Big data en transplantation pulmonaire : mine d’or ou botte de foin ?

Après une transplantation pulmonaire, les patients sont suivis très régulièrement. Le VEMS est un biomarqueur primordial, utilisé pour surveiller la fonction du greffon. On définit notamment le meilleur VEMS post-greffe comme la moyenne des deux meilleures mesures depuis la transplantation, et le rejet chronique par une baisse pérenne de 20% par rapport à cette valeur, en l’absence de diagnostic différentiel. La réalité physiologique est beaucoup plus fine et des baisses plus discrètes et progressives du VEMS sont également associées à une surmortalité. Les données générées par les visites successives de suivi, de plus en plus multimodales et abondantes (clinique, fonctionnel, imagerie, tests biologiques), représentent une opportunité inédite pour améliorer notre compréhension de la trajectoire clinique de nos patients, mais aussi un challenge du fait de leur caractère hétérogène et pléthorique rendant leur analyse complexe.

James McMenimen (Washington University, Washington, Etats-Unis) a présenté les résultats d’une analyse rétrospective monocentrique portant sur une cohorte de 739 patients transplantés pulmonaires de 2010 à 2018 avec un suivi clinique de 5 ans post-transplantation, comprenant des mesures de VEMS à 1, 3, 6 et 12 mois puis annuellement. Les auteurs ont étudié l’évolution du VEMS (ratio VEMS/meilleur VEMS post-greffe) en utilisant un modèle statistique visant à identifier des sous-populations de patients selon leur trajectoire d’évolution après la greffe. La population de l’étude a été divisée en cohorte d’entraînement (70% de l’effectif) et de validation (30%). Le modèle le plus performant et pertinent a finalement permis d’individualiser 4 groupes selon leur trajectoire post-greffe, par ordre de fréquence : “stable” (66%), “déclin tardif” (15%), “pic tardif” (10%) et “déclin rapide” (9%), avec d’excellents paramètres d’ajustement dans la cohorte de validation.

L’impact de nombreux paramètres cliniques pré-transplantation et péri-opératoires a été ensuite évalué de façon multivariée, et les auteurs ont pu montrer qu’un ratio PaO2/FiO2 bas chez le donneur, un diagnostic préalable de pneumopathie infiltrante diffuse (PID) chez le receveur, ou la survenue d’une dysfonction primaire du greffon sévère étaient des facteurs de risque indépendants pour l’appartenance aux sous-groupes autres que le groupe “stable”. Le facteur le plus significatif pour l’appartenance au groupe “déclin rapide” était un diagnostic de PID (odds-ratio à 11.98 (1,41-101,55)).

Cette étude souligne l’intérêt de développer des approches d’analyse plus robustes pour mieux connaître les données dont nous disposons chez les patients transplantés. Cet effort méthodologique permettra d’en extraire des messages pertinents, d’enrichir notre pratique clinique et d’accélérer la génération d’hypothèses destinées à être validées par des études prospectives.

D’après le poster de J.D. Mcmenimen, et al. Data driven lung function trajectories post-transplantion illuminate modifiable risk factors. Am J Respir Crit Care Med 2024. (session B47)

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