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Syndrome de détresse respiratoire aiguë : vers une nouvelle définition mondiale !

Plusieurs arguments ont récemment conduit à réviser  la définition du syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) dite « de Berlin » de 2012 utilisée jusqu’à maintenant: (1) le développement de l’oxygénothérapie à haut débit (OHD) pour la prise en charge de l’insuffisance respiratoire aiguë (IRA) hypoxémique alors que ces patients ne répondent pas à la définition de Berlin; (2) le rapport SpO2/FiO2, évalué par simple oxymétrie de pouls et récemment validé comme critère de SDRA (études d’observationnelles et essais cliniques); (3) la nécessité de réévaluer l’exigence d’avoir des opacités bilatérales versus unilatérales à l’imagerie thoracique, et de tenir compte de l’échographie thoracique comme méthode diagnostique supplémentaire; (4) l’application de la définition de Berlin qui peut s’avérer difficile dans les pays aux ressources sanitaires limitées, les modalités diagnostiques (radiographie thoracique, analyse des gaz du sang artériels) et thérapeutiques (ventilation en pression positive) n’étant pas toujours disponibles.

La réflexion a donc fait l’objet d’un consensus ayant réuni 32 experts internationaux en soins critiques et SDRA au cours de 6 réunions virtuelles (juin 2021-mars 2022), aidés de l’avis de plusieurs membres de sociétés savantes internationales en soins critiques (juin-septembre 2022). Outre les arguments précédents, cette nouvelle définition devait tenir compte de la diversité potentielle du SDRA à la fois clinique, géographique, raciale, sexuelle et ethnique.  Les 4 principales nouvelles recommandations sont résumées dans le tableau ci-dessous et ont été approuvées par l’ensemble des membres de la conférence. 

Cette nouvelle définition mondiale du SDRA s’appuie donc sur celle de Berlin. Elle s’en distingue cependant par les éléments suivants : (1) les patients souffrant d’une IRA nécessitant un débit d’OHD ≥30 L/mn vont représenter une nouvelle catégorie de SDRA non intubé; (2) l’oxymétrie de pouls sera suffisante (à la place des gaz du sang artériels) pour porter le diagnostic de SDRA (rapport SpO2/FiO2); (3) les opacités bilatérales restent un critère obligatoire mais l’échographie thoracique devient une technique d’imagerie acceptable pour leur diagnostic; (4) plusieurs critères ne seront plus exigibles (niveau de pression expiratoire positive, débit d’oxygène, dispositifs spécifiques d’assistance respiratoire) chez les patients relevant d’organisations sanitaires aux ressources limitées, lesquels pourront dorénavant être inclus dans les études épidémiologiques et les essais cliniques sur le SDRA . Cette nouvelle définition élargit donc celle de Berlin tout en étant plus pragmatique. Elle devra par la suite faire l’objet d’études prospectives pour déterminer au mieux sa faisabilité, sa fiabilité et sa validité pronostique, ainsi que sa place selon les différents phénotypes de SDRA.

Christophe Girault, Service de Médecine Intensive et Réanimation, Hôpital Charles Nicolle, CHU-Hôpitaux de Rouen, 37 boulevard Gambetta & UR3830, Institut de Recherche et d’Innovation Biomédicale (IRIB), Faculté de Médecine et de Pharmacie, Université de Rouen, Rouen 

D’après la communication de Matthay MA, et al.  A new global definition of acute respiratory distress syndrome. Am J Respir Crit Care Med 2023; 207: A6229 (Session D16).

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Diaphragme : le grand oublié du COVID long

La physiopathologie de la persistance d’une dyspnée sévère à l’exercice plusieurs mois après une infection à SARS-CoV2 reste mal connue. En dehors des séquelles fonctionnelles respiratoires, qui touchent les patients ayant bénéficié d’une ventilation mécanique prolongée pour un syndrome de détresse respiratoire aigüe, les deux principaux mécanismes qui sont évoqués chez les patients ayant eu une infection COVID-19 modérée, gérée en ambulatoire, sont le syndrome d’hyperventilation et la respiration dysfonctionnelle. Ces deux anomalies fonctionnelles respiratoires peuvent être améliorées par la réadaptation respiratoire (RR).

En complément, Rainer Gloeckl, (Allemagne), a évoqué le rôle potentiel d’une faiblesse diaphragmatique. Cinquante patients (14 femmes, âgées de 58±12 ans) ont bénéficié 15 mois après une hospitalisation pour COVID-19 (50% des patients sous ventilation mécanique) d’une évaluation extensive de la fonction diaphragmatique (pression inspiratoire maximale, pression trans-diaphragmatique, échographie diaphragmatique) 1. Ils sont comparés à 9 contrôles sains. Alors que les fonctions respiratoires sont normales, la pression trans-diaphragmatique est abaissée, indépendamment du recours à la ventilation mécanique (14±8 versus 21±3 cmH2O chez les patients COVID-19 ventilés vs. contrôle, p=0,02 et 15±8 versus 21±3 cmH2O chez les patients COVID-19 non ventilés vs. contrôle, p=0,04). La faiblesse diaphragmatique est corrélée à l’intensité de la dyspnée d’effort.

La faiblesse diaphragmatique pourrait également être améliorée par la RR, notamment lorsqu’elle comporte un réentrainement des muscles respiratoires. Dans un essai randomisé contrôlé, 111 patients rapportant une dyspnée persistante, en moyenne 9 mois après une COVID-19, ont bénéficié de séances de réentrainement des muscles respiratoires pendant 8 semaines, en utilisant le dispositif résistif PrO2 (PrO2Fit Health, Smithfield, Etats-Unis) 2 Ils sont comparés à 37 contrôles. La dyspnée (domaine « dyspnée » du questionnaire K-BILD : 59,8±12,6 chez les contrôles versus 62,2±16,2 après RR, p<0,05), les symptômes respiratoires (domaine « symptômes thoraciques » du questionnaire K-BILD : 59,2±18,7 chez les contrôles versus 64,5±18,2 après RR, p<0,05) et le statut fonctionnel sont améliorés.

Malgré la diversité des mécanismes expliquant la dyspnée persistant à long terme après une infection à SARS-CoV2, la RR est une option thérapeutique intéressante. Il reste à déterminer, sur des arguments scientifiques plus solides, quelles composantes et quelles modalités de la RR sont bénéfiques aux patients COVID-19.

Marjolaine Georges, Service de Pneumologie et Soins Intensifs Respiratoires, CHU Dijon Bourgogne, 14 rue Paul Gaffarel, Dijon

D’après la communication de Gloeckl R et al. Patients recovering from COVID should be integrated into existing pulmonary rehabilitation services (Session C9).

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Transition prostacycline parentérale vers selexipag oral, quelle efficacité ?

Les analogues de la prostacycline parentérale sont les premiers traitements à avoir démontré leur efficacité dans l’hypertension artérielle pulmonaire. Parmi eux, on compte l’époprosténol administré par voie intra-veineuse (IV), qui est le seul traitement à avoir montré (en essai contrôlé) une diminution de la mortalité, et le tréprostinil administré par voie IV, sous-cutanée (SC) ou inhalée. L’utilisation d’analogues de la prostacycline par voie IV ou SC est recommandée chez les patients les plus sévères, à haut risque de mortalité. Cependant, ces voies d’administration peuvent être associées à un certain nombre de complications (principalement douleurs locales pour la forme SC et infections pour la voie IV) empêchant la poursuite de ces traitements. Le selexipag, un analogue des récepteurs de la prostacycline administré par voie orale récemment développé, est parfois utilisé en relais des formes parentérales. Une étude rétrospective canadienne s’est intéressée aux transitions prostacyclines parentérales vers selexipag.

Une étude rétrospective multicentrique a été réalisée dans les centres experts d’hypertension pulmonaire canadiens afin d’évaluer le taux de succès à 36 mois des transitions prostacyclines parentérales – selexipag. Le succès de la transition était un critère composite défini par l’absence de décès ou de complication relative à l’HTAP (aggravation de la classe fonctionnelle NYHA, diminution de plus de 15% de la distance parcourue au test de marche de 6 minutes, hospitalisation en lien avec l’HTAP, réintroduction de la prostacycline parentérale, initiation d’une oxygénothérapie au long cours, recours à la transplantation pulmonaire ou atrio-septostomie).

Entre 2016 et 2020, 38 patients ont été sevrés en prostacycline parentérale et ont reçu du selexipag en relais. Parmi eux, 26 patients (68%) recevaient toujours du selexipag 24 mois après la transition. Parmi les 12 échecs de transition (32% de la cohorte), 3 patients sont décédés.

Parmi les facteurs d’échec identifiés, on dénombre les hospitalisations dans l’année précédant la transition thérapeutique, un dosage élevé de NT-proBNP, une hypervolémie objectivée au cathétérisme cardiaque droit (pression de l’oreillette droite supérieure à 8 mmHg) et un risque de mortalité intermédiaire ou élevé (évalué par la méthode REVEAL).

Cette étude souligne bien que les prostacyclines parentérales et le selexipag oral ne sont pas des traitements équivalents. La transition prostacycline parentérale vers selexipag oral pourrait être une option thérapeutique chez les sujets bien sélectionnés, à risque faible de mortalité et n’ayant pas été hospitalisé pour HTP dans l’année.

Athénaïs Boucly, Service de Pneumologie et de Soins Intensifs Thoraciques, Hôpital de Bicêtre, Assistance Publique Hôpitaux de Paris, 78, rue du Général Leclerc, Le Kremlin Bicêtre

D’après la communication de D. Budhram. Transitioning patients with pulmonary arterial hypertension from parenteral prostacyclin therapy to oral selexipag: a multi-center retrospective cohort study. Am J Respir Crit Care Med 2023; 207: A6447 (session D28)

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Traitement d’épargne cortisonique au cours de la sarcoïdose : du nouveau en vue !

Si la corticothérapie reste le traitement de première ligne au cours de la sarcoïdose, il est souvent nécessaire de recourir à des traitements d’épargne pour en limiter la toxicité. Un sondage récent auprès des patients adhérents à l’association américaine FSR (Fundation for Sarcoidosis Research) montre que 70 % des patients souhaitent une diminution de leur dose journalière de prednisone, a rappelé L.Maier (Etats-Unis), lors de la l’introduction de la session ce mercredi 24 mai. L’Efzofitimod, nouvelle molécule développée récemment pourrait devenir une alternative thérapeutique.

L’Efzofitimod est une protéine de synthèse qui se lie à la neutrophiline-2 (NRP2). Ce récepteur est exprimé par les macrophages. Au cours de la sarcoïdose, il existe une activation importante de cette voie de signalisation et une surexpression de ces récepteurs au niveau des cellules géantes composant le granulome épithélioïde et giganto-cellulaire de patients atteints de sarcoïdose.

Un essai randomisé en double aveugle contre placebo évaluant deux doses d’efzofitimod chez des patients ayant une sarcoïdose pulmonaire et traités par prednisone a été publié à la fin de l’année 2022 1. Ce nouveau traitement s’administre mensuellement par voie intra-veineuse. Cet essai incluait 37 patients dans 4 bras (placebo, efzofitimod 1mg/kg, efzofitimod 3mg/kg, efzofitimod 5mg/kg). La durée de traitement a été de 24 semaines et la tolérance a été comparable à celle du groupe placebo. Au cours de cet essai préliminaire, l’épargne en prednisone a été supérieure chez les patients recevant le traitement. L’épargne était d’autant plus importante que la dose reçue était élevée. Il existait également une tendance à l’amélioration de la CVF chez les patients traités. Un essai randomisé de phase 3 est en cours pour essayer de confirmer l’épargne en prednisone.

Les données pharmacocinétiques issues des essais de phase 1 et de l’essai publié de phase 1b/2a au cours desquels 32 patients ayant reçu au moins 3 doses lors de l’essai randomisé, ont été présentées lors de la session de posters C34 ce mardi 23 mai. Les auteurs montrent que la CVF et les scores de dyspnée et de qualité de vie sont d’autant meilleurs que la dose reçue est plus importante. Cette analyse secondaire encourageante, associée aux premiers résultats, a incité cette équipe à la mise en place d’un essai randomisé de phase 3, recrutant des patients dès à présent.

La toxicité de la prednisone est largement démontrée au cours de la sarcoïdose. Les essais thérapeutiques randomisés sont exceptionnels au cours de la sarcoïdose. La nécessité de données plus solides et du développement de la recherche clinique a été plébiscitée lors de nombreuses interventions et est également attendue par les patients dont la voix est portée par la FSR jusque dans les allées du congrès.

Diane Bouvry, Service de pneumologie et Centre de Référence-constitutif Maladies Pulmonaires rares, AP-HP hôpital Avicenne, 125 rue de Stalingrad, Bobigny

D’après la communication de Adams R et al. Exposure-efficacy analysis supports proof of concept for efzofitimod in pulmonary sarcoidosis. Am J Respir Crit Care Med 2023; 207: A 4811 (session C34) 

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Et si un seul scanner pouvait suffire à dépister le cancer du poumon ?

L’efficacité du dépistage du cancer pulmonaire par scanner thoracique faible dose (LDCT) n’est plus à démontrer 1 2 même si la France continue d’accumuler du retard dans la mise en place d’un dépistage organisé. Les Etats-Unis quant à eux ont même élargi leurs critères d’éligibilité (50-80 ans, plus de 20 paquets-années sevrés depuis moins de 15 ans) afin de sauver « le maximum de vies ». Ils sont néanmoins confrontés à certaines limites comme la faible adhésion au dépistage et la difficulté de poursuivre ce dépistage sur plusieurs années. Les études actuelles tendent donc déjà à affiner le processus, pour mieux sélectionner les sujets éligibles, diminuer les disparités et prédire au mieux l’évolution des nodules détectés. En effet, des outils fournissant une évaluation personnalisée du risque de cancer pourraient recentrer le dépistage sur les personnes les plus susceptibles d’en bénéficier. Début 2023, une étude a évalué un modèle de « deep learning » pour prédire le risque individuel sans nécessiter de données démographiques ou cliniques supplémentaires 3.

Les auteurs ont développé un modèle appelé « Sybil » en utilisant les données des LDCT du National Lung Screening Trial (NLST) 4 : les caractéristiques du volume du nodule sont extraits et une simulation par vecteurs est utilisée afin de produire une probabilité cumulée de développer un cancer du poumon dans les 6 ans. « Sybil » ne nécessite qu’un seul LDCT et ne nécessite pas de données cliniques ni d’annotations radiologiques ; il peut fonctionner en temps réel en arrière-plan sur un poste de lecture radiologique. « Sybil » a été testé sur trois cohortes indépendantes : une cohorte de 6 282 LDCT participants de l’essai NLST, 8 821 LDCT du Massachusetts General Hospital (MGH) et 12 280 LDCT du Chang Gung Memorial Hospital ((CGMH), dont les sujets avaient divers antécédents de tabagisme, y compris non-fumeurs).

« Sybil » a atteint une aire sous les courbes pour la prédiction du cancer du poumon à 1 an de 0,92 pour la cohorte NLST, 0,86 pour la cohorte MGH et 0,94 pour la cohorte CGMH (IC à 95% respectivement de 0,88 à 0,95 – 0,82 à 0,90 et 0,91 à 1,00). Les performances du modèle « Sybil » étaient maintenues quels que soient le sexe, l’âge ou l’histoire tabagique des sujets. Les indices de concordance sur 6 ans étaient de 0,75, 0,81 et 0,80 pour les cohortes NLST, MGH et CGMH (IC à 95% respectivement de 0,72 à 0,78 – 0,77 à 0,85 et 0,75 à 0,86).

Cette étude a montré que l’outil « Sybil » semble prédire avec précision le risque futur de cancer du poumon d’un individu à partir d’un seul LDCT pour permettre un dépistage personnalisé. D’autres études restent nécessaires pour valider son application pratique, en le combinant éventuellement à des critères cliniques afin d’en améliorer encore la puissance.

Marion Ferreira, Service de pneumologie et explorations fonctionnelles respiratoires, CEPR INSERM U1100, CHRU Bretonneau Tours, Boulevard Tonnellé, Tours.

D’après la communication de Nana-Sinkam P. : Precision oncology for lung cancer : developing new enabling cancer technologies (session B10)

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Réserve alcaline : C’est dans les vieux dosages qu’on fait les meilleurs diagnostics !

Le taux de bicarbonates sanguins fait désormais partie de la définition du syndrome obésité-hypoventilation. L’utilité du dosage des bicarbonates sanguins pour diagnostiquer l’hypoventilation n’est pas établi dans les autres étiologies d’insuffisance respiratoire chronique.

A partir des données du système de santé américain, ce travail identifie 295 368 patients (âge moyen de 65 ± 19 ans, 47 % de femmes) qui ont bénéficié le même jour d’un gaz du sang artériel et d’un dosage de HCO3-. Parmi eux, 64 935 patients ont une alcalose métabolique, 68 266 sont hypercapniques. Parmi les patients avec HCO3- ≥ 27 mmol/l, 69,8% des patients sont hypercapniques. Parmi les patients avec HCO3- < 27 mmol/l, 90,1% des patients sont normocapniques.

Il faut intégrer à la lecture de ces résultats la possibilité que l’alcalose métabolique soit d’une autre cause. La kaliémie peut en être un indice (les diurétiques, les vomissements, l’hyperaldostéronisme induisent une alcalose métabolique hypokaliémique en provoquant à la fois une perte urinaire de protons et de potassium). Chez les patients avec HCO3- ≥ 27 mmol/l et K+ ≥ 4 mmol/l, le rapport de vraisemblance positif pour l’hypercapnie est à 11,7 et le rapport de vraisemblance négatif est à 0,5.

La performance d’un taux élevé de bicarbonates sanguins pour diagnostiquer l’hypoventilation varie selon les circonstances dans lesquelles les prélèvements ont été réalisés. Le rapport de vraisemblance est plus élevé chez les patients hospitalisés en réanimation, il varie selon le terrain respiratoire (exacerbation de BPCO, œdème pulmonaire, consommation d’opiacés…) de 12,2 à 23,15.

L’élévation des bicarbonates sanguins permet de dépister efficacement les patients hypercapniques dans un large éventail de situation clinique. Leur fiabilité augmente lorsque la kaliémie est normale ou élevée. La caractérisation des patients hypercapniques avec un dosage de HCO3- normal pourrait encore améliorer la performance de la mesure. Les bicarbonates ont donc tout leur intérêt, comme outil de dépistage de l’hypoventilation aux urgences ou pour éviter une ponction artérielle douloureuse. Et qui sait ? Utiliser HCO3- ≥ 27 mmol/l pour indiquer la ventilation non invasive chez les patients obèses ou neuromusculaires viendra probablement.

Marjolaine Georges, Service de Pneumologie et Soins Intensifs Respiratoires, CHU Dijon Bourgogne, 14 rue Paul Gaffarel, Dijon

D’après la communication de Locke BW. Test performance of serum bicarbonate in identifying hypercapnia across settings and diseases. Am J Respir Crit Care Med 2023; 207: A6495 (session D30)

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BPCO & Covid-19 : une histoire qui vous fend le cœur… !

Le virus SARS-CoV-2 est connu pour induire un état pro-inflammatoire et augmenter le risque de développer une pathologie cardio-vasculaire aiguë ou chronique. De même, les patients porteurs d’une pathologie respiratoire chronique sont connus pour avoir un risque accru de pathologie cardiovasculaire. Il existe toutefois peu de données évaluant le risque cardiovasculaire des patients porteurs d’une pathologie respiratoire chronique au décours d’une infection Covid-19.  

Whittaker et al. (Londres, Angleterre) ont présenté ce jour les résultats préliminaires d’une large étude épidémiologique en population britannique qui a inclus près de 3,8 millions d’adultes ayant présenté une infection Covid-19, dont 684 000 (18,2%) présentaient une pathologie respiratoire chronique antérieurement (16,6% d’asthme ; 2,3% de BPCO ; 0,5% de bronchectasies ; 0,3% de fibrose pulmonaire ; 0,2% de mucoviscidose). Le risque cardiovasculaire global (événement thrombo-embolique artériel ou veineux, accident vasculaire cérébral, insuffisance cardiaque, cardiopathie ischémique, arythmie, myocardite et péricardite) était significativement augmenté chez les patients porteurs d’une pathologie respiratoire chronique (hazard-ratio ajusté (aHR) = 1,06 [1,03 – 1,08]). Cette augmentation du risque était retrouvée pour les critères de jugement suivants : événement thrombo-embolique veineux (aHR = 1,11 [1,10 – 1,24]), insuffisance cardiaque (aHR = 1,17 [1,13 – 1,22]), risque d’embolie pulmonaire ou d’événement embolique artériel (aHR = 1,20 [1,12 – 1,29]). A l’inverse, le risque d’AVC apparaissait diminué chez les patients porteurs d’une pathologie respiratoire chronique (aHR = 0,88 [0,84 – 0,92]). Il convient toutefois de noter que cette augmentation du risque cardiovasculaire n’était retrouvée que chez les patients non hospitalisés pendant leur épisode d’infection à Covid-19. A l’inverse, chez les patients ayant nécessité en cas hospitalisation, les patients porteurs d’une pathologie respiratoire chronique ne présentaient pas de surrisque d’événement cardiovasculaire, avec au contraire une diminution significative du risque de survenue d’AVC. Cette constatation traduit possiblement l’attention accrue portée à ces patients lorsqu’ils étaient hospitalisés en termes de prophylaxie antithrombotique.

Par ailleurs, dans une analyse complémentaire, les auteurs ont montré que, comparativement au groupe de patients non vaccinés, ceux vaccinés présentaient une diminution du risque d’événement cardiovasculaire au décours de l’épisode d’infection à Covid-19, indépendamment de l’existence d’une pathologie respiratoire chronique sous-jacente. De manière intéressante, plus le nombre de doses vaccinales reçues était important, plus le risque de survenue d’un événement cardiovasculaire au décours de l’épisode d’infection à Covid-19 diminuait.

En conclusion, cette étude montre que les patients porteurs d’une pathologie respiratoire chronique présentent un risque accru d’événement cardiovasculaire au décours d’une infection à Covid-19, principalement lorsque celle-ci est non sévère (ne conduisant pas à une hospitalisation). 

Damien Basille, Service de Pneumologie et Unité de Soins Continus Cardio Thoracique Vasculaire et Respiratoire, Centre Hospitalier Universitaire Amiens-Picardie, Amiens

D’après la communication de Whittaker K. et al. Risk of cardiovascular events post-Covid-19 in people with pre-existing chronic respiratory diseases. Am J Respir Crit Care Med 2023; 207 : A6243 (session D17).

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La réserve contractile du diaphragme par échographie pleurale prédit les réadmissions précoces après hospitalisation pour exacerbation de BPCO !

A l’état stable, la réserve contractile du diaphragme (RCD) évaluée à l’aide de l’échographie fournit une évaluation du rapport demande/capacité imposé aux muscles respiratoires et est liée à la sévérité de l’obstruction bronchique et aux symptômes respiratoires 1. Dans cette communication, les auteurs ont effectué des mesures en série de la RCD chez des patients atteints de BPCO au cours d’un épisode d’exacerbation aiguë afin d’évaluer si elle pouvait servir de marqueur de la gravité clinique et/ou d’outil pronostique pour identifier les réadmissions précoces.

Les patients en exacerbation ont été recrutés prospectivement au service des urgences. La RCD a été définie comme suit : 100*[1-(épaisseur du diaphragme à la fin de l’inspiration / épaisseur du diaphragme à l’inspiration maximale)] et a été mesurée à trois moments distincts : dans les 24 heures suivant l’admission, le jour de la sortie de l’hôpital et 4 à 6 semaines après la sortie, pour obtenir une valeur de base stable. La variation de la valeur de la RCD entre l’admission et la sortie a été appelée ΔRCD. Les valeurs de RCD à l’admission ont été comparées à un score classifiant l’urgence d’un patient (score national d’alerte précoce NEWS). La performance du ΔRCD et de la RCD à la sortie a été testée en tant que marqueur de réadmissions précoces (définies comme la nécessité d’une réadmission à l’hôpital pour des symptômes d’exacerbation dans les 30 jours suivant la sortie de l’hôpital).

48 patients ont été inclus. Ils avaient en moyenne 71 ans (±8 ans), un VEMS à 40% (±15) et un CAT 27±8. Sept d’entre eux (15%) ont eu une réadmission précoce après la sortie et 2 (4%) sont décédés pendant l’hospitalisation. Les valeurs moyennes de RCD ont significativement augmenté de l’admission à la sortie (39±15 vs 53±18 %, p<0.001) et de la sortie à l’état basal (53±18 vs 66±31, p=0.02). Les patients décédés pendant l’hospitalisation avaient des valeurs de RCD significativement plus basses à l’admission (6±1 vs 40±14 pour cent, 0.001). Le ΔRCD moyen pendant l’hospitalisation était de 14±8%. La RCD à la sortie et le ΔRCD prédisaient les réadmissions précoces [0,94 (95%CI 0,85-1,00), p<0,001 et 0,74 (95%CI 0,55-0,93), p=0,04, respectivement], mais la RCD à la sortie était plus performante que le ΔRCD, le VEMS et le score NEWS (tous ayant un p<0,05).

En conclusion, la variation de la RCD pendant l’hospitalisation et sa valeur absolue au moment de la sortie de l’hôpital sont liées au risque de réadmission précoce. La RCD pourrait s’avérer un outil utile et simple pour identifier les patients à risque de réadmission dans une équipe ayant la maitrise de cette technique. D’autres études sont cependant nécessaires pour évaluer l’impact des valeurs de la RCD sur la prise de décision clinique.

Laurent Boyer, Service de Physiologie-Explorations Fonctionnelles, Hôpital Henri-Mondor, 51 Avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny, Creteil

D’après la communication de Valin-Thorburn A et al. : Longitudinal assessment of ultrasound-derived diaphragm contractile reserve in acute exacerbations of COPD. Am J Respir Crit Care Med 2023; 207:A6591 (session D97).

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Ce n’est pas parce qu’un fumeur jeune n’a pas de trouble ventilatoire obstructif qu’il ne faut pas regarder son VEMS

Le VEMS en début d’âge adulte est un facteur prédictif de développement de BPCO. Son déclin accéléré augmente le risque de développer une BPCO. Cependant, certains fumeurs jeunes ont un VEMS faible alors même qu’ils ne présentent pas de trouble ventilatoire obstructif. La question posée est de savoir si ces patients vont développer une BPCO et ses comorbidités plus fréquemment que ceux qui ont un VEMS élevé.

Parmi les 2 400 participants de la Lovelace Smokers Cohort (LSC), 843 sujets âgés de 40 à 60 ans (pas si jeune !) dont le VEMS/CVF post-bronchodilatateur était supérieur à 0,7 et ayant eu plus de deux visites, ont été sélectionnés. Ils ont été regroupés en trois groupes : VEMS élevé (> 99 %), VEMS intermédiaire (99-86%) et VEMS bas (<86%).  Les groupes à haut et bas VEMS ont été comparés. Outre la fonction pulmonaire, la mortalité toutes causes confondues et les comorbidités ont été étudiées.

 Au départ, les haut VEMS et les bas VEMS avaient un âge similaire (49 et 51 ans), avec respectivement 78 % et 86 % de femmes, 16 % et 20 % de fumeurs actifs (32 et 37 paquets-années) et un IMC similaire (28 et 30 kg/m2). Toutes les comorbidités étaient similaires dans les deux groupes. Au cours du suivi, la mortalité était plus importante dans le groupe bas VEMS (45/288, 15,6%) par rapport au groupe haut VEMS (18/279, 6,5%). Le déclin du VEMS était plus important chez les fumeurs à bas VEMS par rapport aux autres (32 versus 18 ml/an). Les sujets à bas VEMS par rapport à ceux à haut VEMS avaient une incidence accrue de BPCO, de maladies respiratoires, de diabètes et d’HTA. 

Pour renforcer ces données chez les fumeurs sans trouble ventilatoire obstructif, une deuxième communication montrait, en partant des données de la cohorte COPDGene que les exacerbations chez les fumeurs sans BPCO (actifs ou sevrés) entraînaient un déclin de la fonction pulmonaire et une progression vers la BPCO. Les exacerbations respiratoires prédisaient la mortalité sans qu’il soit nécessaire de passer d’abord par la survenue d’une BPCO, sous réserve d’une définition des exacerbations peu précise.

Ainsi, chez les fumeurs âgés de 40 à 60 ans, la mesure de la fonction pulmonaire par spirométrie à un jeune âge peut prédire l’état de santé respiratoire et général futur. La spirométrie est donc utile chez ces patients, et il faut l’analyser attentivement même si le VEMS/CV est dans les limites de la normale. Ces fumeurs sans trouble ventilatoire obstructif sont à repérer quand ils font des exacerbations, car ils sont à risque de développer une BPCO.

Laurent Boyer, Service de Physiologie-Explorations Fonctionnelles, Hôpital Henri-Mondor, 51 Avenue du Maréchal de Lattre de Tassigny, Creteil

D’après les communications de :
Tesfaigzi.Y et al. : The Fev1 as a predictor of future health in young non-obstructed smokers. Am J Respir Crit Care Med 2023; 207:A4200 (session B94).
Fortis S et al.: Respiratory exacerbations and lung function decline in people with normal spirometry and smoking exposure. Am J Respir Crit Care Med 2023; 207:A4202 (session B94).

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Le « pelage » bronchique dans le traitement de la bronchite chronique. Une piste prometteuse ?

La bronchite chronique (BC) définie par une toux productive persistante, résulte d’une inflammation des voies aériennes responsable d’une hyperplasie des cellules productrices de mucus au niveau de l’épithélium des voies aériennes et de la sous muqueuse. La rhéoplastie bronchique (BR) (RheOx®) réalise une ablation de l’épithélium des voies aériennes et de la sous muqueuse au moyen d’un champ électrique pulsé, sans recours à la chaleur. Cette technique a montré sa capacité à réduire significativement l’hyperplasie des cellules caliciformes (GCH) et pourrait aussi réduire les marqueurs l’inflammation voies aériennes 1. Des données complémentaires ont été présentées par A. Valipour au cours d’une session d’affiches.

Trente patients avec BC ont eu de façon séquentielle une rhéoplastie bronchique bilatérale. Des cryobiopsies bronchiques ont été réalisées au niveau du tronc intermédiaire et au niveau du lobe inférieur gauche avant traitement et 3 mois après la seconde procédure. Les prélèvements ont été analysés par un anatomo-pathologiste indépendant avec évaluation semi-quantitative de la GCH et de la présence dans la sous-muqueuse d’éosinophiles et de lymphocytes/plasmocytes en utilisant une échelle en 4-points (Table 1). A l’état de base, les biopsies étaient évaluables dans 58 poumons/60. Le GCH score moyen avant traitement était de 1.47±0.90 avec 85% (49/58) des biopsies montrant un score GCH élevé, défini comme un score > 1. Les scores moyens d’éosinophiles et de lymphocytes à l’état de base étaient de 0.52±0.74 et 0.74±0.76, respectivement. Les éosinophiles étaient présents avec un score élevé chez 18 patients. Une tendance vers une corrélation positive entre le score GCH à l’état de base et le COPD Assessment Test (CAT) (r=0.327, p=0.08) et le St. George’s Respiratory Questionnaire (SGRQ) (r=0.32, p=0.102) a été trouvée. Dans 54 poumons avec biopsies évaluables avant et après traitement, la baisse par rapport aux valeurs de base des scores GCH et éosinophiles étaient de -0.57±0.94 (p<0.001) et de -0.29±0.90 (p=0.02), respectivement. Aucune modification significative du score de lymphocytes n’a été observée. Chez presque tous les patients (16/ 17) avec score élevé d’éosinophiles à l’état de base évaluables après traitement, le score biopsique s’est amélioré ≥1 point après la procédure et 11/17 patients n’avaient plus d’éosinophiles présents dans leurs biopsies post-traitement.  Les patients avec une amélioration du score éosinophile avaient une probabilité de réponse symptomatique > 4 points au CAT, score 1.75 fois plus élevé (95% CI 0.48 to 6.35). En conclusion, l’ablation non thermique de l’épithélium des voies aériennes basses au moyen d’un champ électrique pulsé permet une réduction statistiquement significative de l’hyperplasie des cellules caliciformes et du score éosinophile, sous-tendant le mécanisme d’action de la rhéoplastie. La diminution de ces scores anatomo-pathologiques après rhéoplastie semble associée à une amélioration de la qualité de vie des patients avec BC. Ces données sont encore préliminaires mais il semble s’agir d’une voie prometteuse pour améliorer la prise en charge des patients avec BC.

Hervé Mal, Service de pneumologie et transplantation pulmonaire, Hôpital Bichât, 46 rue Henri Huchard, Paris

D’après la communication de Valipour A. et al. Bronchial rheoplasty reduces goblet cell hyperplasia and airway inflammation in patients with chronic bronchitis. Am J Respir Crit Care Med 2023; 207: A4538 (Session C22)

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