sont le caractère adolescent, l’obésité, le sexe masculin et un SAHOS sévère. Dans l’étude de Kohler, à mesure que l’âge augmentait, une augmentation de la prévalence de l’obésité était observée pour atteindre 100% d’obèses entre 12 et 18 ans 2. D’autre part, la sévérité du SAHOS augmente avec l’IMC 3. La prévention de la persistance à l’âge adulte n’est pas toujours aisée et fait appel à une équipe pluridisciplinaire. Elle associe la perte de poids, la chirurgie ORL (systématiquement proposée même si elle règle rarement le problème à elle seule), l’orthodontie, la rééducation maxillofaciale, la ventilation et les innovations thérapeutiques, notamment les traitements médicamenteux de l’obésité.
Prévention universelle, la plus difficile et la moins connue
Il existe des données anciennes montrant un lien entre hypertrophie amygdalienne chez l’enfant et antécédent parental de SAHOS, qui est probablement sous-estimé 4. Un lien entre inégalités socio-économiques ou ethniques et TROS de l’enfant a également été décrit, ainsi qu’un impact de l’origine ethnique aux États-Unis sur la normalisation de l’indice d’apnées-hypopnées (IAH) après adénoïdotonsillectomie 5. Le fait de vivre dans un quartier défavorisé est associé à un IAH plus élevé 6 , 7 , 8. Et il existe également un effet du tabagisme passif ou actif et de la qualité de l’air sur l’IAH, la majoration de symptômes ou la diminution de la qualité de vie.
En conclusion
Au final, la prévention du TROS chez l’enfant doit se faire à la fois de façon individuelle, en cas de facteur de risque important, de pathologie prédisposante ou d’antécédent familial, mais aussi à une échelle plus globale, afin de limiter les comorbidités et la morbi-mortalité cardiovasculaire, métabolique et neurocognitive (dont l’hyperactivité et la somnolence diurne).
Dr Justine Frija, Service de physiologie, explorations fonctionnelles, hôpital Bichat-Claude Bernard, Paris
D’après la communication « Peut-on dès l’enfance prévenir l’apparition d’un SAHOS à l’âge adulte » de Jessica Taytard (Paris) – Session « Le SAHOS aux différentes étapes de la vie » du samedi 27 janvier 2024
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