Pneumologie

Prise en charge non-chirurgicale des pleurésies purulentes : ça bouge !


Bien que la pleurésie purulente soit un problème courant en pneumologie, les modalités optimales de sa prise en charge non-chirurgicale continuent à faire débat. Dans un symposium consacré à la pathologie pleurale (D025), YC Gary Lee, expert reconnu en matière de pathologie pleurale, a présenté les avancées récentes sur ce thème.

YC Gary Lee (Perth, WA, Australie) a rappelé l’intérêt porté sur l’étude de l’infection pleurale avec une augmentation exponentielle des publications au cours des 2-3 dernières décades. La question est un vrai problème de santé publique avec 10000 cas/an aux USA et un coût annuel de 100 millions de $. Près de ¾ des patients présentent une comorbidité (cancer, pathologie respiratoire, cardiaque, hépatique, alcoolisme, tabagisme actif…). L’infection pleurale est associée à un surcroît de mortalité, même à distance. Le score RAPID intégrant des données simples (fonction rénale, âge, purulence du liquide pleural, type d’infection source, albumine sanguine) mis au point par l’équipe d’Oxford pour prédire le risque de décès à 3 mois, de toutes causes confondues, chez les patients avec infection pleurale a été validé en 2020 1. L’analyse des résultats suggère que l’infection pleurale doit être vue comme un marqueur de fragilité : les patients meurent de leurs comorbidités et rarement du sepsis. Les bases du traitement de l’infection pleurale restent l’association du drainage du liquide infecté et du traitement antibiotique. Le bénéfice de l’administration intra-pleurale de l’activateur tissulaire du plasminogen (tPA) associé à la DNase sur la facilitation de drainage du liquide infecté a été démontré il y a 10 ans. Le consensus récent publié dans le Lancet Respir Med en 2021 sur l’utilisation de la fibrinolyse intrapleurale dans ce contexte recommande en première intention une dose de 10 mg de tPA associée à 5 mg de DNase, 2/j. Une étude randomisée comparant tPA/DNase vs vidéochirurgie vs drainage est en cours en Grande Bretagne (MIST3). Un travail récent de l’équipe de YC Gary Lee. a démontré le bénéfice à long terme (>12 mois) de l’association tPA/DNase. Une autre voie de recherche porte sur la dose optimale de tPA à administrer, compte tenu du prix et du risque potentiel de saignement, notamment chez les personnes âgées. Des données issues de la littérature vétérinaire indiquent que pour traiter les empyèmes de chevaux de 400 kg, une dose médiane de 3.7 mg était adéquate. Traiter les empyèmes avec 10 mg de tPA pourrait donc être excessif. Le groupe de YC Gary Lee. a testé en 2017 une dose de 5 mg de tPA avec un taux de succès de 90% et s’est engagé dans un nouvel essai appelé ADAPT 2 dont les résultats vont être soumis sous peu. Dans cette étude dans laquelle 55 patients ont été inclus, une dose de 2.5 mg + 5mg DNase, 2/j a été utilisée comme dose de départ, avec possibilité de monter la dose selon la réponse clinique. Un succès, corroboré par une réponse clinique, radiologique et biologique a été observé chez 91% des patients. Une augmentation de dose a été prescrite chez 14 patients. La durée médiane de séjour a été de 8.5 jours et le nombre médian de doses administrées était de 5.

Des travaux antérieurs ont suggéré qu’en cas de pneumonie, le fait de recevoir au préalable des corticoïdes inhalés pourrait diminuer l’épanchement para-pneumonique, ce qui pourrait suggérer que ce dernier pourrait être la conséquence d’une inflammation pleurale exagérée. Dans le cadre d’une étude randomisée contre placebo réalisée dans 6 centres australiens, l’équipe de YC Gary Lee. a ainsi testé le bénéfice éventuel apporté par la prescription de corticoïdes (4mg de dexaméthasone x2/j pendant 48h) chez 80 patients présentant un épanchement pleural associé à une pneumonie communautaire (étude STOPPE). En termes de bénéfice clinique, radiologique, biologique, les corticoïdes n’ont, dans cette étude, pas montré de différence par rapport au groupe placebo. La tolérance des corticoïdes a été bonne. Même si l’étude est négative, l’auteur n’exclut pas qu’il pourrait exister un sous-groupe de patients répondeurs qu’il n’aurait pas détecté.

Hervé Mal, Service de pneumologie et transplantation pulmonaire, Hôpital Bichât, Paris


D’après la communication de

D’après la communication de YC Gary Lee. Advances in Non-Surgical Management of Pleural Infection
Session D025 : Role of surgery for pleural disease in 2021 : what pulmonologists need to know

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Bactériophages vs Pseudomonas multi-résistant : 1 à 0 !


La présence de Pseudomonas aeruginosa dans les expectorations est fréquente dans la mucoviscidose avec sa mise en évidence dans les expectorations chez 37% des patients français en 2018. Sa prise en charge est compliquée par sa propension à s’installer définitivement et à développer des résistances aux antibiotiques. Après avoir été négligés pendant de nombreuses années, les bactériophages font de nouveau l’objet d’un intérêt car ils pourraient apporter une réponse aux problématiques liées aux infections par des bactéries multi-résistantes.

G. Stanley a rapporté les résultats d’une étude réalisée chez 6 sujets atteints de mucoviscidose et infectés par des souches de Pseudomonas aeruginosa (PA)multi-résistants pour lesquels un traitement par des phages administrés par voie inhalée a été réalisé. Les aérosols étaient administrés 2 fois par jours pendant 7 à 10 jours avec une bonne tolérance clinique et fonctionnelle. La mesure du VEMS montrait une amélioration du VEMS de 0 à 13%. Sur le plan microbiologique, la charge bactérienne de PA diminuait de 2,2 log avec des expectorations réduisaient leur purulence avec une diminution de la pyocyanine. Suite à ce traitement, le surnageant des PA mis en culture induisait moins de production des cytokines pro-inflammatoires IL-6 et IL-8 lorsqu’il était déposé sur des cultures de cellules épithéliales humaines (BEAS-2b) tout en induisant un recrutement plus important de neutrophiles dans les voies aériennes des souris qui y avaient été exposées 8 heures avant.

Ce travail montre le potentiel de ces phages pour prendre en charge les infections complexes à germes multi-résistants avec un mode d’administration intéressant pour cibler le site de l’infection dans le cadre de la mucoviscidose. L’extension de ce mode de traitement reste à ce jour complexe puisque nécessitant pour chaque patient d’identifier le cocktail de phages qui sera le plus approprié à ces propres souches, avec des contraintes de production qui doivent être respectées pour assurer la sécurité biologique du traitement.

Olivier Le Rouzic, Service de Pneumologie Immuno-Allergologie, CHU de Lille, Lille


D’après la communication de

G. Stanley – Bacteriophage decrease cystic fibrosis lung inflammation
Session D010 Role of microbiome and bacteriophages in pulmonary infections

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Dépistage préclinique de l’HTAP chez les porteurs d’une mutation BMPR2


Le gène le plus fréquemment impliqué dans les HTAP héritables est le gène BMPR2. Une mutation du gène BMPR2 est retrouvée dans >80% des formes familiales d’HTAP et dans environ 20% des formes sporadiques de la maladie. Leur transmission est autosomique dominante et la pénétrance est incomplète, ce qui signifie qu’on peut être porteur « sain » de la mutation sans jamais développer d’HTAP. L’étude prospective DELPHI 2 s’adressait aux apparentés d’un sujet ayant une HTAP héritable liée à BMPR2, eux-mêmes porteurs de la mutation mais asymptomatiques. L’objectif de cette étude était de dépister précocement l’HTAP au sein de cette population à risque.

Cinquante-cinq sujets apparentés, porteurs d’une mutation BMPR2 ont été inclus dans cette étude. Afin de dépister l’HTAP à un stade le plus précoce possible, l’étude prévoyait un programme de dépistage multimodal incluant notamment une échographie cardiaque, un test de marche de 6 minutes, des biomarqueurs (BNP ou NT-proBNP), des épreuves fonctionnelles respiratoires, une épreuve fonctionnelle à l’exercice, ainsi qu’un cathétérisme cardiaque droit en cas de suspicion d’HTAP. Ces examens étaient réalisés tous les ans. La durée de suivi était d’au moins 2 ans.

Au cours de cette étude, 5 sujets (soit 9,1% des sujets inclus) ont développé une HTAP. On a pu, pour la première fois, avoir une estimation de l’incidence de survenue de l’HTAP dans cette population avec un risque de 2,3% par an. Cette étude a confirmé la prédominance féminine de l’HTAP avec un risque augmenté chez les femmes : 3,5%/an contre 0,99%/an chez les hommes. Chez les patients asymptomatiques, les examens de dépistage habituels tels que l’échographie cardiaque ou les biomarqueurs (BNP ou NT-proBNP) ne permettaient pas de détecter des anomalies évocatrices d’HTAP. En revanche, une combinaison d’examens (électrocardiogramme, épreuves fonctionnelles respiratoires, épreuve fonctionnelle à l’exercice) permettait de dépister ces formes débutantes d’HTAP.

Cette étude est importante car elle démontre l’intérêt du conseil génétique des patients présentant une HTAP mais aussi de leur famille. Un tel programme de dépistage permet de diagnostiquer et donc de traiter précocement les HTAP héritables liées à une mutation BMPR2.

Athénaïs Boucly, Service de Pneumologie et de Soins Intensifs Thoraciques, Hôpital de Bicêtre, APHP,  Le Kremlin Bicêtre


D’après la communication de

D Montani, Screening for pulmonary arterial hypertension in adults carrying a BMPR2 mutation. Am J Respir Crit Care Med 2021; 203: A3619.
Session TP83 Hey Jude – Novel findings from omic and bioinformatic approaches in pulmonary hypertension

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Décubitus ventral vigile


Le décubitus ventral (DV) est maintenant une technique admise et recommandée en réanimation pour la prise en charge des patients porteurs d’un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA), intubés et ventilés 1. La pandémie que nous traversons actuellement, avec la saturation des services de réanimation qu’elle entraine, a permis de développer un certain nombre de stratégies visant à éviter le recours à la ventilation mécanique. Parmi elles, la mise en place du décubitus ventral (DV) chez des patients vigiles est parfois réalisée en réanimation voire en salle de médecine en complément des différentes techniques d’oxygénothérapie.

Quelques études sont présentées lors de ce congrès, dans 2 sessions de posters. Il s’agit le plus souvent de données rétrospectives, comme les études de Pajak A 2, Thakur S 3 et Meredith S 4qui ne retrouvent aucune différence en termes de recours à la ventilation mécanique ou de mortalité. Seul Thakur fait état d’une diminution de la mortalité dans un groupe de patients obèses en DV (11,11% versus 41,66%, p = 0,02) sans toutefois retrouver de différence de recours à la ventilation mécanique. Les limites de ces études, outre leur caractère rétrospectif, sont nombreuses : DV pratiqué de façon hétérogène (durée, fréquence quotidienne, DV souvent laissé à la discrétion du patient), degré d’hypoxémie non rapporté dans ces travaux à l’inclusion, techniques d’oxygénothérapie non décrites…

Awad MT 5 a effectué une méta-analyse portant sur 3 études publiées, soit 290 patients. Aucune différence significative n’a été démontrée à l’issue de cette méta-analyse, ni sur le taux d’intubation, ni sur la mortalité. Là encore, les pratiques en termes de DV étaient variables.

Chen F 6 a montré une étude prospective mono-centrique portant sur 25 patients présentant une pneumonie à Covid-19. Les patients se mettaient eux-mêmes sur le ventre pour un minimum de 30 minutes et 15 minutes en décubitus dorsal et latéral, avec un enregistrement continu de la SpO2, de la fréquence cardiaque, du CO2 expiré et de la fréquence respiratoire. Il faut souligner le caractère peu sévère de la pneumonie, les patients présentant des FiO2 au moment du DV de 0,32 (0,28 – 0,36). L’âge moyen des patients était de 64 ans, principalement des hommes (72%), en surpoids (index de masse corporelle 28,5 kg/m2 [25,7 – 31,4]). On constate une amélioration de la SpO2 significative en DV (94,7% versus 93,1%, p = 0,031), conjointement à une augmentation de la sensation d’inconfort plus marquée en DV et DL. Cette étude a l’avantage indéniable d’être prospective et de mesurer les paramètres d’oxygénation en continu. Néanmoins, elle ne s’adresse probablement pas aux patients chez qui la question est essentielle, à savoir des patients plus hypoxémiques (besoin de FiO2 > 50%), plus obèses. Elle ne permet pas non plus d’évaluer la persistance du bénéfice, ni les critères de réponse au DV. Aucune de ces études n’évalue la réponse en fonction du degré d’atteinte scannographique.

Li C 7 a rapporté lui aussi une étude rétrospective portant sur 54 patients hypoxémiques ayant bénéficié de DV vigile. Trente et un patients (57%) n’ont pas été intubés : il s’agissait des patients les moins hypoxémiques au départ, mais aussi ceux dont la fréquence respiratoire et le rapport SpO2/FiO2 s’amélioraient de façon significative après 4h en DV. Ces données tendraient à montrer que le bénéfice du DV pourrait se voir assez rapidement, après toutefois une durée de 4 heures. La tolérance de la technique n’est pas rapportée dans le travail présenté.

La pratique du DV vigile connaît donc un certain intérêt dans le contexte pandémique actuel. Nous sommes toutefois loin de pouvoir déterminer si cette technique a une légitimité quelconque sur un type de patient donné. De même, les pratiques sont tellement hétérogènes actuellement qu’aucune recommandation de durée, fréquence et résultats éventuels attendus ne peut être tirée. Des études plus poussées sont donc attendues, mais très probablement plus difficiles à mener que celles qui ont contribué à promouvoir le DV chez les sujets intubés.

Sandrine Pontier-Marchandise, Service de Pneumologie et unité des soins intensifs– Clinique des Voies Respiratoires, CHU Larrey, Toulouse


D’après les posters suivants :

Session TP 092 : Clinical advances in SARS CoV2 and Covid-19
Session TP 048 : Covid : ARDS clinical studies

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C’est confirmé ! Une réhabilitation respiratoire précoce réduit la mortalité après hospitalisation pour une exacerbation sévère de BPCO


Les conséquences délétères des exacerbations aiguës sévères chez les patients souffrant d’une bronchopneumopathie chronique obstructive (EABPCO) sont largement démontrées. Malgré la publication de recommandations formelles et une revue Cochrane récente globalement positive 1 , la place de la réhabilitation respiratoire (RR) précoce dans leur prise en charge reste un sujet de débat.

La RR soulage la dyspnée, améliore les performances physiques à l’exercice et améliore la qualité de vie, dans les suites d’une EABPCO ayant nécessité une hospitalisation, comme aux autres stades de la maladie. La réduction du risque de nouvelle EABPCO est également bien démontrée. Toutefois, la RR est confrontée à des limites spécifiques en post-EABPCO. L’adhésion au programme est particulièrement faible (dans les études colligées pour la revue Cochrane, à peine 10% des patients sortis d’hospitalisation pour une EABPCO complètent le programme de RR) pour des raisons variées, qui tiennent autant du patient que du médecin que du système de santé. Par ailleurs, il s’agit fréquemment de programmes de RR allégés, tenant compte de la dyspnée intense des patients. Cette hétérogénéité du contenu de la RR est susceptible d’expliquer les résultats mitigés sur la mortalité.

Les résultats de l’étude rétrospective de Lindenauer et al. 2 présentés à l’occasion d’une session « Clinical Year in Review » sont particulièrement encourageants.

Les données médicales issues du système Medicare de 197 376 patients de plus de 65 ans hospitalisés aux Etats-Unis pour EABPCO en 2014 ont été analysées (âge moyen : 76,9 ans, 58% de femmes). Parmi eux, 2721 patients, soit 1,5% des patients, ont bénéficié d’une RR dans les 90 jours qui ont suivi l’hospitalisation. Les patients qui bénéficient d’une RR sont globalement plus jeunes, plus fréquemment des hommes de race blanche et résident plus près d’un centre de RR. Leurs co-morbidités sont moins nombreuses. Il s’agit plus fréquemment de leur 1ère hospitalisation.

La mise en place d’une RR précoce est associée à une réduction significative de la mortalité à un an (hazard ratio : 0,63 [0,57 – 0,69], p < 0,001). La réduction de la mortalité est globalement similaire que la RR soit initiée dans le 1er, le 2ème ou le 3ème mois après l’EABPCO. Un effet dose-réponse est également mis en évidence : chaque semaine supplémentaire avec trois sessions additionnelles de RR réalisées dans les trois mois qui suivent l’EABPCO est associée à une réduction de la mortalité (hazard ratio :  0,91 [0,85 – 0,98], p = 0,01).  La mise en place d’une RR dans les 3 mois qui suivent une EABPCO est donc associée à une réduction significative de la mortalité. Ces résultats renforcent les recommandations actuelles en faveur de l’initiation d’une RR dans les 3 à 4 semaines qui suivent la sortie d’hospitalisation. On notera que dans cette étude rétrospective, comme dans les autres études de la littérature, le pourcentage de patients qui réalisent effectivement la RR est extrêmement faible. Ces données plaident pour trouver de nouvelles solutions innovantes, en alternative au programme classiques de RR, pour améliorer les capacités d’accueil en RR. Cet enjeu est d’autant plus important qu’il faut actuellement aménager les centres de RR pour accueillir les patients post-Covid 19 en sus des insuffisants respiratoires chroniques.

Marjolaine Georges, Service de Pneumologie et Soins Intensifs Respiratoires, CHU Dijon Bourgogne, Dijon


D’après la communication de P Camp : Pulmonary rehabilitation

Session D021 Clinical year in Review

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Réhabilitation respiratoire virtuelle : questions pratiques


La pandémie liée au Covid-19 a amplifié le développement de programmes de réhabilitation respiratoire (RR) au domicile. Si cette solution est explorée depuis plusieurs années, pour améliorer l’accès à la RR, l’ouverture de ce type de programme de RR est rapportée à foison lors de l’ATS 2021. Il s’agit de répondre rapidement à ces deux problématiques : poursuivre la RR des patients insuffisants respiratoires chroniques en réduisant le risque sanitaire au maximum et inclure en RR un grand nombre de patients souffrant de symptômes persistants post-Covid, et notamment de dyspnée, de fatigue et d’anxiété. Voici un florilège de travaux préliminaires qui évaluent différents aspects pratiques de ces modalités virtuelles de RR : quels outils d’évaluation et quels matériels ?

D’une part, certains travaux évaluent les outils de mesure de la tolérance à l’effort. Ces mesures sont indispensables : elles sont utilisées pour régler l’intensité de l’entrainement et s’assurer de la sécurité du patient, combinée avec une mesure de la SpO2 mais aussi pour évaluer l’efficacité du programme. Le test de marche des 6 minutes n’est pas réalisable au domicile pour des raisons évidentes. Les couloirs de 50 m ne sont pas si fréquents, les appartements parisiens ne démentiront pas… L’utilisation du test de lever de chaise (version 30 secondes, 1 ou 3 minutes) semble avoir un certain intérêt dans ce contexte. Il identifie de façon fiable les désaturations à l’effort chez 64 patients post-Covid normoxiques au repos 1. Après l’évaluation initiale, il peut même faire partie des exercices de RR 2.
Pour plus d’informations, une revue a été publiée par A. Holland sur le sujet 3.

D’autre part, le contenu des séances de RR est modifié pour répondre aux contraintes pratiques. Impossible d’utiliser le sacro-saint cyclo-ergomètre au domicile ! La majorité des programmes utilisent un équipement adapté : la marche pour le réentrainement à l’effort et différents exercices de gymnastique pour le renforcement des muscles locomoteurs. Ces derniers nécessitent une chaise et, pour augmenter progressivement la difficulté, les équipes utilisent soit des poids (parfois faits-maison avec canettes ou bouteilles d’eau), soit des élastiques (type Théra-Band®), soit un stepper 4 5. Ce type de RR avec un équipement minimal à domicile a été validé auparavant dans de rares essais randomisés contrôlés 6.

L’efficacité des programmes de RR à domicile fait face à de nombreux défis. Leur déploiement et leur pérennisation va nécessiter un important investissement des équipes de RR. 

Marjolaine Georges, Service de Pneumologie et Soins Intensifs Respiratoires, CHU Dijon Bourgogne, Dijon


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L’apport des Big Data pour l’évaluation des facteurs déterminant l’arrêt d’utilisation de la PPC à long terme


Bien que la pression positive continue (PPC) représente le principal traitement du syndrome d’apnées obstructives au cours du sommeil (SAOS), utilisée par 1,4 millions de patients en France, son efficacité à long terme reste conditionnée par la qualité de son observance. Par ailleurs, peu d’études se sont intéressées aux causes d’interruption de la PPC.

C’est pour répondre à cette problématique que JL Pepin a analysé des informations issues de la base de données de la Caisse Primaire d’Assurance Maladie de tous les nouveaux patients âgés de plus de 18 ans chez qui une PPC a été débutée au cours de la période de janvier 2015 à décembre 2016. Cette analyse a porté sur les données recueillies en termes de diagnostic du SAOS (ICD-10) et de comorbidités spécifiques (BPCO, diabète, hypertension artérielle (HTA)), ainsi que sur les informations concernant l’utilisation de la PPC.

480.000 patients ont été inclus dans cette étude (âge moyen 59.3±13.6 ans, 65.4% d’homme). L’hypertension, le diabète et la BPCO étaient présents chez 50,7 %, 24,4 % et 4,3 % des patients, respectivement. Les taux d’interruption de la PPC après 1, 2 et 3 ans étaient de 23,1%, 37,1% et 47,7%, respectivement. L’analyse multivariée a permis de retrouver un risque significativement plus élevé d’arrêt de la PPC chez la femme (OR : 1,09 ; IC95%  [1,08-1,10]). De même le risque était significativement plus élevé chez les sujets les plus jeunes (<41 ans) et les plus âgés (>80 ans). Enfin, alors que la présence d’une BPCO (OR : 1,26 ; IC95% [1,23-1,29]) et d’un diabète (OR : 1,10 ; IC95% [1,09-1,11]) étaient significativement associés à un risque plus élevé d’interruption du traitement, la présence d’une HTA représentait un facteur d’utilisation de la PPC sans interruption (OR : 0,95 ; IC95% [0,94-0,96]).

Ces résultats soulignent l’importance de la contribution des comorbidités dans la poursuite du traitement par PPC au long cours ainsi que le rôle prépondérant que pourrait avoir un meilleur phénotypage des patients associé au développement de soins personnalisés.

A partir du poster de JL PEPIN: Rate of CPAP therapy termination in different obstructive sleep apnoea patient phenotypes : Analysis of the french nationwide health claims database. Am J Resp Crit Care Med, 2021; 203: A4736

Jean-Claude Meurice, Service de Pneumologie, CHU de Poitiers, Poitiers


Session TP 133 : Stimulating new research on sleep apnea physiology and pathophysiology

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Réhabiliter en distanciel, un modèle à développer ?


Les différents confinements et la nécessité de maintenir une distanciation physique associés à la pandémie persistante ont fortement impacté l’activité de réhabilitation respiratoire. Afin de continuer à proposer cette prise en charge aux patients le nécessitant, les centres se sont adaptés et ont proposé la mise en place à différentes échelles et avec différents moyens d’une télé-réhabilitation respiratoire. Quels sont les retours à ce stade ?

Lors du premier symposium consacré aux opportunités et défis liés à la pandémie à SARS-CoV2 pour la réhabilitation respiratoire (RR), J. Alison a refait une synthèse des travaux antérieurs portant sur la télé-RR et la RR à domicile rappelant que ces modalités de prise en charge avaient démontré leur efficacité en termes d’amélioration des symptômes respiratoires, de la capacité à l’exercice, de l’anxiété/dépression et de la qualité de vie. Elle rappelait que les difficultés liées à ces modes de prise en charge étaient la nécessité de posséder et savoir gérer les technologies utilisées pour les échanges à distance, la mise à disposition de matériel pour le réentrainement au domicile et la nécessité d’utiliser des tests réalisables au domicile pour l’évaluation du patient notamment sa capacité à l’exercice, point qui a fait l’objet d’une revue récente 1.

Deux nouvelles expériences sont rapportées sous forme de posters. Une première par J. Nicholson (London, Canada), proposait le programme suivant : 2 séances hebdomadaires d’exercices en visioconférence avec une 3e séance hebdomadaire réalisée de façon indépendante, et des séances d’éducation thérapeutique par téléphone puis par vidéos. Les 34 patients (âge moyen 69,9 ±9,7 ans) ayant bénéficié de cette prise en charge comparés à 164 patients (âge moyen 69,93 ±9,2 ans) ayant suivi le programme antérieur en présentiel présentaient une amélioration comparable en termes de distance parcourue au test de marche de 6 minutes (+72 et +55 m), de score General Anxiety Disorder-7 (+3 et +2 points) et de score CAT (+3 et +4 points). La deuxième par S. Bhatt (Birmingham, USA), proposait 36 séances en visioconférence réparties sur 12 semaines. Les 32 patients atteints de BPCO (âge moyen 64,8 ±9 ans) étaient appariés à 96 autres patients atteints de BPCO (âge moyen 67 ±8,8 ans) ayant suivi antérieurement le programme en présentiel. Ils présentaient une amélioration cliniquement significative et comparable aux contrôles en termes de dyspnée évaluée par le San Diego Shortness of Breath Questionnaire et de distance parcourue au test de marche de 6 minutes.

Ces nouvelles données confirment la faisabilité et l’efficacité de ce mode de prise en charge qui va possiblement se développer suite à l’épidémie à SARS-CoV2. Des travaux futurs devront préciser les profils de patients pour lesquels cette modalité pourra être proposée dans des conditions raisonnables de sécurité à la place ou en complément d’une modalité de RR plus classique. Si ce mode de prise en charge permet de pallier les difficultés d’accès aux centres en « abolissant » les distances, il n’abolit toutefois pas le temps médical et paramédical nécessaire à son fonctionnement.

Olivier Le Rouzic, Service de Pneumologie Immuno-Allergologie, CHU de Lille, Lille


D’après les communications et posters de :

J. Alison – But it’s not all about Covid-19 survivors. How to deliver pulmonary rehabilitation in the era of the Covid-19 pandemic.
Session A001 Rehabilitation and Covid-19 opportunities and challenges
J. Nicholson – Pandemic transition of an established hospital-based pulmonary rehabilitation program. Am J Respir Crit Care Med 2021;203:A4127

Session TP101 Rehabilitation in the time of covid-19
S. Bhatt – Video telehealth pulmonary rehabilitation for COPD is associated with clinical improvement similar to center based pulmonary rehabilitation. Am J Respir Crit Care Med 2021;203:A4148
Session TP103 Advancing pulmonary rehabilitation: innovations in design and delivery

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Oxygénothérapie à haut débit : quelle place pour l’insuffisance respiratoire aiguë à Covid-19 ?


L’intérêt de l’oxygénothérapie à haut débit (OHD), notamment pour réduire le recours à la ventilation mécanique invasive, a pu être démontré pour la prise en charge de l’insuffisance respiratoire aiguë (IRA) hypoxémique sévère (PaO2/FiO2 ≤ 200 mmHg) du patient immunocompétent 1. L’utilisation de l’OHD dans l’IRA hypoxémique des patients Covid-19 a cependant été largement débattue, voire contre-indiquée, notamment à la phase initiale de la pandémie en raison des risques de contamination (aérosolisation)  virale des équipes soignantes et de retard à l’intubation. Finalement peu d’études ont, jusque-là, rapporté l’intérêt potentiel de l’OHD dans la prise en charge de l’IRA sévère à SARS-CoV-2.

Une première étude rétrospective observationnelle de cohorte a ainsi été menée, du 1er Février au 3 Mai 2020, à partir des bases de données électroniques des services de réanimation universitaires du Colorado. Cent quatre-vingt-treize patients atteints d’IRA hypoxémique à SARS-CoV-2 ont été inclus, parmi lesquels 41 (21,2%) ont bénéficié d’OHD contre 152 (78,8%) n’en ayant pas bénéficié (oxygénothérapie standard) à la prise en charge initiale. Les deux groupes étaient comparables à l’état de base en termes d’âge, de sexe, d’indice de masse corporelle (IMC), d’ethnie et de comorbidités.  Avec un odds-ratio de recours à l’intubation de 0,23 (intervalle de confiance (IC)95% 0,11-0,475) comparativement au groupe traitement standard (p < 0,001), après ajustement sur les facteurs confondants (âge, sexe, IMC, ethnie, tabac, alcool, recours au décubitus ventral, corticostéroïdes, Remdesivir), les patients du groupe OHD présentaient finalement 86,9% de chance de ne pas être intubés (p < 0,001). Par contre, si les patients du groupe OHD devaient être intubés, ils passaient en moyenne 5,1 jours de plus sous ventilation mécanique comparativement au groupe contrôle (p = 0,025). Le recours à l’OHD initiale permettait de réduire la mortalité de 39,4% après ajustement, mais de façon non significative comparativement au groupe non OHD.

Dans une 2ème étude rétrospective de cohorte monocentrique, menée du 10 Mars au 17 mai 2020, 174 patients Covid-19avec IRA hypoxémique ont été distingués en trois groupes : prise en charge par intubation non précédée d’OHD (n = 49, 28,1%), par OHD seule (n = 84, 48,2%) ou par OHD suivie d’intubation (n = 41, 23,5%). Les 3 groupes avaient des caractéristiques de base globalement comparables. Des corticoïdes étaient cependant administrés plus fréquemment chez les patients du groupes OHD seule (84,3%) et OHD suivie d’intubation (90,2%) comparativement au groupe intubation seule (56,5%). La mortalité globale a été de 25,7% et était retrouvée significativement différente entre les 3 groupes intubation (36,7%), OHD seule (6%) et OHD suivie d’intubation (43,9%) (p = 0,004).

L’ensemble de ces résultats, pour intéressants qu’ils soient, doivent tenir compte des biais méthodologiques inhérents au design des études actuelles (rétrospectives, monocentriques, bases de données, etc). Néanmoins, ils confortent l’intérêt suggéré de l’OHD dans cette indication par quelques études rétrospectives récentes, notamment pour diminuer le recours à l’intubation et donc la morbi-mortalité des patients Covid-19 avec IRA hypoxémique modérée à sévère. En respectant certaines précautions de protection, notamment le port du masque (type FFP2) pour les soignants, l’OHD devrait donc pouvoir être considérée comme la stratégie d’oxygénation de 1ère intention dans ces situations sous réserve, pour ne pas retarder indument l’intubation, qu’elle soit appliquée par une équipe expérimentée dans un milieu sécurisé.

Christophe Girault, Service de Réanimation Médicale, Hôpital Charles Nicolle, CHU-Hôpitaux de Rouen, Université de Rouen, Rouen


D’après les communications de :

S. Fakhri. Assessing the use of heated high flow nasal cannula in COVID-19. Am J Respir Crit Care Med 2021; 203: A2501.
Session TP048. Covid : ARDS clinical studies

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