Prise en charge de l’insuffisance respiratoire aiguë hypoxémique : CPAP ou OHD ?

La place respective des stratégies d’assistance respiratoire non invasives (ARNI : O2 standard, oxygénothérapie nasale à haut débit (OHD), ventilation non invasive (VNI) et pression positive continue ou « continuous positive airway pressure » (CPAP) reste controversée quant à leur impact sur le risque d’intubation et/ou la mortalité dans la prise en charge de l’insuffisance respiratoire aiguë (IRA) hypoxémique liée ou non au COVID-19. Si une analyse post-hoc d’une étude prospective anglosaxonne, menée chez 570 patients COVID-19, a montré que la CPAP permettait potentiellement de réduire le recours à l’intubation et/ou la mortalité comparativement à l’OHD 1, une récente étude française prospective randomisée multicentrique n’a, en revanche, retrouvé aucune différence sur ces paramètres entre 3 stratégies d’ARNI (O2, CPAP, OHD) dans cette population 2.

Une équipe japonaise a donc évalué spécifiquement, de façon prospective randomisée et multicentrique (12 hôpitaux), l’impact de la CPAP et de l’OHD sur le risque (critères observés) d’intubation à J28 (critère principal) et le devenir de patients en IRA hypoxémique (PaO2/FiO2 ≤300 mmHg) non liée au COVID-19. La CPAP était délivrée via un masque facial et un ventilateur non invasif dédié réglé en mode CPAP (10 cmH2O). Le débit d’OHD initial était de 50L/mn. Chez les 85 patients randomisés entre CPAP (n=38) et OHD (n=47), la pneumopathie bactérienne représentait la principale cause de l’IRA (69%) avec infiltrats pulmonaires bilatéraux dans 87% des cas. Le délai de survenue des critères d’intubation était plus long pour le groupe CPAP (hazard-ratio = 0,327 ; intervalle de confiance à 95 % : 0,148-0,724 ; p=0,006). Il n’y avait pas de différence significative entre les 2 groupes pour les taux d’intubation, de mortalité à J28 et intra-hospitalière, le nombre de jours sans ventilation, les durées d’assistance respiratoire et d’hospitalisation. L’oxygénation était meilleure dans le groupe CPAP mais avec un pH significativement plus bas et une PaCO2 plus élevée sans différence de fréquence respiratoire néanmoins ave l’OHD. Les 2 stratégies étaient globalement bien tolérées.

Si les auteurs concluent à un moindre risque d’intubation avec la CPAP comparativement à l’OHD dans l’IRA hypoxémique, il n’en reste pas moins que des études randomisées complémentaires de plus grande envergure seront encore nécessaires pour juger au mieux de la place des différentes stratégies d’oxygénation (O2, OHD, VNI, CPAP) dans cette indication dont le principal challenge pour le clinicien reste de ne pas retarder l’intubation.


Christophe Girault, Service de Médecine Intensive et Réanimation, Hôpital Charles Nicolle, CHU-Hôpitaux de Rouen, 37 boulevard Gambetta & UR3830, Institut de Recherche et d’Innovation Biomédicale (IRIB), Faculté de Médecine et de Pharmacie, Université de Rouen, 76031 Rouen cedex- France

D’après la communication de Yokoyama T. et al. Continuous positive airway pressure versus high-flow nasal cannula oxygen therapy for acute hypoxemic respiratory failure. Am J Respir Crit Care Med 2023; 207: A2871S (Session B23).

  1. Perkins GD, et al. Effect of noninvasive respiratory strategies on intubation or mortality among patients with acute hypoxemic respiratory failure and COVID-19: The RECOVERY-RS randomized clinical trial. JAMA 2022;327:546-558. 
  2. Bouadma L, et al. High-dose dexamethasone and oxygen support strategies in intensive care unit patients with severe COVID-19 acute hypoxemic respiratory failure: The COVIDICUS randomized clinical trial. JAMA Intern Med 2022;182:906-916.
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