Pneumologie

Réhabilitation respiratoire virtuelle : questions pratiques


La pandémie liée au Covid-19 a amplifié le développement de programmes de réhabilitation respiratoire (RR) au domicile. Si cette solution est explorée depuis plusieurs années, pour améliorer l’accès à la RR, l’ouverture de ce type de programme de RR est rapportée à foison lors de l’ATS 2021. Il s’agit de répondre rapidement à ces deux problématiques : poursuivre la RR des patients insuffisants respiratoires chroniques en réduisant le risque sanitaire au maximum et inclure en RR un grand nombre de patients souffrant de symptômes persistants post-Covid, et notamment de dyspnée, de fatigue et d’anxiété. Voici un florilège de travaux préliminaires qui évaluent différents aspects pratiques de ces modalités virtuelles de RR : quels outils d’évaluation et quels matériels ?

D’une part, certains travaux évaluent les outils de mesure de la tolérance à l’effort. Ces mesures sont indispensables : elles sont utilisées pour régler l’intensité de l’entrainement et s’assurer de la sécurité du patient, combinée avec une mesure de la SpO2 mais aussi pour évaluer l’efficacité du programme. Le test de marche des 6 minutes n’est pas réalisable au domicile pour des raisons évidentes. Les couloirs de 50 m ne sont pas si fréquents, les appartements parisiens ne démentiront pas… L’utilisation du test de lever de chaise (version 30 secondes, 1 ou 3 minutes) semble avoir un certain intérêt dans ce contexte. Il identifie de façon fiable les désaturations à l’effort chez 64 patients post-Covid normoxiques au repos 1. Après l’évaluation initiale, il peut même faire partie des exercices de RR 2.
Pour plus d’informations, une revue a été publiée par A. Holland sur le sujet 3.

D’autre part, le contenu des séances de RR est modifié pour répondre aux contraintes pratiques. Impossible d’utiliser le sacro-saint cyclo-ergomètre au domicile ! La majorité des programmes utilisent un équipement adapté : la marche pour le réentrainement à l’effort et différents exercices de gymnastique pour le renforcement des muscles locomoteurs. Ces derniers nécessitent une chaise et, pour augmenter progressivement la difficulté, les équipes utilisent soit des poids (parfois faits-maison avec canettes ou bouteilles d’eau), soit des élastiques (type Théra-Band®), soit un stepper 4 5. Ce type de RR avec un équipement minimal à domicile a été validé auparavant dans de rares essais randomisés contrôlés 6.

L’efficacité des programmes de RR à domicile fait face à de nombreux défis. Leur déploiement et leur pérennisation va nécessiter un important investissement des équipes de RR. 

Marjolaine Georges, Service de Pneumologie et Soins Intensifs Respiratoires, CHU Dijon Bourgogne, Dijon


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L’apport des Big Data pour l’évaluation des facteurs déterminant l’arrêt d’utilisation de la PPC à long terme


Bien que la pression positive continue (PPC) représente le principal traitement du syndrome d’apnées obstructives au cours du sommeil (SAOS), utilisée par 1,4 millions de patients en France, son efficacité à long terme reste conditionnée par la qualité de son observance. Par ailleurs, peu d’études se sont intéressées aux causes d’interruption de la PPC.

C’est pour répondre à cette problématique que JL Pepin a analysé des informations issues de la base de données de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de tous les nouveaux patients âgés de plus de 18 ans chez qui une PPC a été débutée au cours de la période de janvier 2015 à décembre 2016. Cette analyse a porté sur les données recueillies en termes de diagnostic du SAOS (ICD-10) et de comorbidités spécifiques (BPCO, diabète, hypertension artérielle (HTA)), ainsi que sur les informations concernant l’utilisation de la PPC.

480.000 patients ont été inclus dans cette étude (âge moyen 59.3±13.6 ans, 65.4% d’homme). L’hypertension, le diabète et la BPCO étaient présents chez 50,7 %, 24,4 % et 4,3 % des patients, respectivement. Les taux d’interruption de la PPC après 1, 2 et 3 ans étaient de 23,1%, 37,1% et 47,7%, respectivement. L’analyse multivariée a permis de retrouver un risque significativement plus élevé d’arrêt de la PPC chez la femme (OR : 1,09 ; IC95%  [1,08-1,10]). De même le risque était significativement plus élevé chez les sujets les plus jeunes (<41 ans) et les plus âgés (>80 ans). Enfin, alors que la présence d’une BPCO (OR : 1,26 ; IC95% [1,23-1,29]) et d’un diabète (OR : 1,10 ; IC95% [1,09-1,11]) étaient significativement associés à un risque plus élevé d’interruption du traitement, la présence d’une HTA représentait un facteur d’utilisation de la PPC sans interruption (OR : 0,95 ; IC95% [0,94-0,96]).

Ces résultats soulignent l’importance de la contribution des comorbidités dans la poursuite du traitement par PPC au long cours ainsi que le rôle prépondérant que pourrait avoir un meilleur phénotypage des patients associé au développement de soins personnalisés.

A partir du poster de JL PEPIN: Rate of CPAP therapy termination in different obstructive sleep apnoea patient phenotypes : Analysis of the french nationwide health claims database. Am J Resp Crit Care Med, 2021; 203: A4736

Jean-Claude Meurice, Service de Pneumologie, CHU de Poitiers, Poitiers


Session TP 133 : Stimulating new research on sleep apnea physiology and pathophysiology

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Réhabiliter en distanciel, un modèle à développer ?


Les différents confinements et la nécessité de maintenir une distanciation physique associés à la pandémie persistante ont fortement impacté l’activité de réhabilitation respiratoire. Afin de continuer à proposer cette prise en charge aux patients le nécessitant, les centres se sont adaptés et ont proposé la mise en place à différentes échelles et avec différents moyens d’une télé-réhabilitation respiratoire. Quels sont les retours à ce stade ?

Lors du premier symposium consacré aux opportunités et défis liés à la pandémie à SARS-CoV2 pour la réhabilitation respiratoire (RR), J. Alison a refait une synthèse des travaux antérieurs portant sur la télé-RR et la RR à domicile rappelant que ces modalités de prise en charge avaient démontré leur efficacité en termes d’amélioration des symptômes respiratoires, de la capacité à l’exercice, de l’anxiété/dépression et de la qualité de vie. Elle rappelait que les difficultés liées à ces modes de prise en charge étaient la nécessité de posséder et savoir gérer les technologies utilisées pour les échanges à distance, la mise à disposition de matériel pour le réentrainement au domicile et la nécessité d’utiliser des tests réalisables au domicile pour l’évaluation du patient notamment sa capacité à l’exercice, point qui a fait l’objet d’une revue récente 1.

Deux nouvelles expériences sont rapportées sous forme de posters. Une première par J. Nicholson (London, Canada), proposait le programme suivant : 2 séances hebdomadaires d’exercices en visioconférence avec une 3e séance hebdomadaire réalisée de façon indépendante, et des séances d’éducation thérapeutique par téléphone puis par vidéos. Les 34 patients (âge moyen 69,9 ±9,7 ans) ayant bénéficié de cette prise en charge comparés à 164 patients (âge moyen 69,93 ±9,2 ans) ayant suivi le programme antérieur en présentiel présentaient une amélioration comparable en termes de distance parcourue au test de marche de 6 minutes (+72 et +55 m), de score General Anxiety Disorder-7 (+3 et +2 points) et de score CAT (+3 et +4 points). La deuxième par S. Bhatt (Birmingham, USA), proposait 36 séances en visioconférence réparties sur 12 semaines. Les 32 patients atteints de BPCO (âge moyen 64,8 ±9 ans) étaient appariés à 96 autres patients atteints de BPCO (âge moyen 67 ±8,8 ans) ayant suivi antérieurement le programme en présentiel. Ils présentaient une amélioration cliniquement significative et comparable aux contrôles en termes de dyspnée évaluée par le San Diego Shortness of Breath Questionnaire et de distance parcourue au test de marche de 6 minutes.

Ces nouvelles données confirment la faisabilité et l’efficacité de ce mode de prise en charge qui va possiblement se développer suite à l’épidémie à SARS-CoV2. Des travaux futurs devront préciser les profils de patients pour lesquels cette modalité pourra être proposée dans des conditions raisonnables de sécurité à la place ou en complément d’une modalité de RR plus classique. Si ce mode de prise en charge permet de pallier les difficultés d’accès aux centres en « abolissant » les distances, il n’abolit toutefois pas le temps médical et paramédical nécessaire à son fonctionnement.

Olivier Le Rouzic, Service de Pneumologie Immuno-Allergologie, CHU de Lille, Lille


D’après les communications et posters de :

J. Alison – But it’s not all about Covid-19 survivors. How to deliver pulmonary rehabilitation in the era of the Covid-19 pandemic.
Session A001 Rehabilitation and Covid-19 opportunities and challenges
J. Nicholson – Pandemic transition of an established hospital-based pulmonary rehabilitation program. Am J Respir Crit Care Med 2021;203:A4127

Session TP101 Rehabilitation in the time of covid-19
S. Bhatt – Video telehealth pulmonary rehabilitation for COPD is associated with clinical improvement similar to center based pulmonary rehabilitation. Am J Respir Crit Care Med 2021;203:A4148
Session TP103 Advancing pulmonary rehabilitation: innovations in design and delivery

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Oxygénothérapie à haut débit : quelle place pour l’insuffisance respiratoire aiguë à Covid-19 ?


L’intérêt de l’oxygénothérapie à haut débit (OHD), notamment pour réduire le recours à la ventilation mécanique invasive, a pu être démontré pour la prise en charge de l’insuffisance respiratoire aiguë (IRA) hypoxémique sévère (PaO2/FiO2 ≤ 200 mmHg) du patient immunocompétent 1. L’utilisation de l’OHD dans l’IRA hypoxémique des patients Covid-19 a cependant été largement débattue, voire contre-indiquée, notamment à la phase initiale de la pandémie en raison des risques de contamination (aérosolisation)  virale des équipes soignantes et de retard à l’intubation. Finalement peu d’études ont, jusque-là, rapporté l’intérêt potentiel de l’OHD dans la prise en charge de l’IRA sévère à SARS-CoV-2.

Une première étude rétrospective observationnelle de cohorte a ainsi été menée, du 1er Février au 3 Mai 2020, à partir des bases de données électroniques des services de réanimation universitaires du Colorado. Cent quatre-vingt-treize patients atteints d’IRA hypoxémique à SARS-CoV-2 ont été inclus, parmi lesquels 41 (21,2%) ont bénéficié d’OHD contre 152 (78,8%) n’en ayant pas bénéficié (oxygénothérapie standard) à la prise en charge initiale. Les deux groupes étaient comparables à l’état de base en termes d’âge, de sexe, d’indice de masse corporelle (IMC), d’ethnie et de comorbidités.  Avec un odds-ratio de recours à l’intubation de 0,23 (intervalle de confiance (IC)95% 0,11-0,475) comparativement au groupe traitement standard (p < 0,001), après ajustement sur les facteurs confondants (âge, sexe, IMC, ethnie, tabac, alcool, recours au décubitus ventral, corticostéroïdes, Remdesivir), les patients du groupe OHD présentaient finalement 86,9% de chance de ne pas être intubés (p < 0,001). Par contre, si les patients du groupe OHD devaient être intubés, ils passaient en moyenne 5,1 jours de plus sous ventilation mécanique comparativement au groupe contrôle (p = 0,025). Le recours à l’OHD initiale permettait de réduire la mortalité de 39,4% après ajustement, mais de façon non significative comparativement au groupe non OHD.

Dans une 2ème étude rétrospective de cohorte monocentrique, menée du 10 Mars au 17 mai 2020, 174 patients Covid-19avec IRA hypoxémique ont été distingués en trois groupes : prise en charge par intubation non précédée d’OHD (n = 49, 28,1%), par OHD seule (n = 84, 48,2%) ou par OHD suivie d’intubation (n = 41, 23,5%). Les 3 groupes avaient des caractéristiques de base globalement comparables. Des corticoïdes étaient cependant administrés plus fréquemment chez les patients du groupes OHD seule (84,3%) et OHD suivie d’intubation (90,2%) comparativement au groupe intubation seule (56,5%). La mortalité globale a été de 25,7% et était retrouvée significativement différente entre les 3 groupes intubation (36,7%), OHD seule (6%) et OHD suivie d’intubation (43,9%) (p = 0,004).

L’ensemble de ces résultats, pour intéressants qu’ils soient, doivent tenir compte des biais méthodologiques inhérents au design des études actuelles (rétrospectives, monocentriques, bases de données, etc). Néanmoins, ils confortent l’intérêt suggéré de l’OHD dans cette indication par quelques études rétrospectives récentes, notamment pour diminuer le recours à l’intubation et donc la morbi-mortalité des patients Covid-19 avec IRA hypoxémique modérée à sévère. En respectant certaines précautions de protection, notamment le port du masque (type FFP2) pour les soignants, l’OHD devrait donc pouvoir être considérée comme la stratégie d’oxygénation de 1ère intention dans ces situations sous réserve, pour ne pas retarder indument l’intubation, qu’elle soit appliquée par une équipe expérimentée dans un milieu sécurisé.

Christophe Girault, Service de Réanimation Médicale, Hôpital Charles Nicolle, CHU-Hôpitaux de Rouen, Université de Rouen, Rouen


D’après les communications de :

S. Fakhri. Assessing the use of heated high flow nasal cannula in COVID-19. Am J Respir Crit Care Med 2021; 203: A2501.
Session TP048. Covid : ARDS clinical studies

JM. Chowdhury. Outcomes with high flow nasal therapy vs invasive mechanical ventilation in Covid-19 patients with hypoxemic respiratory failure. Am J Respir Crit Care Med 2021; 203: A2637. Session TP051. Covid : Lung infection, multiorgan failure, and cardiovascular

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Exploration des nodules périphériques : de plus en plus efficace !


Plusieurs présentations ont évoqué la rentabilité des prélèvements de nodule périphérique avec les différentes techniques possibles actuellement. L’exploration du poumon périphérique est l’un des enjeux de la pneumologie de demain notamment avec l’avènement du dépistage du cancer du poumon.

Différentes techniques aujourd’hui existent pour exploration du poumon périphérique, l’échoendoscopie radiale (r-EBUS) ou encore appelée mini-sonde, la navigation électromagnétique et plus récemment les bronchoscopies robot (développées surtout aux États-Unis). Pour rappel, la probabilité d’avoir un diagnostic étiologique de nodule pulmonaire avec une endoscopie simple est de 53 % lorsque celui-ci est placé dans le tiers périphérique et diminue à 14% lorsque le nodule mesure moins
de 2 cm.

L’utilisation de l’échoendoscopie radiale a permis d’augmenter le taux de diagnostic à 70% pour une tumeur du tiers périphérique. V. Mulkareddy et al. 1 ont cherché à savoir si l’utilisation d’une aiguille souple (en plus de la pince à biopsie et de la brosse utilisées habituellement) permettait d’améliorer cette rentabilité diagnostique. La taille moyenne des nodules ponctionnés lors de cette étude était de 2,3 cm. Sur 71 procédures de r-EBUS, 23 ont été réalisées avec cette technique aboutissant à une rentabilité de 82% contre 60% lorsque l’aiguille n’était pas utilisée (p = 0,03). Il existe donc une amélioration significative de la rentabilité diagnostique grâce à l’aiguille souple mais la rentabilité dans le groupe témoin est légèrement inférieure aux données actuelles de la littérature.

Deux équipes ont ensuite rapporté leur expérience de la bronchoscopie robot avec le système Ion® (Intuitive Surgical®). Schématiquement, un cathéter-guide est positionné au niveau de la lésion cible grâce à une bronchoscopie virtuelle réalisée à partir d’une reconstruction 3D du scanner. Ensuite, la plupart des équipes vérifient la position du cathéter par l’introduction d’une sonde de r-EBUS ou par Cone Beam. Les prélèvements sont ainsi réalisés à l’aiguille. S. Verga et al. 2 rapportent une série de 69 patients présentant un nodule périphérique suspect dont 69% étaient < 2 cm.  La rentabilité diagnostique dans cette série était de 94% dont 52% de pathologies cancéreuses et l’autre moitié révélant des lésions bénignes ou infectieuses. Dans la seconde étude, A.Bajwa et al. 3 rapportent une série de 76 cas. Dans plus de 90% des cas, le nodule mesurait moins de 3 cm dont 59% avec un nodule de moins de 2 cm. La rentabilité diagnostique était excellente avec un taux de 92% toutes étiologies confondues dont 69% de cancers. La bronchoscopie robot semble donc être très performante dans le diagnostic des nodules périphériques, avec peu d’effets secondaires puisqu’il existe un taux de pneumothorax et de saignements de 3% pour chacune des techniques.

En ce qui concerne la rentabilité diagnostique dans la navigation électromagnétique, G Aftab et al. confirment 4 dans leur série que cette dernière augmente lorsqu’il existe un signe de la bronche (visualisation d’une bronche entrant dans le nodule), lorsque l’on ponctionne un nodule solide plutôt qu’un nodule en verre dépoli et lorsque l’intervalle entre le scanner et la procédure diagnostique est le plus court possible.

Ces techniques sont donc prometteuses, mais encore trop coûteuses, notamment dans la stratégie de dépistage du cancer du poumon où elles devraient trouver toute leur place à l’avenir.

Antoine Luchez, Pneumologie interventionnelle et Oncologie Thoracique, Hôpital Privé de la Loire, Saint Etienne


Session TP137 Thoracic oncology: diagnosis and treatment: IP, surgery, and radiation

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Étude RACE dans l’hypertension pulmonaire thrombo-embolique chronique : quelle stratégie thérapeutique adopter ?


Le traitement médical par riociguat et l’angioplastie pulmonaire sont deux options thérapeutiques de l’hypertension pulmonaire thrombo-embolique chronique (HTP-TEC) non opérable. L’étude RACE est le premier essai thérapeutique randomisé comparant ces deux stratégies thérapeutiques dans les formes incidentes d’HTP-TEC inopérables. Les résultats préliminaires de cette étude avaient été présentés à l’occasion du congrès de l’European Respiratory Society. Les données d’extension ont été présentées lors de la session D003 de l’American Thoracic Society.

Dans cette étude, la baisse des résistances vasculaires pulmonaires (RVP) à 26 semaines était significativement supérieure dans le bras angioplastie pulmonaire que dans le bras riociguat (baisse des RVP de 59% et 32% respectivement, p<0.0001), au prix de 42% et 9% d’évènements indésirables dans chacun des bras 1. L’étude d’extension concernait tous les patients restant symptomatiques avec des RVP supérieures à 4 UW. Un traitement additionnel leur était proposé : riociguat pour ceux précédemment traités par angioplasties pulmonaires (18/52) et inversement (36/53). Quel que soit le traitement de première intention utilisé, la baisse des RVP à un an était similaire dans les deux groupes (-61% dans le groupe riociguat en première ligne et -65% dans le groupe angioplasties d’emblée). Les patients prétraités par riociguat avaient significativement moins d’effets secondaires au cours de leurs séances d’angioplasties pulmonaires (14%) que ceux pour lesquels les angioplasties ont été réalisées en première ligne (42%). Ces données d’extension nous apprennent que quelle que soit la stratégie thérapeutique utilisée, l’efficacité hémodynamique est la même mais la fréquence des complications liées à l’angioplastie pulmonaire est réduite lorsque les patients sont prétraités par riociguat.

Cette étude marque une avancée majeure dans le milieu de l’hypertension pulmonaire en nous permettant de définir la meilleure stratégie thérapeutique en termes d’efficacité et de sécurité pour les formes inopérables d’HTP-TEC : traitement médical par riociguat dans un premier temps puis réalisation d’angioplasties pulmonaires.

Athénaïs Boucly, Service de Pneumologie et de Soins Intensifs Thoraciques, Hôpital de Bicêtre, APHP,  Le Kremlin Bicêtre


D’après la communication de
X. Jaïs. BPA and riociguat for the management of inoperable CTEPH: results of the extension study following the RACE randomized controlled trial. Am J Respir Crit Care Med 2021; 203; A1182
Session D003 Come together – clinical advances in pulmonary hypertension: lessons from best abstracts

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L’amikacine liposomale inhalée pour les formes réfractaires d’infections pulmonaires à MAC : quel rapport bénéfice/risque ?


Le traitement des infections pulmonaires à mycobactéries non tuberculeuses (MNT) est souvent complexe, 20% à 40% des patients infectés à Mycobacterium avium complex (MAC) ne répondant pas au traitement recommandé en 1ère intention. Les Guidelines de l’ATS/ERS/ESCMID/IDSA de 2020 proposent maintenant l’adjonction d’amikacine liposomale inhalée (ALI) au traitement anti-MAC de 1ère ligne (recommandation forte, certitude modérée en l’estimation de l’effet), son utilisation en France nécessitant une demande d’ATU.

Comme rappelé par Kenneth Olivier dans une session consacrée aux avancées thérapeutiques dans les dilatations des bronches et les infections à MNT, l’essai multicentrique de phase 3 CONVERT (NCT02344004) a en effet permis de montrer que l’adjonction d’ALI améliorait significativement la conversion des cultures chez les patients atteints d’infection pulmonaire à MAC en échec microbiologique malgré au moins 6 mois de traitement guidé par les recommandations (29% vs 8,9% après 4 mois de traitement, OR ajusté=4,22 ; IC95% (2.0-8,57), p<0,0001). Dans cette étude, les effets indésirables les plus fréquemment rapportés étaient respiratoires (dysphonie, toux, dyspnée) s’améliorant volontiers en quelques semaines. L’extension de l’étude en ouvert, pendant 12 mois de plus, a quant à elle montré, outre la conversion d’une petite proportion des patients en échec après 4 mois de traitement incluant l’ALI (13,7%), que les effets indésirables restaient communs mais que les toxicités néphrologiques ou auditives ne l’étaient pas. 

Dans une autre session, Theodore Marras a rapporté les résultats d’une analyse post hoc des données combinées de l’étude CONVERT, de son extension (NCT02628600) et de l’étude de phase 2 préalable (NCT01315236). L’objectif était d’évaluer les nombres de sujet à traiter pour « guérir » un patient (NNT: number needed to treat) ou lui « causer du tort » (NNH : number needed to harm), ce type d’analyse permettant de mieux appréhender les résultats d’un essai clinique dans la perspective de la pratique clinique. Les NNT respectifs concernant la conversion des cultures au 6ème mois, la conversion soutenue (tout au long des 12 mois de traitement après la conversion) et la conversion durable (sur les 3 mois suivants la suspension des traitements anti-MAC), étaient respectivement de 5, 6 et 6. Concernant les effets indésirables, une ototoxicité était rapportée chez 72/404 patients traités par ALI (17,8%), comprenant principalement des acouphènes (6,9%) et des étourdissements (5,9%). Les autres symptômes d’ototoxicité (surdité, surdité neurosensorielle, surdité unilatérale, hypoacousie, trouble de l’équilibre, présyncope et vertige) étaient rapportés chez <3% des patients traités par ALI. Une néphrotoxicité, des effets neuromusculaires et une alvéolite allergique étaient rapportés chez <5% de la population. Le NNH était de 13 pour l’ototoxicité, 60 pour la néphrotoxicité, 43 pour les effets neuro-musculaires et 51 pour l’alvéolite allergique, et respectivement de 28, 166, 40 et 60 après ajustement à l’exposition au médicament.

En attendant les données de tolérance « en vraie vie », celles des études disponibles mettent donc en avant le profil de tolérance particulièrement favorable de l’ALI, d’autant plus si l’on tient compte du fait que le bras comparateur n’était pas un placebo.

Frédéric Schlemmer, Antenne de Pneumologie, Réanimation Médicale, GH Henri Mondor, IMRB U955 équipe 4, Université Paris Est-Créteil, Créteil


D’après les communications de
K.N. Olivier – Session A030 – Bronchiectasis and NTM care : now and in the pipeline
T.K. Marras – Session D006 – Clinical and translational advances in TB and NTM – A1195 : ALIS (Amikacin Liposome Inhalation Suspension) for the treatment of patients with refractory Mycobacterium avium complex lung disease (MACLD), the number needed to treat (NNT) and number needed to harm (NNH)

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Aspergillose pulmonaire invasive chez les immunodéprimés, les non-immunodéprimés en réanimation et chez les patients Covid.


Dans le spectre des manifestations pulmonaires liées à Aspergillus, l’aspergillose pulmonaire invasive (API) est la forme la plus immédiatement menaçante. Si cette complication est familière aux médecins prenant en charge des patients immunodéprimés avec ou sans neutropénie, elle peut aussi se rencontrer chez des patients considérés comme non–immunodéprimés. Tout pneumologue peut être amené à discuter une API chez l’un de ses patients et doit donc en connaître les bases diagnostiques. Lors d’un symposium de l’ATS 2021 (B003) consacré aux infections fungiques, 3 présentations portaient sur l’API.

La présentation de S.E. Evans (Houston, TX, USA) portait sur les recommandations de pratique clinique de l’ATS auxquelles il a contribué 1 2 3Chez un patient immunodéprimé suspect de présenter une AI :
1) le dosage de galactomanane dans le sérum comme le LBA a une bonne sensibilité et une bonne spécificité, les performances diagnostiques les meilleures étant obtenues avec un seuil de positivité à 1.0 ;
2) la recherche d’Aspergillus par PCR dans le sérum comme dans le sang a une bonne valeur diagnostique avec une amélioration des performances diagnostiques permise par la répétition du test. Il faut se souvenir du fait qu’aucun de ces tests n’a de valeur diagnostique formelle.

E. Azoulay (Hôpital St Louis, Paris) a abordé le problème de l’infection aspergillaire chez les patients de réanimation, non-immunodéprimés. La prévalence d’isolement du champignon à partir des voies aériennes inférieures est assez rare dans ce contexte, estimée à 0.5 à 1% des patients. Les cas d’AI confirmée sont encore plus rare avec d’après l’auteur une prévalence de 0.1 à 0.2%. Néanmoins il existe des sous-groupes dans lesquels la prévalence d’isolement d’Aspergillus à partir des voies aériennes est supérieure. Par ordre de risque croissant, c’est le cas de la BPCO sous corticoïdes, du SDRA (avec pour ce dernier groupe des chiffres de prévalence autour de 8-10%), de l’assistance extra-corporelle par oxygénateur à membrane, et du SDRA compliquant une grippe. Ce dernier cas est associé à une prévalence d’AI estimée à 20%. Par analogie, les cas d’AI associée à un Covid 19 grave (définis par l’acronyme CAPA en anglais) sont bien décrits mais on manque encore de recul pour fixer la prévalence avec précision. Dans ce contexte l’AI se présente sous une forme pulmonaire ou sous la forme d’une trachéobronchite aspergillaire. Pour ce qui concerne le diagnostic des infections aspergillaires chez le patient de réanimation, il est proposé de distinguer 1) l’AI prouvée (histologie ou culture à partir d’un site normalement stérile ; 2) l’AI putative (association d’Aspergillus dans voies aériennes basses + signes et symptômes compatibles + imagerie compatible + facteur de risque d’IA ou culture semi-quantitative positive à Aspergillus sur le LBA (des propositions plus récentes font une place à la recherche de galactomanane dans le serum ou le LBA). Le thème des infections aspergillaires se développant chez les patients hospitalisés pour Covid 19 a été abordé plus en détail par K. Pennington (Toronto Canada). Les critères diagnostiques définissant l’AI chez un patient hospitalisé pour Covid 19 (CAPA) sont les suivants 4 :
1) CAPA prouvé dont les critères sont les mêmes que ceux de l’AI prouvée  (voir supra) ;
2) CAPA probable sous forme de trachéobronchite aspergillaire (trachéobronchite + LBA avec ex direct/culture/PCR >0 ou galactomanane >0 dans le LBA ou le sérum ;
3) probable CAPA avec atteinte parenchymateuse (image pulmonaire inexpliquée ou lésion cavitaire + LBA avec ex direct/culture/PCR >0 ou galactomanane >0 dans le LBA ou le sérum). On remarque qu’on ne fait pas appel comme chez l’immunodéprimé à la notion de facteurs de risque d’AI (le Covid19 suffit). Avec ces définitions, l’incidence de CAPA est estimée se situer entre 3 et 35% des patients admis en réanimation pour Covid 19, la grande variété pouvant s’expliquer notamment par la difficulté de distinguer chez ces patients l’infection de la colonisation et par l’existence de faux positifs de la recherche de galactomanane dans le LBA. La fréquence de positivité des recherches d’Aspergillus dans les voies aériennes basses serait plus proche de celle rencontrée dans les pneumonies bactériennes que dans la grippe grave. Pour l’auteur, le développement du CAPA ne serait qu’en partie due à l’effet direct de l’infection Covid sur le poumon mais serait plus à, relier aux comorbidités associées (transplantation d’organe, obésité, BPCO, diabète, cancer), aux traitements entrepris (corticoïdes, anti IL6, ECMO, antibiotiques) ou à la lymphopénie.

Hervé Mal, Service de pneumologie et transplantation pulmonaire, Hôpital Bichât, Paris


D’après les communications de

 S.E. Evans: ATS fungal diagnosis guidelines: what’s in there about pulmonary aspergillosis?
E. Azoulay : Aspergillus in the critically ill: underrecognized foe ?
K. Pennington : Should we be especially worried about fungal infections in the COVID-19 patient?
Session B003 : Making fungal infections exciting again : pressing questions in pulmonary and critical practice

Aspergillose pulmonaire invasive chez les immunodéprimés, les non-immunodéprimés en réanimation et chez les patients Covid. Lire la suite »

On ne laisse pas les macrophages dans un coin… eux-aussi sont importants dans le micro-environnement tumoral !


Dans le cancer bronchique non à petites cellules (CBNPC), les patients avec une addiction oncogénique tirent moins bénéfice des inhibiteurs de checkpoints immunitaires. Les macrophages présents dans le micro-environnement tumoral (TAM, pour tumor-associated macrophages) font partie d’une des populations immunitaires actuellement explorées, puisqu’ils pourraient contribuer à l’apparition de résistances aux traitements et donc à la progression de la maladie. 

Une étude présentée par Elisabeth A. Yu s’est intéressée au profil transcriptomique des TAM afin d’identifier des sous-types associés à la progression carcinologique et à la résistance au traitement. Des prélèvements biopsiques ont été réalisés à 3 temps de la prise en charge de patients avec dans la plupart des cas une addiction oncogénique : à l’état naïf de traitement, à l’état de maladie résiduelle et à la progression. Une analyse de séquençage ARN en single cell a ensuite été conduite sur chacun de ces prélèvements. Sept clusters distincts de macrophages ont été identifiés dont certains prédominant selon le stade de la prise en charge. En cas de patients naïfs de traitement, le cluster de macrophages identifié correspondait à des TAM matures et moins pro-inflammatoires. Chez les patients avec une maladie résiduelle, contrôlée sous traitement, les TAM étaient à la fois immatures et activés mais aussi matures et moins activés. En cas de progression de la maladie, les macrophages étaient davantage immatures et plus activés. Cette étude a permis de montrer que la polarisation des TAM pourrait participer à l’évolution carcinologique : des TAM pro-tumoraux chez les patients naïfs de traitement (matures et anti-inflammatoires), des TAM moins anti-tumoraux en cas de progression (immatures et moins pro-inflammatoires) et des TAM à la frontière entre les 2 en cas de maladie résiduelle, pouvant passer d’un état anti à pro-inflammatoire. Les macrophages présents dans le micro-environnement tumoral pourraient donc représenter de nouvelles cibles thérapeutiques et pronostiques dans le CBNPC.

Marion Ferreira, Service de pneumologie, CHRU Bretonneau Tours, Tours.


D’après la communication

Elizabeth An Yu. Deciphering macrophage function in lung tumor microenvironment and disease progression. Am J Respir Crit Care Med 2021; 203 A1073

Session – B008: Lung cancer 2021: advances in targets, screening and diagnosis.

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