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Qu’est-ce que vous prendrez ? Cigarette électronique et…

L’équipe de L.E. Crotty Alexander, qui explore la dangerosité de la cigarette électronique chez l’homme depuis plusieurs années, a consacré une méta-analyse à la triple consommation de cigarette électronique, de cigarette combustible classique et de cannabis.

Parmi plus de 50 000 participants, dont la majorité sont des adolescents et des jeunes adultes, 45% n’ont pas d’intoxication, approximativement 5% sont fumeurs, 15% vapotent régulièrement, 18% ont une double intoxication et 17% ont une triple intoxication.

Au sein des 44 articles sélectionnés, les auteurs ont analysé les thématiques communes. Cette méta-analyse confirme plusieurs sujets d’inquiétude :

1.La triple intoxication devient plus fréquente chez les adolescents et les jeunes adultes, ces dernières années.
2.La cigarette électronique est une porte d’entrée vers l’expérimentation mais aussi l’usage régulier de tabac combustible, de cannabis et d’autres substances illicites.
3.La triple intoxication pourrait avoir des effets toxiques cumulatifs ou synergiques sur le système respiratoire mais aussi sur la santé mentale (anxiété et dépression) comme sur le développement d’usage abusif de substances, en raison d’une exposition croissante à des composés chimiques toxiques.

Ces résultats soulignent la nécessité de politiques de prévention mais aussi de législations strictes pour protéger notamment les adolescents et les jeunes adultes, qui sont particulièrement sensibles à la pression sociale et à la publicité.

D’après le poster d’A. Singh et al. Triple threat: examining the concurrent use of E-cigarettes, combustible cigarettes, and marijuana and the public health implications. Am J Respir Crit Care Med 2024;209:A7111 (session D26)

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Dis-moi comment tu dors…

Le maintien de la PPC dans le temps est un élément crucial de la prise en charge des patients atteints de SAHOS. Certains éléments sont maintenant bien connus pour améliorer cet élément, néanmoins, 47,7% des patients appareillés en France arrêteraient le traitement dans les 3 ans qui suivent sa prescription.

L’équipe de Grenoble a rapporté une étude sur les éléments cliniques et polysomnographiques au diagnostic associés à l’arrêt de la PPC. Les patients décédés, ayant bénéficié d’une chirurgie bariatrique ou dont le traitement a été modifié pour une VNI ou une ASV ont été exclus.

Mille cent trente-six patients ont été inclus. Le pourcentage de patients ayant arrêté le traitement à 1, 3 et 5 ans était respectivement de 20,51, 30,37 et 32,57. L’analyse a été faite sur 637 patients ayant des données complètes à l’inclusion. Parmi eux, 453 patients (71%) gardent la PPC à 5 ans, 184 (29%) l’ont arrêtée. En analyse multivariée, le sexe masculin (HR 0,7 [0,51 ;0,95] p=0,02) de même que la sévérité initiale du syndrome d’apnées du sommeil : IAH plus élevé (0,99 [0,98 ;0,99], p<0,01), index de désaturations plus élevé (0,99 [0,98 ;1] p<0,01) et SpO2 nocturne moyenne basse (1,19 [1,1 ;1,29] p<0,01) et SpO2 nocturne minimale basse (1,05 [1,02 ;1,08] p<0,01) semblent jouer un rôle « protecteur » (moins d’arrêts de traitement) alors que la nycturie (1,4 [1,02 ;1,92] p=0,04) et la mauvaise qualité du sommeil évaluée par le temps total de sommeil (0,98 [0,96 ;1] p=0,03) et l’index d’éveils (1,03 [1,03 ;1,05] p=0,01), ont l’effet inverse.

La qualité et la quantité de sommeil au diagnostic sont donc des éléments cruciaux à prendre en compte chez les patients que nous appareillons. Une évaluation spécifique de ces éléments et une prise en charge sont donc nécessaires au moins par l’interrogatoire. L’éducation thérapeutique et un suivi plus attentif peuvent donc être proposés à ces patients spécifiquement.

D’après R Tamisier (A109). Impact of obstructive sleep apnea (OSA) clinical and polysomnographic phenotypic traits on continuous positive airway pressure (CPAP) termination rates : a 5-year follow-up study. Am J Respir Crit Care Med 2024 ; 209 : A6864.

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Peut-on faire mieux que le Rox index pour prédire l’échec de l’OHD au cours de l’IRA hypoxémique ?

L’oxygénothérapie nasale à haut débit (OHD) s’est maintenant imposée dans la prise en charge de l’insuffisance respiratoire aiguë (IRA) hypoxémique. Néanmoins, il apparait pertinent de pouvoir prédire le risque d’échec lors de l’initiation de cette stratégie respiratoire non invasive. Le ROX index (« Respiratory/OXygenation index » : rapport entre SpO2/FiO2 et la fréquence respiratoire), facilement mesurable au lit du patient, a ainsi été proposé pour prédire le risque d’intubation au cours de l’IRA hypoxémique sous OHD 1. Cependant, sa performance peut s’avérer variable selon le moment de sa mesure et le contexte clinique sous-jacent 2

L’étude a donc cherché à développer et à valider un modèle automatisé (algorithme) pour prédire l’échec de l’OHD à partir de dossiers médicaux électroniques de patients adultes ayant bénéficié d’OHD dans sept hôpitaux et en utilisant les données médicales (72 variables) au moment de l’initiation de l’OHD de quatre systèmes de soins informatisés différents. Un modèle dit de « gradient boosting » (GBM) a donc été utilisé pour prédire la survenue du critère principal de jugement (CPJ) composite, soit intubation ou décès, dans les 24h suivant l’initiation de l’OHD. Le modèle a été validé sur trois systèmes de soins informatisés et évalué ensuite sur un quatrième, en le comparant au ROX index (1) par analyse de l’aire sous la courbe (AUC) aux différents « timing » d’évaluation. Parmi les 11 619 patients inclus, 6 787 l’ont été dans la cohorte de validation et 4 832 dans la cohorte de test. Le CPJ est survenu chez 1 410/11 619 patients (12,1%). Lors de la validation externe, l’AUC du modèle GBM pour prédire l’échec de l’OHD à H24 était de 0,760, significativement plus élevé que celui du ROX index (0,696 ; p<0,01) (cf. figure). Cette meilleure performance du modèle GBM par rapport au ROX index était maintenue aux différents temps avant la survenue de l’évènement (intubation ou décès), avec une AUC atteignant 0,848, 0,808 et 0,785 respectivement à 2, 6 et 12 heures avant l’échec (cf. figure) (p = 0,04, p = 0,01 et p<0,01 comparativement au ROX index). Les cinq variables les plus pertinentes du modèle GBM étaient les suivantes : fréquence respiratoire, fraction inspirée en oxygène (FiO2), numération plaquettaire, taux de bicarbonates et de lactates plasmatiques.

Le modèle algorithmique développé et validé dans cette étude apparait donc plus performant que le simple ROX index pour prédire l’échec de l’OHD dans l’IRA hypoxémique. Ce modèle, potentiellement utile pour la prise de décision clinique, nécessitera cependant d’être validé cliniquement et prospectivement, et, d’après les variables les plus performantes, d’être notamment évalué dans différentes étiologies d’IRA hypoxémique.

Figure : Prédiction de l’échec de l’OHD (AUC) à différents temps avant survenue de l’évènement (intubation ou décès) selon le ROX index ou le « Gradient Boosting Model »

D’après la communication de Temte B., et al. Development and external validation of a machine learning model to predict high flow nasal cannula failure. Am J Respir Crit Care Med 2024; 209: A6922. Session D14.

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Fibrose pulmonaire familiale : Soyons vigilants à la moindre anomalie scannographique des apparentés !

Les apparentés des patients atteints de fibrose pulmonaire familiale (FPF) ont un risque accru de 6 à 100 fois de développer une FPF. Les ILA pour « interstitial lung abnormalities » sont définies par des anomalies interstitielles présentes dans plus de 5 % d’une zone pulmonaire selon les critères de la Fleischner. La présence d’ILA chez les apparentés au premier degré de patients avec FPF est un risque de progression vers la fibrose.
M.L. Salisbury nous a présenté son travail cherchant à étudier le pronostic des ILA dont l’étendue des lésions n’atteint pas 5% chez les apparentés asymptomatiques de patients avec FPF.

De 2008 à 2023, 264 participants apparentés avec une HRCT initiale ont réalisé une HRCT de suivi ou ont développé une FPF clinique.

À l’inclusion, les ILA étaient absentes chez 202 (77 %) participants et présentes chez 62 participants (23 %) dont 49/62 (80%) n’atteignait pas le seuil de 5% de la “Fleischner” et 13/62 (20 %) atteignant ce seuil.

Au cours d’un suivi moyen de 6,4 (± 2,9) ans, 27/202 (13 %) de ceux sans ILA, 33/49 (67 %) des ILA non “Fleischner”, et 10/13 (77 %) des ILA “Fleischner” observées à l’inscription avaient une progression de leur imagerie.

La présence d’ILA (“Fleischner” et non « Fleischner ») était fortement associée à la progression (aOR 12,08, 95 % IC 6,00-24,34, p<0,0001) tout comme la présence de réticulation unilatérale (4,54 ; 95 % IC 1,38-14,95 ; p=0,01) ou bilatérale (16,32 ; 95 % IC 7,32-36,39 ; p<0,0001), de verre dépoli bilatéral, de bronchectasies de traction et de rayon de miel. Les lésions apicales bilatérales étaient de façon originale aussi associées à la progression (4,22 ; 95 % IC 1,67-10,64 ; p=0,002). En revanche les lésions linéaires en bande ne l’étaient pas.

Au total, les apparentés asymptomatiques des patients atteints de fibrose pulmonaire familiale (FPF) présentant des anomalies interstitielles même peu étendues (<5% d’une zone pulmonaire) ont aussi un risque de progression proche de celui des patients ayant un seuil >5%. Les lésions des coiffes apicales ne sont pas considérées comme des ILA mais ne doivent pas être ignorées dans le suivi des patients.

D’après la communication de M.L. Salisbury. Interstitial lung abnormalities below fleischner-defined thresholds are strongly associated with progression in persons at risk for familial pulmonary fibrosis. Am J Respir Crit Care Med 2024;209:A7213 (Session D92)

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HTAP et méthamphétamine, l’arrêt de la drogue change-t-il le cours de la maladie ?

L’usage de méthamphétamines sous diverses formes aux États-Unis est à l’origine de nombreux cas d’hypertension artérielle pulmonaire (HTAP). La consommation de méthamphétamine entraine la libération de sérotonine dans le cerveau et la circulation systémique. L’activation excessive des récepteurs de la sérotonine au niveau des vaisseaux pulmonaires est à l’origine du remodelage vasculaire favorisant l’HTAP. Une étude s’est intéressée au devenir des HTAP associée à la méthamphétamine en fonction de la poursuite ou non de la consommation de la drogue après le diagnostic de l’HTAP.

L’analyse a porté sur 55 sujets atteints HTAP associée à la méthamphétamine. Parmi eux, 25 (45,5 %) ont arrêté la méthamphétamine et 30 (54,5 %) ont poursuivi leur consommation. L’abstinence était définie comme l’absence de consommation déclarée par le patient et l’absence de résultat positif au dépistage urinaire pendant l’intervalle de suivi. Un dépistage urinaire était réalisé à chaque consultation de suivi. La sévérité initiale de l’HTAP était similaire entre les 2 groupes, ainsi que la prise en charge initiale. Vingt et un (91%) patients devenus abstinents et 20 (84%) consommateurs réguliers étaient traités par thérapie combinée pour l’HTAP. La durée médiane de suivi était de 29,3 [9,9-47,7] mois. Le profil hémodynamique au cours du suivi, évalué par cathétérisme cardiaque droit et échographie cardiaque, était similaire entre les 2 groupes. Enfin, la mortalité était similaire entre les 2 groupes : 3/25 (12 %) chez les abstinents contre 3/30 (10 %) chez les consommateurs réguliers, p=0.813.

Cette étude montre que l’arrêt de la consommation de méthamphétamine chez les patients présentant une HTAP associée à cette drogue n’est pas associé à une amélioration hémodynamique ni à une amélioration de la survie. Des observations similaires avaient été faites dans l’HTAP associée aux anorexigènes (ayant un mécanisme d’action proche) : l’arrêt du médicament ne modifiait pas l’évolution de la maladie.

D’après la communication de Uhland C, from highs to lows: impact of continued methamphetamine usage on pulmonary arterial hypertension, Am J Respir Crit Care Med 2024;209:A7364 (Session D105)

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Aspergillus et dilatation des bronches : encore une liaison dangereuse !?!

Aspergillus est un champignon filamenteux de l’environnement colonisant fréquemment les bronches de nos patients atteints de dilatation des bronches (DDB). L’aspergillose broncho-pulmonaire allergique (ABPA) est une cause de DDB et peut également survenir sur une DDB préexistante. La significativité clinique d’entités définies comme ABPA, sensibilisation à Aspergillus (SA) ou bronchite aspergillaire (BA) dans le contexte d’une DDB reste incertaine, notamment du fait de critères diagnostiques régulièrement modifiés, probablement encore imparfaits, et de la réalisation non systématique des tests diagnostiques à disposition. Des données issues du registre européen EMBARC de patients atteints de DDB d’origine non mucoviscidosique ont été rapportées lors de ce congrès et viennent nous éclairer sur ce sujet.

Cette étude visait à étudier l’incidence de réalisation de tests diagnostiques aspergillaires chez les patients inclus dans le registre EMBARC, la signification clinique de leurs résultats et des entités clinico-biologiques pouvant en découler (ABPA, SA, BA), et à comparer les critères diagnostiques d’ABPA existants. Les données des patients inscrits dans ce registre entre 2015 et 2022 et ayant eu des tests diagnostiques aspergillaires (réaction cutanée aux antigènes d’Aspergillus, IgE totales, IgE spécifiques anti-aspergillaires, IgG anti-aspergillaires) ont été exploitées. L’ABPA était définie à l’aide des critères ISHAM modifiés (2021), avec une analyse de sensibilité réalisée à l’aide des critères ISHAM-ABPA (2013). Un taux élevé d’IgE spécifiques anti-aspergillaires ou un test cutané positif sans diagnostic d’ABPA étaient considérés comme une sensibilisation aspergillaire (AS), la présence d’IgG spécifiques anti-aspergillaires élevées sans ABPA définissant les cas de bronchite aspergillaire (AB), avec ou sans AS. Les patients ne répondant à aucune de ces définitions et sans élévation des éosinophiles sanguins formaient le groupe témoin. Les exacerbations et hospitalisations survenues au cours du suivi annuel ont été analysées à l’aide d’une modélisation binomiale négative et une analyse de survie a été réalisée à l’aide d’un modèle de régression à risques proportionnels de Cox avec ajustement sur les facteurs de confusion potentiels (âge, sexe, origine géographique, IMC, diabète, Pseudomonas et score de GOLD).

Parmi 18 792 patients inclus dans le registre EMBARC, 9 953 (53%) ont eu des tests sérologiques pour le diagnostic d’ABPA avec des taux très variables (0% à 94%) à travers l’Europe (entre 51 et 75% en France). Parmi les personnes testées et selon les critères ISHAM Modifiés (2021), 608 (6,1%) avaient une ABPA, 570 (5,7%) avaient une SA, 806 (8,1%) avaient des IgG spécifiques anti-aspergillaires élevées, 184 (1,8%) présentaient une AS et des IgG spécifiques anti-aspergillaires élevées et 619 (6,2%) avaient un nombre élevé d’éosinophiles sans « maladie » liée à Aspergillus. En utilisant les critères originaux de l’ISHAM (2013), 78 diagnostics d’ABPA n’étaient pas diagnostiqués. Le principal résultat de cette étude était que les patients appartenant aux diverses entités « aspergillaires » sus définies, représentant 28% de l’ensemble des patients testés, présentaient une sévérité clinique (score BSI) et fonctionnelle (VEMS) accrue. Concernant le suivi à long terme, l’augmentation des IgG spécifiques anti-aspergillaires constituait un facteur de risque d’exacerbations (RR 1,19, IC95% 1,05-1,35, p=0,008) et d’hospitalisations (RR 1,66, IC95% 1,37-1,99, p<0,001), avec une tendance à une mortalité accrue chez les personnes atteintes d’ABPA (HR 1,40, IC95% 0,99-1,99, p=0,057). L’effet des corticostéroïdes inhalés semblait modeste, leur utilisation étant essentiellement associée à un moindre risque d’hospitalisation en cas de SA (RR 0,70, IC95% 0,54-0,90, p=0,006 vs RR 0,91, IC95% 0,54-1,52, p=0,71) ou d’augmentation isolée des IgG spécifiques anti-aspergillaires (RR 1,32, IC95% 1,04-1,68, p=0,02 vs RR 2,26, IC95% 1,68-3,02, p<0,001), sans effet significatif sur la mortalité, hormis en cas d’ABPA (HR 1,49 IC95% 1,02-2,19, p=0.040). Il reste donc à élucider si l’existence de stigmates de sensibilisation aspergillaire, plus ou moins marquée, est un simple témoin de la sévérité ou un réel facteur aggravant de la dilatation des bronches sous jacente.

D’après la communication de J. Pollock, Aspergillus testing and disease outcomes in bronchiectasis : data from the EMBARC registry. Session C27. Am J Respir Crit Care Med 2024;209:A5173.

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Régénération alvéolaire par greffe autologue de cellules progénitrices : une affaire à suivre …

En l’absence de traitement curatif de la bronchopneumopathie chronique obstructive (BPCO) notamment lorsqu’elle est associée à une destruction des parois alvéolaires, l’emphysème, l’évolution de la pathologie est marquée par un déclin de la diffusion du monoxyde de carbone (DLCO) et une majoration progressive des symptômes respiratoires. La régénération alvéolaire par greffe autologue de cellules progénitrices p63+ pourrait être une piste intéressante

Les cellules progénitrices p63+, mises en évidence en 2011 par Kumar et al 1dans un modèle murin d’infection grippale, sont retrouvées au niveau de l’épithélium bronchiolaire distal et peuvent contribuer à la réparation alvéolaire après une agression. Le déficit en cellule progénitrice p63+ fonctionnelle est étroitement lié à la réduction du volume expiré maximal par seconde (VEMS) et de la DLCO chez les patients atteints de BPCO. Cependant, des cellules progénitrices p63+ saines peuvent être retrouvées dans les échantillons bronchoscopiques des patients atteints de BPCO de stade IV (2.

Une étude chinoise de phase 1 3, s’est intéressée à la faisabilité de la greffe autologue de cellules progénitrices p63+ chez des patients atteints de BPCO de stade GOLD II à IV, âgés de 40 à 75 ans ayant une DLCO inférieure à 80%. Vingt patients ont été inclus entre juillet 2018 et décembre 2022 puis répartis dans deux groupes : le groupe contrôle avec soins standards habituels (n=3 patients) et le groupe intervention (n=17 patients). Dans ce dernier, les patients avaient une fibroscopie bronchique avec un brossage au niveau des bronches segmentaires et sous segmentaires afin de recueillir des cellules progénitrices p63+ à partir de la couche basale de l’épithélium. Les cultivées pendant 3 à 5 semaines puis greffées lors d’une nouvelle fibroscopie. Deux millilitres de suspension cellulaire contenant 0,7 à 5,2 x 10^6 cellules par kilogramme de poids corporel étaient déposées dans 20 segments pulmonaires. Les patients devaient maintenir une position verticale et éviter de tousser dans les 2 heures suivant la procédure. L’absence de potentiel tumorigène des cellules greffées a été confirmée par une analyse caryotypique.

Aucun événement indésirable grave n’a été observé dans les deux groupes. Une amélioration significative de la DLCO a été mise en évidence dans le groupe intervention à 24 semaines (+18,2% versus -17,4%, p= 0,008) ainsi qu’une amélioration significative de plus de 30 mètres de la distance de marche en 6 minutes (66,7% des patients du groupe intervention versus aucun dans le groupe contrôle, p=0,036). Des analyses scanographiques pré et post greffe suggèrent une légère amélioration des lésions emphysémateuses. Ainsi, dans cette étude de phase 1, la greffe autologue de cellules progénitrices p63+ semble être sûre et bien tolérée. Un essai de phase 2 est actuellement en cours (CXCL2100091) dans la BPCO ainsi qu’un essai de phase I/II dans la fibrose pulmonaire idiopathique.

D’après le poster de Zhang T et al. Autologous transplantation of P63+ lung progenitor cells for chronic obstructive pulmonary disease therapy: an open-label, controlled, first-in-human trial. Am J Respir Crit Care Med 2024;209:A1221. (session A27)

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Asthme sévère : quel est le profil des patients qui meurent encore malgré les biothérapies ?

La cohorte observationnelle américaine CHRONICLE regroupant des patients adultes atteints d’asthme sévère pour la plupart traités par biothérapies ou corticoïdes oraux constitue une base de données particulièrement intéressante pour étudier le devenir de ces patients. Plusieurs présentations émanant de cette cohorte ont été effectuées lors de ce congrès. L’une a particulièrement attiré notre attention puisqu’elle concernait la mortalité des patients inclus entre février 2018 et novembre 2023.

Les données présentées ont récemment été actualisées par rapport au résumé soumis par les auteurs. Ainsi, ils dénombrent désormais 3886 patients inclus, dont l’âge moyen est de 54,6 ans (69% de femmes). Parmi eux, 54% sont suivis par un pneumologue, 37% par un allergologue et 9% par les deux. On dénombre 89 décès, soit 2,3% de la cohorte. L’incidence de mortalité globale est de 8,7 pour 1000 personnes-années (IC 95% : 7,0-8,7). Les décès liés au COVID-19 étaient rares (1,1 pour 1000 personnes-années), de même que ceux directement liés à l’asthme (0,2 pour 1000 personnes-années).

De manière intéressante et assez logique, la mortalité était surtout élevée chez les 470 patients recevant une corticothérapie orale au long cours, avec ou sans biothérapie (22,3 pour 1000 personnes-années). Par comparaison, elle n’était que de 8,6 pour 1000 personnes-années (IC 95% : 6,5-11,2) chez les 2549 patients traités par biothérapie, et même de 7,0 pour 1000 personnes-années (IC 95% : 5,0-9,5) chez les 2242 patients sous biothérapie mais ne recevant pas de corticoïdes oraux au long cours. Les décès de cause cardiovasculaire étaient les plus nombreux : 1,9 pour 1000 personnes-années dans la cohorte globale, 1,4 pour 1000 personnes-années pour les patients sous biothérapie sans corticoïdes oraux et 6,1 pour 1000 personnes-années pour ceux traités à la fois par biothérapie et par corticoïdes oraux. Dans l’asthme sévère, il semble donc particulièrement crucial d’arriver à sevrer les patients de toute corticothérapie orale si l’on veut réduire le risque de décès. Il sera intéressant de voir si ces données sont confirmées ou non dans les années à venir par le registre français RAMSES…

D’après la communication de N.L. Lugogo et al. Mortality among US adults with severe asthma is increased with maintenance systemic corticosteroid treatment: results from the CHRONICLE study. Am J Respir Crit Care Med 2024;209:A5250.

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Mauvais sommeil et rejet chronique après la transplantation pulmonaire : l’œuf ou la poule ?

Le parcours des transplantés pulmonaires est émaillé de nombreux écueils et complications ; pour optimiser les résultats de la greffe, le suivi clinique doit aborder toutes les facettes de la santé des patients. Les études concernant les pathologies du sommeil après une transplantation pulmonaire se sont surtout focalisées sur leur prévalence, mais peu de données sont disponibles quant à leur association aux résultats de la greffe, que ce soit sur le plan de la qualité de vie ou pour des critères plus objectifs comme la survenue d’un rejet ou de décès.

J.P. Singer (UCSF, San Francisco, Etats-Unis) a présenté les résultats d’une étude originale menée dans son centre, avec pour objectifs de décrire les facteurs de risque associés à un sommeil de mauvaise qualité en périopératoire, et d’évaluer l’association entre sommeil de mauvaise qualité et divers critères de suivi post-greffe.

Cette étude a été construite en s’appuyant sur la cohorte prospective longitudinale “Breathe Again”, établie à San Francisco. Cette cohorte de transplantés pulmonaires a pour objectif de suivre les patients avant et après la transplantation, à intervalle réguliers, sur des paramètres de qualité de vie, de fragilité et, depuis plus récemment, de qualité de sommeil par le biais du questionnaire Medical Outcomes Study (MOS) Sleep Problems Index (SPI) et d’un score d’insomnie.

Parmi les 256 patients de la cohorte, 141 avec des données complètes de MOS-SPI ont été inclus. La durée de suivi médiane était de 1.5 ans post-transplantation. Les auteurs ont pu montrer que, en période périopératoire, les patients avec une durée de séjour plus longue avaient une moins bonne qualité de sommeil et davantage d’insomnie après le retour à domicile. Au cours du suivi, la mauvaise qualité de sommeil était associée de manière significative à une détérioration de la plupart des indicateurs de succès clinique post-transplantation : diminution de la qualité de vie, majoration des scores de dépression, diminution des capacités à l’effort, augmentation des scores de fragilité, et surtout augmentation de la prévalence du rejet chronique (CLAD), ce qui est d’autant plus significatif étant donné la durée de suivi relativement courte des patients et le faible effectif.

L’association entre sommeil perturbé et CLAD est intéressante, mais pose la question du mécanisme sous-jacent. L’impact d’un sommeil de mauvaise qualité sur la thymie et l’anxiété n’est plus à démontrer, et la dépression peut entraîner une moindre adhérence aux traitements immunosuppresseurs et autres contraintes associées à la transplantation. Un sommeil pathologique pourrait également causer une dysrégulation de certains processus immunitaires. A l’opposé, il est possible que le rejet chronique entraîne des troubles du sommeil… davantage de données longitudinales et objectives (polygraphie ventilatoire) seraient nécessaires pour faire la lumière sur ces interactions.

Ces résultats devraient nous inciter à être plus vigilant vis-à-vis de la qualité de vie – et de sommeil – de nos patients après la greffe, et à penser à recourir à la polygraphie ventilatoire, bien que cet examen ne fasse pas partie du bilan systématique pré-transplantation ni du suivi dans la plupart des centres.

D’après le poster de J.P. Singer, et al. Disturbed sleep is associated with worse patient-reported outcomes and chronic lung allograft dysfunction after lung transplantation. Am J Respir Crit Care Med 2024 (session C93)

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De nouveaux outils de prédiction de l’observance à la Pression Positive Continue (PPC)

Alors que la PPC reste le premier traitement du syndrome d’apnées/hypopnées obstructives du sommeil (SAHOS), son efficacité reste conditionnée par l’observance des patients, dont la détermination de facteurs prédictifs fiables permettrait d’orienter au mieux la qualité de la prise en charge et de l’accompagnement initiale des patients. Deux études françaises multicentriques se sont intéressées à ce sujet, apportant une validation d’outils nouveaux et efficaces.

La première étude 1 a cherché à valider en « vraie vie » l’intérêt d’évaluer le seuil d’éveil des patients au cours de l’enregistrement polysomnographique initial, tel que proposé antérieurement en population sélectionnée. L’observance de 2157 patients présentant un SAHOS sévère a été relevée après 1 an d’utilisation de la PPC. L’abaissement du seuil d’éveil était défini soit par un temps passé à un niveau de SaO2 < 90% (T90%) inférieur à 3.7%, soit par une fraction d’hypopnées/apnées > 77% lors de l’enregistrement initial. Une observance < 4 h/nuit ou un arrêt de la PPC ont été retrouvés chez 627 patients (29%), pour qui T90% était significativement plus faible que chez les patients observants (p<0.001), et la fraction d’hypopnées/apnées significativement plus élevée (p = 0.0001). De même, après ajustement pour les facteurs confondants, les patients avec un seuil d’éveil abaissé présentaient un risque accru de mauvaise observance à la PPC (95% CI : 1.64 (1.20 – 2.27), (p=0.0002)) ou d’arrêt de la PPC : RR: 1.52 (1.18 – 1.97) (p=0.001).

Dans une deuxième étude prospective multicentrique 2, c’est l’utilisation de données originales (statut économique, éducation sanitaire, efficacité personnelle et précarité) regroupées dans un score (SEMSA-15), évaluées lors du diagnostic initial de SAHOS chez 293 patients, qui a été évalué comme facteur prédictif vis-à-vis de l’observance à la PPC à 15jours, 90 jours et à 1 an. Sur le plan statistique, une analyse de trajectoire latente a été réalisée pour évaluer l’adhérence à la PPC, et une analyse logistique ordinale multivariée a été utilisée pour identifier les facteurs associés à cette trajectoire. Trois types de trajectoire d’adhérence à la PPC ont été mises en évidence (arrêt de la PPC, adhérence intermédiaire, et haut niveau d’adhérence). Après ajustement pour l’âge, le sexe, l’index de masse corporelle (IMC), l’index d’apnées/hypopnées, et les comorbidités, le score SEMSA-15 et l’IMC ont été retrouvés significativement associés à la trajectoire d’adhérence à la PPC (odds-Ratio: respectivement 3.17 (1.88; 5.35), p<0.001 et 1.05 (1.00; 1.10), p=0.04).

Ces 2 études ont l’intérêt d’apporter de nouveaux outils pouvant être utilisés en pratique courante pour prédire la qualité de l’observance à la PPC, et orienter l’importance des moyens à mettre en place initialement pour accompagner les patients à risque d’utilisation insuffisante ou d’arrêt de la PPC au long cours.

D’après les communications de :

De nouveaux outils de prédiction de l’observance à la Pression Positive Continue (PPC) Lire la suite »

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