Comprendre et traiter l’asthme grâce à la génétique

La Dr Emmanuelle Bouzingon a rappelé que l’asthme est une maladie fréquente et complexe. Différents facteurs environnementaux associés à une composante génétique aboutissent à un large spectre d’expressions cliniques chez nos patients, ou phénotypes. 

La génétique ne fait nécessairement pas le phénotype

Ces 15 dernières années, nous avons assisté à une révolution dans la génétique de l’asthme, grâce aux études pangénomiques. En 2022, une métanalyse de 22 bio-banques a permis d’identifier 179 loci, dont 49 nouveaux, impliqués dans les phénotypes d’asthme 1. On a ainsi appris que les sujets porteurs de certains variants délétères dans la région identifiée 17q12-q21 sont plus à risque de développer un asthme de début précoce, et que plus ce sujet est porteur de variants délétères, plus son asthme commencera tôt dans la petite enfance. Mais bien que l’on identifie différents marqueurs génétiques dans la même région, l’expression clinique sera différente selon les sujets et leur exposition environnementale. L’exposition à un tabagisme précoce et la survenue d’infections virales dans l’enfance jouent par exemple un rôle important 2. À l’inverse, l’exposition aux chats dans la petite enfance diminue le risque d’asthme précoce chez les sujets pourtant porteurs du génotype le plus à risque de développer ce type d’asthme 3. L’expression des allèles peut aussi différer selon qu’il est transmis par le père ou la mère : une association entre asthme et rhinite et transmission par le père a été démontrée 4

La pharmacogénétique pour prédire la réponse au traitement de l’asthme

Mais qu’est-ce que la pharmacogénétique finalement ? L’identification de variants génétiques qui sont associés à la réponse aux traitements, a expliqué le Pr Phillippe Devillier. Les polymorphismes des nucléotides représentent 90% de l’ensemble des variants génétiques, 680 sont associés à l’asthme. C’est ainsi que lors de l’étude de 535 000 polymorphismes, 1 seul a été identifié comme facteur de réponse aux corticostéroïdes inhalés : le gène GLCCI1 5.

La vaccination génique : une perspective thérapeutique ?

Le Pr Laurent Guilleminault a défini la vaccination génique comme l’identification d’un gène d’intérêt dysfonctionnel, modifié afin d’obtenir la protéine non produite. Mais dans l’asthme, on note une hétérogénéité majeure, entre les patients, entre les gènes impliqués, mais aussi entre les études conduites, rendant complexe la réflexion. Il faudrait pouvoir cibler plusieurs gènes dans le même temps, et savoir à quels patients proposer ces traitements. La vaccination non génique ciblant directement les mécanismes T2 majoritairement impliqués dans l’asthme serait plus adaptée. Bien que les biothérapies ont révolutionné la prise en charge de l’asthme, il reste nécessaire de renouveler régulièrement les injections. Un vaccin IL4/IL-13 est en cours de développement dans l’asthme 6, 7 : il a déjà démontré son efficacité sur des modèles murins et humanisés de souris, mais des études cliniques restent à mener. 

En conclusion

La génétique dans l’asthme s’est fortement développée ces dernières années et ouvre de nouvelles perspectives dans la prise en charge personnalisée des patients en identifiant différents mécanismes impliqués dans les phénotypes de l’asthme, ceux impliqués dans la résistance aux traitements, et en proposant de nouvelles stratégies thérapeutiques par la vaccination génique.


  1. Tsuo K, Zhou W, Wang Y, et al.; Global Biobank Meta-analysis Initiative; Daly MJ, Martin AR. Multi-ancestry meta-analysis of asthma identifies novel associations and highlights the value of increased power and diversity. Cell Genom. 2022;2(12):100212. doi: 10.1016/j.xgen.2022.100212.
  2. Bouzigon E, Corda E, Aschard H, et al. Effect of 17q21 variants and smoking exposure in early-onset asthma. N Engl J Med. 2008;359(19):1985-94. doi: 10.1056/NEJMoa0806604.
  3. Stokholm J, Chawes BL, Vissing N, Bønnelykke K, Bisgaard H. Cat exposure in early life decreases asthma risk from the 17q21 high-risk variant. J Allergy Clin Immunol. 2018;141(5):1598-1606. doi: 10.1016/j.jaci.2017.07.044.
  4. Sarnowski C, Sugier PE, Granell R, et al. Identification of a new locus at 16q12 associated with time to asthma onset. J Allergy Clin Immunol. 2016;138(4):1071-1080. doi: 10.1016/j.jaci.2016.03.018.
  5. Tantisira KG, Lasky-Su J, Harada M, et al. Genomewide association between GLCCI1 and response to glucocorticoid therapy in asthma. N Engl J Med. 2011;365(13):1173-83. doi: 10.1056/NEJMoa0911353.
  6. Conde E, Bertrand R, Balbino B, et al. Dual vaccination against IL-4 and IL-13 protects against chronic allergic asthma in mice. Nat Commun. 2021;12(1):2574. doi: 10.1038/s41467-021-22834-5.
  7. Lamanna E, Conde E, Mougel A, et al. A vaccine targeting human IL-4 and IL-13 protects against asthma in humanized mice. Allergy. 2023;78(7):2028-2031. doi: 10.1111/all.15680.
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