La dysfonction chronique du greffon pulmonaire

La session « Lung allograft dysfunction : towards better monitoring and treatment » s’est attaquée à la complication pronostique principale de la transplantation pulmonaire (TP) : la dysfonction chronique du greffon pulmonaire (CLAD). La gravité de cette complication, son importance dans la mortalité des patients transplantés au-delà de la première année, et les progrès dans la compréhension de la physiopathologie ont été abordés.

Le Dr Beekmans, de l’équipe de recherche en transplantation de l’hôpital de Leuven (Belgique), a pu présenter ses travaux sur la voie de signalisation JAK/STAT. Cette voie est connue pour activer la réaction immune du CLAD. Elle a été explorée selon plusieurs approches, sur des explants de patients regreffés pour du CLAD, de phénotypes restrictifs ou obstructifs, ou alors sur du tissu pulmonaire sain. L’ARN a été extrait et analysé par RNAseq. De façon globale, la voie JAK/STAT était surexprimée dans les tissus issus de poumons avec CLAD, quels que soient la sévérité ou le phénotype de celui-ci. En y regardant plus précisément, le profil des gènes surexprimés différait néanmoins entre les phénotypes obstructifs et restrictifs. Ces résultats encourageants permettent d’envisager une voie thérapeutique intéressante : celle des inhibiteurs de la voie JAK pour le traitement du CLAD. D’ailleurs, les résultats cliniques d’une étude de phase 1, qui évaluait l’itacitinib dans le CLAD restrictif, avaient été présentés au congrès de l’ISHLT au mois d’avril dernier : les patients sous traitement avaient une amélioration significative de leur VEMS, au prix d’un surrisque de réactivation du CMV.

Sur le versant thérapeutique, le Dr Marta Cristeto Porras, de l’équipe de Santander (Espagne) s’est interrogée sur le meilleur timing d’introduction de l’azithromycine pour limiter l’évolution du CLAD. Elle a mené une étude rétrospective monocentrique sur 10 ans et comparé plusieurs sous-groupes de leur cohorte de 358 patients transplantés pulmonaires : le premier sous-groupe ayant reçu de l’azithromycine dès 3 semaines après la TP, quelle que soit leur fonction respiratoire ; un deuxième sous-groupe qui a reçu de l’azithromycine après 3 semaines sans baisse du VEMS ; un troisième sous-groupe ayant reçu de l’azithromycine dès les premiers signes de déclin du VEMS ; et enfin, un sous-groupe n’ayant jamais reçu d’azithromycine. De façon intéressante, la survenue de CLAD à 1, 3 et 5 ans était significativement moindre chez les patients qui avaient reçu de l’azithromycine dès la troisième semaine après la greffe, par rapport à chacun des autres sous-groupes. Ces résultats très intéressants, qui plaident pour une initiation la plus précoce possible de l’azithromycine après TP, sont toutefois à moduler : la méthodologie rétrospective ne permet pas de s’affranchir des facteurs confondants.

Enfin, Michael Perch rapporte l’expérience danoise de 7 patients atteints de CLAD restrictif et traités par nintedanib. Il est évidemment difficile de tirer des conclusions définitives de ce faible effectif, cependant ces 7 patients ont eu un arrêt du déclin de leur VEMS et un ralentissement de la vitesse de déclin de leur CVF dans les 6 mois suivants l’introduction de nintedanib. Il faut néanmoins noter que la mauvaise tolérance du traitement a conduit à l’arrêt chez 2 de ces 7 patients. Ces données sont évidemment à confirmer dans le cadre d’essais de haute qualité méthodologique.

Toutes ces communications permettent d’envisager des pistes de recherches fascinantes pour améliorer le pronostic des patients transplantés pulmonaires.

Jonathan Messika, Service de Pneumologie et Transplantation Pulmonaire, Hôpital Bichat


D’après la session orale 101 : “ Lung allograft dysfunction: towards better monitoring and treatment” et les communications :

  • OA687 : JAK-STAT pathway is upregulated in CLAD, du Dr Hanne Beekmans (Leuven, Belgique)
  • OA690 : Azithromycin and lung transplant : the sooner the better, du Dr Marta Cristeto Porras (Santander, Espagne)
  • OA691 : National experience with Nintedanib for restrictive allograft syndrome following lung transplantation, du Dr Hans Henrik Schultz, présentée par le Dr Michael Perch (København, Danemark)
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