Le plastique c’est fantastique ? Il s’en est passé des choses depuis le tube de l’été de 1990. 30 ans plus tard, c’est plutôt la rengaine « le plastique, c’est dramatique » qui a résonné dans les micros de la salle 8G du palais des congrès de Barcelone. Dans une session consacrée aux conséquences de l’environnement sur la santé respiratoire, les effets des allergènes, microparticules, fumées, diesel, microplastiques ou encore microfibres, ont été détaillés.
Les microplastiques sont des particules de taille comprise entre 100 nm et 5 mm. Ubiquitaires, d’origine multiple, ils sont présents dans l’air extérieur et encore plus dans l’air intérieur, où leur concentration peut être multipliée par un facteur 10 (exposition annuelle jusqu’à 6 kg de microplastiques dans l’air intérieur. Ils constituent par exemple la très grande majorité des vêtements que nous portons au 21ème siècle. A titre indicatif, l’interrogation de l’assemblée a montré que les ¾ des congressites présents dans la salle étaient habillés de polyester ou polyamide.
Alors qu’il n’a été que très récemment démontré la présence de microplastiques dans le sang humain (2 µg de polyester, polyéthylène ou polystyrène par mL de sang), le corollaire pour le compartiment pulmonaire est mal connu. Évidemment dans le domaine des microplastiques, la taille compte et plus la particule est de petite taille, plus profondément elle atteindra le poumon (passage de particules < 5 µm dans les alvéoles alors que les particules qui passent la trachée feront moins de 100 µm), avec une possible toxicité locale. Trente pourcent des employés de l’industrie de flocage du nylon développent des symptômes respiratoires, révélant principalement des cas de bronchiolite et de pneumopathie interstitielle diffuse, et suggérant une toxicité propre de ces microfibres.
Confirmation de la présence de microplastiques dans le poumon
Les travaux de l’équipe du Dr Melgert se sont attachés à détecter la présence de microplastiques dans le compartiment pulmonaire et évaluer les potentielles conséquences.
Les plastiques les plus fréquemment retrouvés dans le poumon sont le polyester, le polypropylène, le polyéthylène et le nylon.
Afin de comprendre les conséquences des microplastiques sur le poumon, des organoïdes bronchiques et alvéolaires ont été cultivés à partir de cellules murines épithéliales, matricielles et de fibroblastes.
Une altération de la croissance cellulaire observée in vitro
La croissance cellulaire de ces organoïdes bronchiques s’est montrée dramatiquement altérée par l’exposition au nylon et, dans une moindre mesure, par l’exposition au polyester (p<0,0001 et p=0,02 respectivement). Ceci a pu être confirmé même en l’absence de contact direct, alors que les microplastiques de nylon étaient positionnés sur un gel surnageant au-dessus de l’organoïde, et suggère un effet indirect du nylon par la fuite de composés. L’inhibition de la croissance cellulaire était encore plus importante lorsque l’organoïde était en cours de développement, suggérant une toxicité majorée des microplastiques sur les poumons de fœtus ou d’enfants.
L’exposition réelle nécessite encore d’être évaluée et quantifiée.
À retenir
Le danger des facteurs environnementaux aéroportés sur le poumon humain constitue donc un vaste et diversifié champ d’intérêt, mis en lumière par le focus actuel de la communauté internationale sur le changement climatique et la pollution de l’air. Les travaux préliminaires présentés ici suggèrent un dépôt et une toxicité pulmonaire propres des microplastiques présents dans l’environnement. On ne le redira jamais assez : ouvrez vos fenêtres, renouvelez votre air intérieur, et depuis cette session, portez des vêtements en coton plutôt qu’en nylon ou polyester, vos poumons vous en remercieront !
Clairelyne Dupin, Service de pneumologie A, Hôpital Bichat, Paris
D’après la communication 2175 « Microplastics and microfibres in the air we breathe » de Barbro N. Melgert (Groningue, Pays-Bas) ; Session 253 « Dangers in the air we breathe » du lundi 5 septembre 2022.