Mourir d’une infection : quand la science explore l’histoire

Si le propos initial concernait la fonte du permafrost et les risques infectieux que cela comporte pour nous, que ce soit à l’échelle locale (troupeaux décimés par l’anthrax dans l’Oural, populations autochtones affectées), ou globale (circulation de pathogènes jusqu’ici congelés, métaux lourds libérés), le Dr Charlier est vite passés à l’exploration de morts célèbres.

De Saint Louis à Robespierre

Ainsi, le décès de Saint Louis, traditionnellement associé à la peste à Tunis, est en fait lié à un scorbut ayant entraîné des surinfections digestives et un décès par sepsis à Capnocytophaga sputigena. L’analyse de ses viscères a également permis de retrouver du Schistosoma haematobium, probablement acquis lors de la septième croisade vers Jaffa, et cohérent avec les hématuries macroscopiques dont il souffrait.

Quant à Robespierre, les écrits de son médecin personnel évoquent une sarcoïdose avec fatigabilité importante, des nodosités saignantes sur l’ensellure nasale et la face antérieure des jambes, une toux sèche, des épistaxis, un ictère progressif et des ganglions. Cette fois-ci, malheureusement, il n’est pas possible de confirmer le diagnostic, son corps n’ayant pas été conservé après son exécution.

Étudier l’évolution des pathogènes pour prédire les prochaines pandémies

Les études sur les latrines dans divers endroits du monde permettent d’en savoir plus sur le régime alimentaire de l’époque bien sûr, mais aussi sur le microbiote fécal. Les prélèvements cutanés permettent quant à eux d’en savoir plus sur l’évolution des souches virales au fil du temps. Et ainsi la boucle est bouclée, car ces informations anciennes sont d’une importance majeure pour les microbiologistes actuels, permettant de contribuer à prédire l’évolution des pathogènes actuels et donc le risque de pandémie. Le poumon malheureusement se conserve assez mal dans le temps et notamment dans les reliques.

Dr Justine Frija, Service de physiologie, explorations fonctionnelles, hôpital Bichat-Claude Bernard, Paris


D’après la conférence inaugurale RD01 « Mourir d’une infection : quand la science explore l’histoire » de Philippe Charlier (Paris) du vendredi 24 janvier 2024.

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