L’objectif de cette présentation était d’analyser le risque de thrombose associé à la COVID-19, de décrire les modalités d’anticoagulation utilisées en préventif et en curatif et de définir les meilleures stratégies d’anticoagulation à partir des données actuelles de la science.
La maladie thrombo-embolique veineuse (MTEV) est une complication fréquente de la COVID-19, avec une prévalence de 31% chez les patients hospitalisés pour COVID-19 (19% d’embolie pulmonaire (EP), 20% de thrombose veineuse profonde (TVP)) et constitue un facteur de gravité associé à un risque de mortalité accrue, notamment chez les patients les plus sévères 1 2.
Dans les recommandations initiales de 2020, tous pays confondus, une anticoagulation préventive à dose préventive standard, à dose préventive intermédiaire et à dose curative étaient proposées respectivement dans 63%, 32% et 5% des recommandations pour la prise en charge ambulatoire et dans 54%, 30% et 16% pour la prise en charge en soins intensifs. L’objectif était de traiter à la fois les mécanismes classiques d’embolie pulmonaire et la microthrombose pulmonaire in situ. Ces recommandations reposant sur des avis d’experts, de nombreuses études ont ensuite été lancées pour déterminer la place de l’anticoagulation dans la COVID-19.
Parmi les patients hospitalisés en médecine conventionnelle, il a été montré que l’anticoagulation à dose curative pourrait être bénéfique sur le taux de décès et le délai pour nécessiter une ECMO chez des patients sélectionnés, mais au prix de plus de complications hémorragiques. Chez les patients hospitalisés en réanimation, aucun bénéfice de l’anticoagulation n’a été rapporté dans les études, que ce soit à dose curative ou à dose intermédiaire, mais plusieurs études ont rapporté un risque hémorragique plus élevé. Les résultats sur l’effet d’une dose préventive intermédiaire chez les patients hospitalisés en médecine conventionnelle ne sont pas encore disponibles.
Chez les patients pris en charge en ambulatoire, aucun effet bénéfique de l’anticoagulation, à dose curative ou préventive, n’a été observé sur la survie ou la durée d’hospitalisation.
Pour les patients déjà anticoagulés pour une MTEV antérieure, les propositions sont de privilégier les HBPM dans les COVID-19 graves, tandis que les anticoagulants habituels peuvent être continués dans les COVID-19 non sévères.
Au total, de nouvelles recommandations publiées en 2022 par la société internationale de thrombose et d’hémostase ISTH donnent une conduite à tenir basée sur ces données : les HBPM sont indiquées à dose préventive chez les patients hospitalisés en médecine traditionnelle et en soins intensifs pour COVID-19, et on peut discuter de l’anticoagulation curative, par HBPM, seulement, chez des patients sélectionnés traités en médecine conventionnelle pour leur COVID-19 3.
Étienne-Marie-Jutant, Service de pneumologie, CHU de Poitiers
D’après la communication 1473 « Prevention and treatment of pulmonary embolism related to COVID-19” présentée par Stéphane Zuily (Nancy, France) – Session 189 «Update on pulmonary embolism management », 8C live streamed.
- Di Minno A, Ambrosino P, Calcaterra I, Di Minno MND. COVID-19 and Venous Thromboembolism: A Meta-analysis of Literature Studies. Semin Thromb Hemost 2020;46(7):763–771. ↩
- Klok FA, Kruip MJHA, Meer NJM van der, et al. Incidence of thrombotic complications in critically ill 1;ICU patients with COVID-19. Thromb Res 2020;191:145–147. ↩
- Schulman S, Sholzberg M, Spyropoulos AC, et al. ISTH guidelines for antithrombotic treatment in COVID-19. J Thromb Haemost 2022;Jul 8;10.1111/jth.15808 ↩