Les séquelles respiratoires de l’infection sévère par le SARS CoV2 et plus largement les séquelles des SDRA nécessitant une ventilation mécanique invasive sont maintenant bien connues et il est classique de surveiller ces patients tant en termes d’imagerie que de fonction ventilatoire durant plusieurs mois. La DLCO s’améliore généralement progressivement au fil des mois qui suivent la sortie. L’impact des différentes stratégies ventilatoires non invasives (oxygénothérapie à haut débit [OHD] ou ventilation non invasive [VNI]), de même que le délai d’intubation chez les patients porteurs d’un Covid sévère n’ont cependant pas été étudiées sur de larges populations.
J Gonzalez (Lleida, Espagne) a présenté une large étude prospective multicentrique regroupant 52 centres espagnols portant sur 1854 patients sortis de réanimation après une infection sévère par le SARS CoV2. Ces patients ont bénéficié d’un suivi à 3, 6 et 12 mois après la sortie, avec mesure de la fonction ventilatoire (DLCO), radiographie thoracique et scanner thoracique. Sur les 1854 patients, 1204 (64,9%) ont été intubés, 290 (15,6%) ont reçu de la VNI et 360 (19,4%) de l’OHD. Parmi les patients intubés, 966 l’ont été dans les 24 premières heures (intubation précoce [IP]), 238 au-delà de la 24ème heure (intubation tardive [IT]).
Ils s’agissaient principalement d’hommes (71,7%) âgés en moyenne de 60 ans (52 – 67), le plus souvent non-fumeurs (59%), obèses (39,4%) et hypertendus (44,1%). La durée d’hospitalisation en réanimation était de 14 jours en moyenne (7 – 28). Ils avaient un rapport PaO2/FiO2 moyen de 117. Dans les 3 groupes, la DLCO s’améliore au fil du temps (en moyenne 70,2% à M3, 73,4% à M6 et 75,6% à M12). Les patients qui ont été intubés présentaient une altération plus marquée de la DLCO, et parmi eux, ceux qui l’ont été de façon retardée (respectivement 59,1% versus 66% dans le groupe IP, 66,6% vs 70,7%, et 69,5% vs 74,4%). C’est dans le groupe OHD que les valeurs de DLCO sont les plus hautes (69%, 75,5% et 76,6%) par rapport au groupe VNI.
Il manquait un certain nombre de données importantes dans cette présentation, et notamment une comparaison des différents groupes en termes de sévérité, traitements reçus, surinfections éventuelles… Il semblerait néanmoins que le rapport PaO2/FiO2 soit comparable entre les 3 groupes.
L’équipe semblait suggérer que la stratégie ventilatoire en elle-même était responsable des séquelles constatées. Il paraît pour le moment difficile de tirer de telles conclusions. Néanmoins dans la pratique quotidienne, la surveillance spécialisée des patients ayant présenté un SDRA est nécessaire, même s’ils n’ont pas été intubés. De plus il est intéressant de constater une augmentation régulière de la DLCO sur les 12 mois, qui se poursuit très probablement au-delà nécessitant un suivi prolongé des patients.
Sandrine Pontier-Marchandise Service de Pneumologie et unité des soins intensifs– Clinique des Voies Respiratoires, CHU Larrey, 24 chemin de Pouvourville, TSA 30030, 31059 Toulouse Cedex 9
D’après la communication de J Gonzalez (B18). Impact of ventilatory support modalities and timing of intubation on longitudinal recovery of pulmonary sequelae in critically ill COVID-19 patients : non-invasive mechanical ventilation also matters. Am J Respir Crit Care Med 2024 ; 209 : A3032