Fonction respiratoire aux deux extrémités de la vie

Croissance broncho-pulmonaire et déterminisme pathologique chez l’enfant et l’adolescent

La période de croissance s’étale de la naissance à 18-20 ans. Sur le plan thoracique, elle est caractérisée par des modifications importantes et rapides des volumes pulmonaires et de la conformation des voies aériennes. Même si elles sont issues de données transversales et non pas longitudinales, les normes de la Global Lung function Initiative (GLI), utilisant un seul jeu d’équations pour toute la vie, permettent d’entrevoir les variations attendues de la fonction respiratoire aux différents âges1, 2. La croissance pulmonaire est majoritairement dysanaptique, c’est-à-dire avec une augmentation des volumes pulmonaires qui est globalement supérieure à celle du diamètre bronchique, sauf pendant l’adolescence marquée par une phase transitoire de croissance de rattrapage en calibre des voies aériennes, entraînant une diminution des résistances spécifiques (sRaw) et un rebond du rapport de Tiffeneau, contribuant probablement, chez certains enfants asthmatiques, à la disparition des symptômes pendant cette période.

Il existe des couloirs de fonction, prédéterminés dès la naissance (notion de tracking), avec des prédispositions génétiques à présenter un couloir bas ou un déclin précoce, favorisant l’apparition de pathologies respiratoires de l’enfance (asthme) et de l’adulte (BPCO). La croissance broncho-pulmonaire est également influencée négativement par un éventuel déficit pondéral in utero et dans l’enfance, les expositions aux aérocontaminants, les infections ; et au contraire probablement influencée positivement par l’activité physique si elle est suffisamment intense et régulière 3 , 4 , 5.

EFR de l’enfant

Le choix des tests réalisés chez l’enfant répond à trois critères, dépendant de l’âge : la pertinence (test le plus à même d’explorer un mécanisme physiopathologique donné), la fiabilité (disponibilité d’un équipement standardisé approprié, existence de valeurs de références, connaissance d’un seuil de changement cliniquement significatif sur une période de temps donnée), et la faisabilité 6.

La problématique la plus fréquente est d’étayer une suspicion d’asthme, notamment par un test de réversibilité aux bronchodilatateurs, ou parfois par un test de provocation à la méthacholine (potentiellement utile lorsque la probabilité clinique pré-test est intermédiaire). Quatre tests sont couramment utilisés : la spirométrie forcée avec mesure du volume expiré maximal dans la première seconde (VEMS), le calcul des sRaw par pléthysmographie, les résistances par interruption de débit (Rint), et les oscillations forcées. Les résultats obtenus avec ces différentes techniques ne sont toutefois pas toujours parfaitement corrélés, ni avec des échelles de contrôle de l’asthme comme l’ACT (Asthma Control Test).

Déclin de la fonction respiratoire chez l’adulte

À l’âge adulte, la capacité vitale et la capacité pulmonaire totale décroissent, tandis que la capacité résiduelle varie peu et que le volume résiduel se majore. Cela est amplifié chez le sujet âgé par la réduction du volume pulmonaire d’élastine et la diminution de la compliance. En revanche, le déclin physiologique affecte proportionnellement davantage le calibre des voies aérienne, ce qui se traduit par une diminution progressive du rapport de Tiffeneau.

Également, au-delà de 60 ans, on observe une raréfaction capillaire pulmonaire rapide. Cette diminution du volume capillaire pourrait être un déterminant important de la durée de vie. Des données de la littérature suggèrent qu’une activité physique intense pourrait augmenter le capital capillaire et enrayer son épuisement.

EFR chez le sujet âgé

Chez le sujet âgé, la fonction respiratoire est corrélée à des marqueurs de fragilité (frailty) et au pronostic, indépendamment de la pathologie respiratoire sous-jacente. Les EFR sont généralement réalisables, avec une qualité acceptable dans plus de 80 % des cas (voire plus de 90 % dans certaines séries). Plus encore que des troubles locomoteurs, une fatigabilité des muscles respiratoires ou une asthénie globale, les troubles cognitifs représentent le principal frein à la réalisation des EFR dans cette population, proportionnellement à leur sévérité. Dans ce cas, l’opérateur·ice doit mimer au maximum les manœuvres à réaliser, et parfois privilégier des techniques moins dépendantes de la participation des patient·es telles que les oscillations forcées.

Les normes de la GLI permettent de disposer de valeurs de références jusqu’à 80 ans pour les volumes statiques, 85 ans pour le transfert, et 95 ans pour la spirométrie forcée ; en gardant à l’esprit que les sujets sains ayant permis d’élaborer ces équations peuvent correspondre à une population sélectionnée de « survivants » et surestiment peut-être les valeurs attendues aux âges extrêmes. Compte-tenu de ces interrogations autour des valeurs attendues, chez les sujets âgés, le déclin du VEMS semble mieux corrélé à des marqueurs cliniques de statut fonctionnel lorsqu’il est exprimé en variation relative plutôt qu’en variation absolue.

  1. Cooper BG, Stocks J, Hall GL, et al. The Global Lung Function Initiative (GLI) Network: bringing the world’s respiratory reference values together. Breathe (Sheff) 2017;13(3):e56-e64. doi: 10.1183/20734735.012717
  2. Hall GL, Filipow N, Ruppel G, et al.; contributing GLI Network members. Official ERS technical standard: Global Lung Function Initiative reference values for static lung volumes in individuals of European ancestry. Eur Respir J 2021;57(3):2000289. doi: 10.1183/13993003.00289-2020
  3. Postma DS, Bush A, van der Berge M. Risk factors and early origins of chronic obstructive pulmonary disease. Lancet. 2015;385(9971):899-909. doi: 10.1016/S0140-6736(14)60446-3
  4. McGeachie MJ, Clemmer GL, Croteau-Chonka DC, Castaldi PJ, Cho MH, Sordillo JE, Lasky-Su JA, Raby BA, Tantisira KG, Weiss ST. Whole genome prediction and heritability of childhood asthma phenotypes. Immun Inflamm Dis 2016;4(4):487-496. doi: 10.1002/iid3.133
  5. Agustí A, Faner R. Lung function trajectories in health and disease. Lancet Respir Med 2019;7(4):358-364. doi: 10.1016/S2213-2600(18)30529-0
  6. Stocks J, Kirkby J, Lum S. How to avoid misinterpreting lung function tests in children: a few practical tips. Paediatr Respir Rev 2014;15(2):170-80. doi: 10.1016/j.prrv.2014.02.001
Retour en haut
SPLF-APP

GRATUIT
VOIR