L’année dernière, lors du congrès mondial de l’hypertension pulmonaire (HTP), une nouvelle définition de HTP a été proposée : mesure au cathétérisme cardiaque droit d’une pression artérielle pulmonaire moyenne (PAPm) supérieure à 20 mmHg et de résistances vasculaires pulmonaires (RVP) supérieures à 3UW. Cette nouvelle définition a été source de vifs débats ces derniers mois et a fait l’objet d’une session à l’ATS.
Pour bien comprendre l’objet des discussions il faut se replonger quelques années en arrière, lors du premier congrès mondial de l’HTP qui s’était tenu en 1973, en raison de l’épidémie mondiale d’HTP liée à la consommation d’anorexigènes. Le seuil arbitraire de PAPm à 25 mmHg avait alors été retenu par les experts pour définir une hypertension pulmonaire. Depuis, des études hémodynamiques rigoureuses réalisées sur sujets sains ont montré que la PAPm normale est de 14 mmHg ±3 déviations standards (ce qui faisait une limite supérieure de la normale à 20 mmHg). Ainsi, les sujets ayant une PAPm comprise entre 20 et 25 mmHg étaient dans une zone grise, n’appartenant ni à la catégorie des sujets sains, ni à la catégorie HTP. Le changement de définition proposé lors du congrès mondial permettrait de mieux catégoriser ces patients. On estime qu’avec cette nouvelle définition, le nombre de patients atteint d’HTP augmenterait d’environ 5 % et concernerait surtout des patients ayant une HTAP associée à une sclérodermie et des patients avec une HTP thromboembolique chronique.
Le seuil de 3UW pose lui aussi des questions dans deux étiologies : les hypertensions aortopulmonaires et les HTP associées à une drépanocytose. En effet, dans ces deux groupes de patients, du fait de l’hyperdébit cardiaque fréquemment constaté, les résistances pulmonaires, calculées selon la formule (PAPm-PAP occluse)/débit cardiaque, peuvent être inférieures à 3UW, en dépit d’une élévation des pressions pulmonaires. La question d’un seuil de RVP à 2UW reste donc posée.
Enfin, la possibilité d’un traitement pour les patients ayant une PAPm comprise entre 20 et 25 mmHg reste incertaine. Plusieurs études ont montré que les sujets ayant une PAPm comprise entre 20 et 25 mmHg avaient un pronostic plus sévère que les sujets avec une PAPm < 20 mmHg. Cependant, tous les médicaments développés dans l’HTAP n’ont été testés que pour des patients répondants à l’actuelle définition (PAPm³ 25 mmHg). Du fait de l’absence d’étude réalisée chez ces patients, il n’est donc pas possible d’étendre aujourd’hui l’indication des traitements de l’HTAP aux patients ayant une PAPm comprise entre 20 et 25 mmHg. Des essais thérapeutiques incluant ces patients sont donc indispensables pour répondre à cette question.
À ce jour la question reste entière pour les patients ayant une PAPm comprise entre 20 et 25 mmHg : Que dire à ces patients ? Quel suivi leur proposer ? Faut-il commencer un traitement ?
[hr]Athénaïs Boucly, service de pneumologie, médecine intensive et réanimation, hôpital Pitié-Salpêtrière, Paris
D’après la session A8 : crossing the border : midly increased pulmonary artery pressure and the new definition of pulmonary hypertension
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