Congrès

Une place pour l’IRM pulmonaire pour le diagnostic du rejet chronique ?

Le rejet post-transplantation pulmonaire comprend plusieurs entités du rejet aigu cellulaire ou humoral au rejet chronique ou CLAD (Chronic Lung Allograft Dysfunction). Il reste une problématique cruciale pour les patients puisque le CLAD est la principale cause de mortalité au-delà de la première année post-transplantation. Du fait de sa présentation clinique polymorphe, le diagnostic du rejet nécessite encore souvent le recours aux biopsies trans-bronchiques, une technique invasive avec un risque de pneumothorax et hémorragies potentiellement sévères. Par conséquent, le développement de tests non-invasifs (ou moins invasifs) pour le diagnostic du rejet est un enjeu majeur.

Marvah Hill Pierre-Louis (Harvard, Boston, Etats-Unis) a présenté les résultats d’une étude pilote menée par son groupe évaluant l’IRM pulmonaire dynamique avec injection de produit de contraste (DCE-MRI) chez les patients transplantés pulmonaires pour la détection d’un CLAD. Cet examen est pratiqué sur une IRM 3T standard, avec injection de produit de contraste à base de gadolinium. Plusieurs paramètres reflétant la microvascularisation du poumon sont mesurés de manière continue pendant l’acquisition : le rehaussement maximal du parenchyme pulmonaire, sa pente, et sa vitesse d’élimination (wash-out).

Les auteurs ont fait l’hypothèse que l’évaluation de la microperfusion par DCE-MRI pourrait être plus sensible que le VEMS pour détecter un CLAD de manière précoce, et ainsi anticiper sa prise en charge. Cette étude a inclus 13 patients (6 avec CLAD, 7 sans) qui ont tous bénéficié d’une DCE-MRI. La vitesse d’élimination du gadolinium était significativement plus lente en présence de CLAD (p=0.05). Il y avait également une tendance sur les autres marqueurs, non significative. Ces résultats sont intéressants mais très préliminaires : les deux groupes étaient de faible effectif et de caractéristiques cliniques hétérogènes (comme l’âge ou le délai depuis la transplantation). Une augmentation de l’effectif pourrait également permettre d’étudier le phénotype DCE-MRI des différents sous-types de rejet chronique.

D’après le poster de M. Hill Pierre-Louis et al. Dynamic Contrast-Enhanced Lung MRI in Lung Transplant Recipients With Chronic Lung Allograft Dysfunction (abstract). Am J Respir Crit Care Med 2024;209:A1196. (session A26).

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SAOS et toux : les liaisons dangereuses ?

Selon le résultat d’études de faible effectif, le syndrome d’apnées obstructives du sommeil (SAOS) fait partie des causes possibles de toux chronique. Cette association entre toux chronique et SAOS est-elle retrouvée dans une large cohorte de patients apnéiques français ?

Une toux chronique, durant au moins 8 semaines, est recherchée prospectivement chez 822 patients (56% d’hommes, âge moyen de 52,9 ± 14,9 ans, IMC moyen de 30,18 ± 7,0 kg/m2) bénéficiant d’un enregistrement nocturne pour suspicion clinique de SAOS dans deux hôpitaux français. Un score de propension basé sur le sexe, l’âge, l’IMC et la présence de reflux gastro-œsophagien, d’asthme et de rhinosinusite a été utilisé pour réduire le biais dû aux variables confondantes.

L’index d’apnées/hypopnées (IAH) moyen était de 20,1 ± 22,0 évènements/h. Un SAOS sévère était diagnostiqué chez 25,1% des patients, un SAOS modéré était diagnostiqué chez 43,9% des patients. La prévalence de la toux chronique était de 13,4%, de manière similaire quel que soit l’IAH (13.6% des patients souffrant d’un SAOS modéré, 12,6% des patients souffrant d’un SAOS sévère). Aucune différence n’a été identifiée entre les patients tousseurs chroniques et ceux ne toussant pas en termes de valeurs d’IAH et de catégories d’IAH (p = 0,64). Après application du score de propension, aucune association entre toux chronique et SAOS modéré à sévère (p = 0,84) n’a été retrouvée.

Aucune association entre toux chronique et SAOS n’a été confirmée dans une large cohorte de patients explorés pour une suspicion de SAOS. Les experts français recommandent de réaliser une poly(somno)graphie ventilatoire chez les tousseurs chroniques symptomatiques (somnolence diurne excessive, ronflements) ou présentant une obésité 1.

D’après le poster de L. Guilleminault et al. Obstructive sleep apnea and chronic cough: is there really a link? Am J Respir Crit Care Med 2024 ; 209 :A3780 (session B49).

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Séquelles respiratoires post-réanimation : même chez les non-intubés !

Les séquelles respiratoires de l’infection sévère par le SARS CoV2 et plus largement les séquelles des SDRA nécessitant une ventilation mécanique invasive sont maintenant bien connues et il est classique de surveiller ces patients tant en termes d’imagerie que de fonction ventilatoire durant plusieurs mois. La DLCO s’améliore généralement progressivement au fil des mois qui suivent la sortie. L’impact des différentes stratégies ventilatoires non invasives (oxygénothérapie à haut débit [OHD] ou ventilation non invasive [VNI]), de même que le délai d’intubation chez les patients porteurs d’un Covid sévère n’ont cependant pas été étudiées sur de larges populations.

J Gonzalez (Lleida, Espagne) a présenté une large étude prospective multicentrique regroupant 52 centres espagnols portant sur 1854 patients sortis de réanimation après une infection sévère par le SARS CoV2. Ces patients ont bénéficié d’un suivi à 3, 6 et 12 mois après la sortie, avec mesure de la fonction ventilatoire (DLCO), radiographie thoracique et scanner thoracique. Sur les 1854 patients, 1204 (64,9%) ont été intubés, 290 (15,6%) ont reçu de la VNI et 360 (19,4%) de l’OHD. Parmi les patients intubés, 966 l’ont été dans les 24 premières heures (intubation précoce [IP]), 238 au-delà de la 24ème heure (intubation tardive [IT]).

Ils s’agissaient principalement d’hommes (71,7%) âgés en moyenne de 60 ans (52 – 67), le plus souvent non-fumeurs (59%), obèses (39,4%) et hypertendus (44,1%). La durée d’hospitalisation en réanimation était de 14 jours en moyenne (7 – 28). Ils avaient un rapport PaO2/FiO2 moyen de 117. Dans les 3 groupes, la DLCO s’améliore au fil du temps (en moyenne 70,2% à M3, 73,4% à M6 et 75,6% à M12). Les patients qui ont été intubés présentaient une altération plus marquée de la DLCO, et parmi eux, ceux qui l’ont été de façon retardée (respectivement 59,1% versus 66% dans le groupe IP, 66,6% vs 70,7%, et 69,5% vs 74,4%). C’est dans le groupe OHD que les valeurs de DLCO sont les plus hautes (69%, 75,5% et 76,6%) par rapport au groupe VNI.

Il manquait un certain nombre de données importantes dans cette présentation, et notamment une comparaison des différents groupes en termes de sévérité, traitements reçus, surinfections éventuelles… Il semblerait néanmoins que le rapport PaO2/FiO2 soit comparable entre les 3 groupes.

L’équipe semblait suggérer que la stratégie ventilatoire en elle-même était responsable des séquelles constatées. Il paraît pour le moment difficile de tirer de telles conclusions. Néanmoins dans la pratique quotidienne, la surveillance spécialisée des patients ayant présenté un SDRA est nécessaire, même s’ils n’ont pas été intubés. De plus il est intéressant de constater une augmentation régulière de la DLCO sur les 12 mois, qui se poursuit très probablement au-delà nécessitant un suivi prolongé des patients.

D’après la communication de J Gonzalez (B18). Impact of ventilatory support modalities and timing of intubation on longitudinal recovery of pulmonary sequelae in critically ill COVID-19 patients : non-invasive mechanical ventilation also matters. Am J Respir Crit Care Med 2024 ; 209 : A3032

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Echographie diaphragmatique en continu : quel intérêt pour prédire le résultat du sevrage de la ventilation mécanique ?

Chez les patients sous ventilation mécanique invasive (VMI), la dysfonction diaphragmatique est associée à un risque plus élevé d’échec du sevrage de la VMI. Les études échographiques ont montré qu’une diminution de l’excursion du diaphragme (ED) en début d’épreuve de sevrage en ventilation spontanée (SBT) pouvait permettre d’identifier les patients présentant un risque d’échec de sevrage ou d’extubation. Le DXT® (Respinor, Norvège) est un nouveau dispositif échographique qui permet un monitorage continu de la mobilisation diaphragmatique.

L’objectif de l’étude a donc été d’évaluer si l’ED mesurée avec le DXT® permettait d’identifier les patients présentant un risque accru d’échec du sevrage de la VMI et de l’extubation. Les données de deux études prospectives multinationales, menées en aveugle dans 8 hôpitaux européens (DE-RISK WF et DE-RISK WF II), ont été regroupées pour cette analyse. Etaient inclus les patients sous VMI répondant aux critères de SBT avec mesures continues de l’ED pendant la 2ème minute de la première SBT. Le critère principal de jugement (CPJ) était représenté par l’échec du sevrage (échec de la SBT ou réintubation dans les 48 heures suivant l’extubation) et le critère secondaire par le taux d’échec d’extubation (réintubation dans les 48 heures post-extubation). La dysfonction diaphragmatique était définie comme une ED <1,1 cm (étude DE RISK WF I) ou <1,0 cm (DE-RISK WF II) pour le CPJ et comme une ED <1,1 cm pour le critère secondaire. L’hypothèse était que les patients dont l’ED était inférieure au seuil prédéfini auraient un taux significativement plus élevé d’échec de sevrage et/ou d’extubation. Trois cent quatre patients ont été inclus dont 73 patients ont échoué leur SBT. Sur les 231 patients ayant réussi leur SBT, 182 ont été extubés le même jour et, parmi eux, 17 ont été réintubés dans les 48 heures. Le taux d’échec du sevrage était de 43 %. L’ED était de 1,6 cm chez les patients ayant réussi le sevrage et de 1,5 cm chez ceux ayant échoué (p=0,235). Un dysfonctionnement du diaphragme (ED <1,1 ou 1,0 cm selon l’étude initiale) était observé chez 44 % des patients ayant réussi leur sevrage et chez 45 % des patients ayant échoué (p=0,906), soit un risque relatif de 1,0 (IC95 % : 0,8-1,3 ; p=0,906) pour l’échec du sevrage. Le taux d’échec d’extubation était de 9 %. L’ED était de 1,4 cm chez les patients ayant réussi l’extubation et de 0,8 cm chez ceux ayant échoué (p<0,001). Une dysfonction diaphragmatique (ED <1,1 cm) était observée chez 44 % des patients ayant réussi l’extubation et 88 % des patients ayant échoué (p=0,0004), soit un risque relatif de 8,2 (IC95 % : 1,9-35,1 ; p=0,004) pour l’échec de l’extubation. Aucun effet indésirable du dispositif n’a été observé.

La surveillance continue de l’ED avec le DXT® pendant l’épreuve SBT ne permet donc pas de prédire l’échec de sevrage mais peut permettre d’identifier les patients à risque accru d’échec de l’extubation.

D’après la communication de Demoule A., et al. Continuous diaphragm monitoring during the spontaneous breathing trial identifies patients at increased risk of extubation failure. Am J Respir Crit Care Med 2024; 209: A4809. Session B103.

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Vieillissement épigénétique et pollution : un risque accru de mortalité pour les fibroses pulmonaires

Les pneumopathies interstitielles diffuses (PID) fibrosantes se caractérisent par un processus de vieillissement accéléré du parenchyme pulmonaire. Le rôle péjoratif de la pollution dans l’évolution des PID fibrosantes a largement été décrit. Cet effet pourrait passer par des modifications épigénétiques.

L’épigénétique étudie les modifications chimiques qui régulent l’expression des gènes sans changement de séquence de l’ADN. La variation de méthylation sur l’ensemble de l’ADN permet de définir un « âge épigénétique » corrélé avec l’âge chronologique.

G.C Goobie, nous a présenté son travail de recherche d’association entre l’âge épigénétique et la mortalité des PID fibrosantes, et a déterminé comment les particules fines <=2.5µm (PM2.5) influencent l’âge épigénétique.

Cette étude a recruté 476 patients (issus de 2 cohortes) atteints de PID fibrosantes avec mesure de l’âge épigénétique sur les éléments mononuclées sanguins. Les expositions aux PM2.5 et autres constituants dans les 5 ans précédant le prélèvement sanguin ont été associées au lieu de résidence. La différence d’âge épigénétique (DAE) représentait l’âge épigénétique soustrait de l’âge chronologique.

L’étude a retrouvé que le vieillissement épigénétique était accéléré chez les patients avec une PID fibrosante. Dans les modèles ajustés (âge, sexe, race, tabagisme, facteur sociaux, FPI vs non-FPI) une augmentation de la DAE était associée à une diminution de la survie sans transplantation (HR=1,13, IC95% 1,06-1,21, p<0,001). Dans les modèles ajustés, des expositions accrues aux PM2.5, nitrate, ammonium, carbone noir étaient associées à une augmentation de la DAE (IC95% 0,04-0,44, p=0,02).

Au total, un vieillissement épigénétique accéléré est associé à un risque de mortalité chez les patients atteints de PID fibrosantes. Ce vieillissement est le médiateur d’une partie des effets néfastes des polluants. Le concept de vieillissement épigénétique mérite d’être exploré en raison des nombreux facteurs, notamment socio-environnementaux, susceptibles de le moduler.

D’après la communication de G.C. Goobie, Epigenetic aging and environmental exposures in fibrotic interstitial lung disease. Am J Respir Crit Care Med 2024;209:A3043 (session B19)

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FPI : amélioration spectaculaire de la CVF grâce au bon vieux système Rénine-Angiotensine !

Le buloxibutid (C21) est un agoniste oral et sélectif des récepteurs de type 2 de l’angiotensine II (AT2R), qui contrairement aux récepteurs de type I ont rôle protecteur dans de nombreux organes. AT2R est exprimé dans les cellules épithéliales alvéolaire de type II (CEAII). D’une part, son activation déclenche une réponse anti-fibrosante par diminution de l’apoptose des CEAII, une production de surfactant, une inhibition de TGF-ß et de la transition epithélio-mésenchymateuse et une augmentation des collagénases de type MMPs.  L’activation de AT2R dans le poumon diminue d’autre part le remodelage vasculaire, augmente la vasodilatation et a une activité antiinflammatoire.

TM Maher nous a présenté les résultats très encourageants de l’essai AIR (NCT04533022) testant le buloxibutid (Vicore Pharma) au cours de la FPI. 

AIR est un essai multicentrique, ouvert, à bras unique, de phase 2a, d’une durée de 36 semaines, testant la sécurité et l’efficacité du buloxibutid chez des patients présentant une FPI et ne recevant pas d’antifibrosant à l’inclusion. Le buloxibutid oral était administré à la dose de 100mg deux fois par jour pendant 24 semaines, avec une extension optionnelle à 36 semaines. Le critère principal d’efficacité était la variation de la CVF à 24 semaines par rapport à l’inclusion. Une première analyse est réalisée sur les cas observés et une seconde après imputation des données manquantes, en supposant un déclin non traité de 60 mL/12 semaines. Les niveaux plasmatiques de TGF-β1 et de la collagénase MMP-13 ont été mesurés comme biomarqueurs de la fibrose et de l’activité fibrolytique, respectivement.

La population finale de l’essai comprenait 52 participants, 24 n’ont pas complété l’étude à 36 semaines (2 décès, 5 effets indésirables, 3 déclins de la CVF, 14 décisions de patient).

Le buloxibutid a été bien toléré sans réaction indésirable grave. Dix individus ont signalé une perte de cheveux réversible, légère à modérée, ayant conduit à l’arrêt du traitement pour un patient.

Dans l’analyse des cas observés (sans imputation), il était noté une variation de +47 mL (IC 90% -108, +203 mL) à 24 semaines (n=27) et +235 mL (IC 90% +8, +389 mL) à 36 semaines (n=28). Néanmoins, l’analyse des données, en utilisant l’imputation, montrait une variation de seulement +13 mL (IC 90% -69, +96 mL),  à 36 semaines.

À la semaine 24, les niveaux plasmatiques de TGF-β1 étaient réduits de 57% et les niveaux de MMP-13 augmentaient de 67% (p=0,01).

Au total, le buloxibutid stabilise la CVF à 24 semaines et améliore la fonction pulmonaire à 36 semaines avec une réduction des niveaux plasmatiques de TGF-β1 et une augmentation de MMP-13. Le profil de sécurité et de tolérance est favorable. Les auteurs soulignent que l’augmentation de la CVF pourrait être liée à une amélioration de la « dynamique » ventilatoire et de la compliance.  La sécurité et l’efficacité du buloxibutid en tant que traitement de la FPI seront évaluées dans l’essai multicentrique de phase 2b, randomisé, en double aveugle, contrôlé par placebo, ASPIRE, sur 52 semaines.

D’après la communication de T.M. Maher. Buloxibutid, a novel angiotensin II type 2 receptor agonist, stabilized and improved lung function in individuals with idiopathic pulmonary fibrosis in the 36-week phase 2 AIR trial. Am J Respir Crit Care Med 2024;209: A1055 (session A18).

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Quel traitement initier chez les patients atteints d’HTAP avec comorbidités cardiovasculaires ?

Les recommandations européennes pour la prise en charge des patients atteints d’hypertension pulmonaire (HTP) recommandent d’initier des traitements combinés (bithérapie ou trithérapie) chez les patients atteints d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP) sans comorbidité cardiovasculaire, alors qu’une simple monothérapie est recommandée chez ceux avec comorbidité cardiovasculaire, au nom du principe de précaution concernant la tolérance des médicaments. Une étude française a rapporté des données de vraie vie concernant l’efficacité et la tolérance des deux stratégies thérapeutiques chez les patients atteints d’HTAP avec au moins une comorbidité cardiovasculaire.

Il s’agit d’une étude rétrospective réalisée à partir du registre français des HTP entre 2009 et 2020. Parmi les 1784 patients analysés, 1088 (61%) avaient au moins une comorbidité cardiovasculaire (obésité, hypertension artérielle, diabète ou coronaropathie). Parmi eux, 60% ont été initiés en monothérapie et 40% ont reçu des traitements combinés (majoritairement l’association antagoniste des récepteurs de l’endothéline et inhibiteur de phosphodiestérase 5). Un score de propension a été réalisé pour rendre comparables les 2 groupes étudiés (monothérapie et bithérapie orale) sur les critères suivants : âge, sexe, indice de masse corporelle et risque de mortalité au diagnostic de l’HTAP. Chaque groupe était constitué de 354 patients.

L’amélioration fonctionnelle et hémodynamique lors de la première réévaluation (5 mois après le diagnostic) était meilleure sous bithérapie que sous monothérapie (baisse de 50% des résistances vasculaires pulmonaires contre 27%, p<0,001). De plus, la probabilité d’atteindre un risque faible ou intermédiaire-faible de mortalité lors de la première réévaluation était significativement plus élevée chez les patients initiés en bithérapie (53%) que chez ceux recevant une monothérapie (45%), p=0.029. La survie à un an était également meilleure chez les patients initiés en bithérapie (95%) que chez ceux sous monothérapie (90%, p=0,027), alors qu’aucune différence de survie à long-terme n’était retrouvée entre les 2 groupes. Au cours du suivi, 68% du groupe monothérapie et 35% du groupe bithérapie initiale ont nécessité une escalade thérapeutique. Les données de tolérance étaient similaires entre les 2 groupes (monothérapie et bithérapie) : respectivement 24% et 23% d’arrêt de traitement, et 7% et 10% d’élévation de la pression artérielle pulmonaire d’occlusion (PAPO) au-delà de 15 mmHg (p=0.17). La stratégie thérapeutique n’était pas un facteur prédictif de survenue de ces évènements. En revanche, le diabète et une PAPO au diagnostic comprise entre 13 et 15 mmHg étaient prédictifs d’une élévation ultérieure de la PAPO.

En conclusion, la bithérapie orale semble être une option thérapeutique efficace et sûre dans l’HTAP aussi bien chez les sujets sans comorbidité cardiovasculaire que chez les patients comorbides.

D’après la communication de A. Boucly. Initial therapy in pulmonary arterial hypertension and cardiovascular comorbidities: monotherapy or dual combination? Am J Respir Crit Care Med 2024;209:A1017 (Session A14)

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Mycobactérioses pulmonaires à M. xenopi : enfin les résultats de l’essai CaMoMy !

Les infections pulmonaires à Mycobacterium xenopi restent rares mais difficiles à traiter. Il n’existe pas de consensus sur leur traitement optimal et très peu de données sont disponibles sur le taux de négativation des cultures des expectorations. La France peut s’enorgueillir d’avoir mené à bien le premier essai clinique randomisé construit pour analyser le taux de négativation des cultures après 6 mois de traitement. Les résultats ont été présentés en avant-première et sont particulièrement intéressants.

L’essai clinique CaMoMy (PHRC 2010) comparait en ouvert un traitement associant rifampicine, éthambutol et soit clarithromycine, soit moxifloxacine chez 83 patients atteints de mycobactériose pulmonaire à M. xenopi. L’âge médian des participants inclus dans une trentaine de centres français était de 60 ans, avec 60 hommes et 90% de fumeurs. Plus de 87% de ces patients étaient atteints de maladie respiratoire chronique (75% de BPCO, 10% de bronchiectasies, 19% de séquelles post-tuberculeuses) et 39% étaient traités par corticoïdes inhalés. Ces patients étaient atteints d’une mycobactériose sévère puisque plus de 58% rapportaient une fatigue, 46% une perte de poids, 65% des excavations sur l’imagerie thoracique et une médiane de 3 prélèvements d’expectoration positifs en culture.

Le résultat principal de l’étude est d’avoir objectivé une négativation des cultures dans 93,2% des cas après 6 mois de traitement, sans différence entre les 2 bras (93,2% avec la clarithromycine vs. 82,1% avec la moxifloxacine, p=0,11 en intention de traiter). L’amélioration clinique à 6 mois était notable, avec seulement 19% de patients rapportant une anorexie (contre 28% à l’inclusion) et 34% de fatigue (contre 58,5% à l’inclusion). Globalement, seulement 1,2% des patients se sont aggravés à 6 mois, 34,9% se sont améliorés de manière significative et 63,9% sont restés stables. La tolérance a été comparable dans les 2 bras, avec 18,6% d’effets indésirables graves sous clarithromycine et 20% sous moxifloxacine (p=0,55). Seulement 3 patients sont passés de la clarithromycine à la moxifloxacine tandis que 4 autres sont passés de la moxifloxacine à la clarithromycine.

Cet essai clinique permet donc enfin de proposer un traitement reposant sur des données solides dans les mycobactérioses pulmonaires à Mycobacterium xenopi. D’après C. Andrejak (Amiens, France), il est désormais possible de débuter un traitement avec l’une des 2 molécules étudiées, en association avec rifampicine et éthambutol, et de passer de l’une à l’autre en cas de mauvaise tolérance. Un prochain essai clinique sur cette thématique va bientôt débuter en France pour tester l’intérêt éventuel d’ajouter à ce traitement de l’amikacine liposomale nébulisée (essai AkaPI, PHRC 2021). L’histoire n’est donc pas tout à fait finie…

D’après la communication de C. Andrejak et al. M. xenopi pulmonary infection: a randomized clinical trial comparing rifampin + ethambutol + either clarithromycin or moxifloxacin: the Camomy study. Am J Respir Crit Care Med 2024;209:A2995.

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Traitement de l’infection pulmonaire à mycobactéries du complexe aviaire de forme non cavitaire : intermittent plutôt que quotidien ?

En cas d’infection pulmonaire à mycobactérie atypique du complexe Mycobacterium avium (MAC) sensible aux macrolides et de forme non cavitaire (forme nodulo-bronchectasique), un traitement antibiotique intermittent (incluant un macrolide, préférentiellement l’azithromycine) administré trois fois par semaine est suggéré dans les recommandations internationales (ATS/ERS/ESCMID/IDSA) en vigueur. Ceci repose sur les données d’études de cohorte suggérant un profil de tolérance plus favorable qu’en cas d’administration quotidienne du traitement, faute jusqu’à ce jour de données issues d’un essai contrôlé randomisé comparant ces deux stratégies.

Au cours de ce congrès ont été rapportés les résultats d’un essai contrôlé randomisé, en ouvert, multicentrique japonais, visant à évaluer la tolérance, l’innocuité et l’efficacité d’un traitement antibiotique intermittent par rapport à un traitement quotidien chez des patients atteints d’infection pulmonaire à MAC de forme non cavitaire et naïfs de traitement. Dans le bras « traitement intermittent », les patients étaient assignés à recevoir trois fois par semaine de la clarithromycine (1 g/j), de la rifampicine (600 mg/j) et de l’éthambutol (25 mg/kg/j, maximum 1 g/j) tandis que dans le bras « traitement quotidien », ils devaient recevoir quotidiennement les mêmes molécules à des posologies relativement inférieures, respectivement de 800 mg/j, 450 mg/j et 15 mg/kg (maximum 750 mg/j). Le critère d’évaluation principal était la proportion de patients nécessitant une modification initiale du schéma thérapeutique, les critères d’évaluation secondaires comportant les événements indésirables, la conversion des cultures d’expectoration, le délai de conversion des cultures, l’amélioration des lésions évaluées par scanner thoracique, l’amélioration de la qualité de vie liée à la santé et le développement d’une résistance à la clarithromycine. Parmi 141 participants initialement recrutés dans 21 centres entre mai 2019 et décembre 2021, 138 ont pu être analysés (bras « traitement intermittent », n = 70 ; bras « traitement quotidien », n = 68). La proportion de patients ayant nécessité une modification de traitement (réduction de posologie ou suspension d’au moins une molécule) était de 20 % (14/70) dans le bras «  traitement intermittent » et de 33,8% (23/68) dans le bras «  traitement quotidien », sans que cette différence soit significative (odds ratio ajusté 0,48, IC95% (0,22 à 1,05) ; p=0,065). Il n’y avait également pas de différence significative entre les 2 bras en termes de taux de conversion des cultures (70,3% versus 80,0% respectivement, p=0,533), de délai de conversion des cultures (28,0 vs 28,5 jours, p=0,891), d’amélioration des résultats du scanner thoracique (60,9% vs 71,0%, p=0,303), ou d’acquisition d’une résistance à la clarithromycine (1,4% vs  0%, p=1,000). La tolérance hépatique semblait meilleure en cas de traitement intermittent (élévation des ASAT : 16,9% vs 41,2% respectivement, p=0,003 ; élévation des ALAT : 18,3% vs 44,1%, p=0,002) sous réserve d’hyperbilirubinémies (11,3% vs 1,5%, p=0,039) et de dysgueusies (14,1% contre 1,5%, p = 0,011) plus fréquentes en cas de traitement intermittent, sans différence en termes de fréquence d’effets indésirables graves entre les 2 bras (8,5% vs 5,9% ; p=0.8). Concernant la qualité de vie, il n’a pas été observé de différence significative de variation du score du questionnaire respiratoire de St George’s mais une différence de variation de la composante physique du score SF-36 significativement plus favorable dans le groupe « traitement quotidien » (-2,5 vs 2,1 points ; p=0,012).

Finalement, le manque de puissance probable de l’étude et l’utilisation de la clarithromycine, et non de l’azithromycine suggérée dans les recommandations du fait d’un profil de tolérance et d’interaction médicamenteuse supposé plus favorable, n’a pas permis de démontrer la supériorité d’un traitement antibiotique administré de manière intermittente en cas d’infection pulmonaire à MAC de forme non cavitaire.

D’après la communication de K. Fujita, Intermittent versus daily treatment for noncavitary nodular bronchiectatic Mycobacteria avium complex lung disease with rifampicin, ethambutol, and clarithromycin (iREC): an open-label, multicenter, randomized controlled trial. Am J Respir Crit Care Med 2024;209:A1035. (session A16)

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Amikacine liposomale inhalée en traitement de première ligne dans les infections pulmonaires à mycobactéries atypiques du complexe Mycobacterium avium : des données encourageantes.

Les infections pulmonaires à mycobactéries atypiques du complexe Mycobacterium avium (MAC), compliquant le plus souvent une pathologie pulmonaire chronique sous jacente (e.g. BPCO ou dilatation des bronches), peuvent être responsables de symptômes invalidants justifiant l’instauration d’un traitement dont l’efficacité reste inconstante. L’amikacine liposomale administrée par voie inhalée (ARIKAYCE®) s’est avérée efficace pour améliorer le taux de rémission en cas de forme réfractaire au traitement antimycobactérien de première intention. Un essai randomisé contrôlé en double aveugle visant à évaluer l’intérêt de cette molécule chez des patients atteints d’infection respiratoire à MAC est actuellement en cours (ENCORE, NCT04677569) mais les résultats d’une étude préliminaire ont été rapportés lors de ce congrès.

L’étude ARISE (NCT04677543) avait comme objectif principal de démontrer la capacité de questionnaires (domaine respiratoire du score de qualité de vie de la bronchectasie (QOL-B RD) pour les symptômes respiratoires, score PROMIS-F pour l’évaluation de la fatigue) à évaluer l’efficacité de traitement sur les symptômes rattachables à une infection pulmonaire à MAC de forme non cavitaire. Les objectifs secondaires étaient d’évaluer l’efficacité microbiologique du traitement et leur sécurité. Les participants recrutés étaient des sujets adultes atteints d’infection pulmonaire à MAC de forme non cavitaire, naïfs de tout traitement spécifique, randomisés selon un rapport 1:1 pour recevoir une suspension pour inhalation de liposomes d’amikacine (bras ALIS) [590 mg] ou un placebo correspondant à des liposomes vides (bras comparateur), couplé dans les deux bras à une bithérapie orale par azithromycine (250 mg/j) et éthambutol (15 mg/kg/j) pendant 6 mois, suivi d’une surveillance sans traitement pendant 1 mois. Les critères d’évaluation principaux, un peu complexes, visaient à évaluer les capacités discriminatives des questionnaires proposés. Les critères secondaires d’évaluation comprenaient la proportion de patients ayant converti leurs cultures d’expectoration à 6 mois, le délai jusqu’à l’obtention de la conversion des cultures (définie par la négativité des cultures de 4 prélèvements d’expectoration obtenus lors de 2 visites consécutives), le délai jusqu’à la première culture négative et les données de sécurité. Les participants (bras ALIS, n = 48 ; bras comparateur, n = 51) avaient un âge médian de 69,0 ans (77,8 % de femmes, 80,8 % de race blanche). Il s’agissait d’un premier épisode d’infection pulmonaire à MAC dans 72,7 % des cas, à M. avium dans 32,3 % et à M. intracellulaire dans 43,4 % des cas. Les analyses transversales de fiabilité et de validité ont permis de démontrer la robustesse « psychométrique » des scores QOL-B RD et PROMIS-F pour évaluer l’évolution des symptômes et distinguer les patients améliorés ou non dans ce contexte spécifique. Concernant l’efficacité microbiologique, le taux de conversion des cultures à 6 mois était de 80,6 % dans le bras ALIS contre 63,9 % dans le bras comparateur. A 7 mois soit à 1 mois de l’arrêt du traitement, le taux de conversion des cultures était de 78,8 % dans le bras ALIS contre 47,1 % dans le bras comparateur (p=0,0010). Parmi les patients ayant converti leur culture à M6, la première culture négative définissant la conversion était obtenue à M1 pour 74,3 % des patients dans le bras ALIS contre 46,7 % dans le bras comparateur. La durée médiane (IQR) jusqu’à la première culture négative définissant la conversion de culture était de 1,0 (1,0-3,0) mois dans le bras ALIS et de 2,0 (1,0-5,0) mois dans le bras comparateur. Les événements indésirables non graves plus fréquents dans le groupe ALIS que dans le groupe comparateur étaient la dysphonie et la toux. Aucun événement indésirable grave lié à l’ALIS ni décès n’a été signalé.

On attend donc avec une certaine impatience les résultats de l’étude ENCORE (12 mois de traitement puis 3 mois de suivi) qui confirmera probablement ces données encourageantes.

D’après la communication de C. L. Daley, A Randomized, Double-blind trial of amikacin liposome inhalation suspension in adults with newly diagnosed or recurrent Mycobacterium avium complex lung disease to validate Patient-reported outcome instruments and assess microbiological outcomes of treatment: The ARISE Study. Sessions A16 et B13. Am J Respir Crit Care Med 2024;209:A1032 et A1033.

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