Après avoir balayé la théorie du poumon stérile, l’étude du microbiome respiratoire a toujours le vent en poupe, notamment au cours des pathologies bronchiques chroniques. Quoi de neuf dans le domaine de la BPCO en 2018 ?
Les patients atteints de BPCO ont un risque multiplié par 4 de développer un cancer pulmonaire comparativement à des sujets d’âge et de tabagisme identique mais indemnes de BPCO. Une hypothèse serait que ce risque accru de cancer pulmonaire soit, comme la BPCO elle-même, au moins partiellement lié aux interactions du microbiome des voies aériennes avec l’épithélium bronchique et à la réponse immunitaire et inflammatoire locale favorisée par une dysbiose locale. M. J. Mammen, et coll. (Buffalo, NY, États-Unis) ont testé cette hypothèse en tirant profit des prélèvements respiratoires d’une cohorte longitudinale de 187 vétérans atteints de BCPO et suivis pendant 20 ans (COPD Study Clinic) parmi lesquels 13 ont développé un cancer. Ils ont analysé le microbiome au sein des expectorations obtenues chez ces patients 6, 12, 18 et 24 mois avant le diagnostic de cancer et l’ont comparé à celui de 13 autres patients BPCO indemnes de cancer appariés sur l’âge, le sexe, le tabagisme et le VEMS : les données de diversité et de richesse du microbiome ne variaient pas significativement au cours du temps chez un même patient mais différaient significativement entre les deux groupes, suggérant effectivement qu’une modification différente du microbiome puisse favoriser la survenue d’un cancer bronchique au cours de la BPCO.
Au sein de cette même cohorte, M. J. Mammen, et coll. ont identifié 20 patients exacerbateurs fréquents (≥ 2/an) qu’ils ont également appariés à 20 patients non exacerbateurs fréquents (< 2/an) : une fois encore, la comparaison des profils de microbiome était en faveur d’une composition bactérienne différente entre les deux groupes, suggérant que la nature du microbiome puisse influencer le phénotype clinique des patients.
S. Leitao Filho, et coll. ont quant à eux étudié le microbiome des expectorations de patients hospitalisés pour une exacerbation aiguë de BPCO (n = 98) et comparé le profil du microbiome des patients décédés dans l’année suivante (n = 17) à celui des survivants (n = 81) : chez les survivants, la bactérie Veillonella était davantage représentée alors que chez les patients décédés dans l’année, Staphylococcus était en plus grande abondance que dans l’autre groupe, les variations semblant malgré tout assez ténues pour en tirer des conclusions à l’échelon individuel.
À l’heure actuelle, l’analyse du microbiome paraît encore laborieuse et son utilisation en pratique clinique n’est pas encore d’actualité. Les efforts menés dans ce domaine pourraient cependant permettre, dans un avenir plus ou moins proche, de mieux prédire, ou au moins comprendre, les risques potentiellement associés à certains profils microbiotiques.
Frédéric Schlemmer, antenne de pneumologie, réanimation médicale, GH Henri Mondor, Créteil
D’après la session C13 – The microbiome in chronic Airways diseaseA4428 – Distinct airway microbiome patterns associated with lung cancer development in a COPD Cohort
A4431 – Distinct airway microbiome patterns associated with frequent exacerbator phenotype in COPD
A4429 – Sputum microbiome is associated with 1-year mortality in COPD exacerbations
© iSPLF – Mission ATS – MAI 2018