Inhibiteur de phosphosphodiestérase 3 et 4 par voie inhalée. Une nouvelle arme dans l’arsenal thérapeutique de la BPCO ?

A côté des bronchodilatateurs et des antiinflammatoires sous forme de corticoïdes inhalés (CSI) qui représentent l’essentiel du traitement médical de la BPCO, d’autres agents tels que les macrolides ou le roflumilast ont une place dans l’algorithme thérapeutique. L’efficacité du roflumilast qui est un inhibiteur de phosphodiestérase (PDE) 4 doté d’un effet antiinflammatoire, a été montrée chez des patients BPCO avec bronchite chronique présentant un phénotype « exacerbateur fréquent » mais l’utilisation en est limitée par des effets secondaires, notamment une perte de poids, ce qui a contribué à sa non-autorisation d’utilisation en France. Un inhibiteur de PDE4 et de PDE3 administré par voie inhalée a été développé dans le but d’obtenir à la fois un effet bronchodilatateur, antiinflammatoire, et d’améliorer la clairance mucociliaire. L’efficacité de cette molécule appelée ensifentrine a été testée dans 2 essais de phase 3 dont les résultats ont été présentés au cours de la session « Breaking news : clinical trial in pulmonary medicine » (B13) ainsi qu’au cours de la session d’affiches B22.

Deux études multicentriques contrôlées en double aveugle appelées ENHANCE 1 et ENHANCE 2 ont été réalisées de 2020 à 2022 avec un suivi sur 24 semaines. Elles ont toutes 2 testé l’effet de l’ensifentrine 3 mg vs placebo 2 fois par jour, administrés par voie inhalée. Les critères d’inclusion étaient un âge entre 40 et 80 ans, un VEMS post bronchodilatateur entre 30 et 70% th, un score mMRC >2. L’utilisation de LAMA, LBA et de CSI était autorisée. Le principal critère de jugement était le gain à 12 semaines de l’aire sous la courbe (AUC) de VEMS (mesures sériées de VEMS sur 12h) par rapport à la valeur de base. Environ 900 patients ont été inclus dans chaque étude : 477 et 498 dans le groupe ensifentrine et 283 et 291 dans le groupe placebo dans ENHANCE 1 et ENHANCE 2, respectivement. En tout, la proportion de patients avec BPCO modérée et sévère était de 56% et 44%, respectivement. Le pourcentage de patients avec bronchite chronique était de 72%. A 12 semaines, le gain moyen de l’AUC de VEMS était de 87 mL et de 94 mL par rapport au placebo dans ENHANCE 1 et ENHANCE 2, respectivement. Le gain en termes de VEMS au pic était respectivement de 147 mL et 146 mL dans chaque étude.  Par ailleurs, les patients sous ensifentrine avaient un gain significatif et cliniquement pertinent en termes de symptômes rapportés par le patient (E-RS score), de qualité de vie (SGRQ) et de dyspnée (TDI) en comparaison avec le groupe placebo. De plus, l’ensifentrine était associée à une diminution significative de l’utilisation de traitements de recours et de l’utilisation des ressources de santé pendant les 24 semaines. Un effet de l’ensifentrine sur la survenue d’exacerbations (EA) modérées ou sévères au cours des 24 semaines de suivi (critère secondaire de jugement) a également été observé puisque le taux d’EA a baissé de 36% et 43% dans ENHANCE 1 et ENHANCE 2, respectivement, et que le temps écoulé jusqu’à la première exacerbation était significativement rallongé sous traitement (environ 40% de diminution de risque).
Un même effet bénéfique du traitement sur la survenue d’EA était observé quand les patients étaient stratifiés en sous-groupes (selon le tabagisme, les médications associées, l’éosinophilie …). Pour les 400 patients de ENHANCE 1 ayant été suivis 48 semaines, l’effet bénéfique sur la survenue d’EA était également observé. La tolérance de l’ensifentrine s’est avérée excellente avec un taux d’effets secondaires similaire à celui du placebo dans chacune des études. En conclusion, ces 2 études contrôlées de qualité démontrent que l’ensifentrine apporte un bénéfice en termes de fonction, de symptômes et de réduction de fréquence d’EA chez des patients BPCO de gravité modérée à sévère. Il est donc fort probable qu’au terme de ces études, cette médication trouve sa place dans l’algorithme de prise en charge des patients BPCO.


Hervé Mal, Service de pneumologie et transplantation pulmonaire, Hôpital Bichât, 46 rue Henri Huchard, Paris

D’après les communications de :
Anzueto A. et al. Effect of ensifentrine, a novel PDE3 and PDE4 inhibitor, on lung function, symptoms and exacerbations in patients with COPD (session B13).
Barjaktarevic I.Z. et al. Ensifentrine reduced healthcare resource utilization in subjects with COPD: Results from Enhance-2, a phase 3 trial of ensifentrine, a dual PDE3/4 inhibitor. Am J Respir Crit Care Med 2023, 207: A2839 (session B22).
Barjaktarevic I.Z. et al. Twice-daily, nebulized ensifentrine produced significant improvement in week 12 lung function: sub-group analysis in the phase 3 trial Enhance-2. Am J Respir Crit Care Med 2023, 207: A2838 (session B22).

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