Pneumologie

Pleurésie infectieuse : « le soleil ne doit jamais se coucher sur une pleurésie parapneumonique ».


A l’occasion d’une session consacrée à l’immense contribution de Richard Light (1942-2021) et aux récentes avancées dans le domaine des pathologies pleurales, S. Shojaee est revenu en détail sur les pleurésies infectieuses.

Dans l’étude TORPIDS 1, une analyse métagénomique de 263 liquides pleuraux (243 pleurésies infectieuses et 20 pleurésies non infectieuses) a été réalisée par une technique de séquençage de nouvelle génération de l’ARN 16S. Cette analyse a montré que 79% des pleurésies infectieuses sont polymicrobiennes, avec une prédominance de S. pneumoniae dans le cadre des pleurésies monomicrobiennes. La présence de pathogènes anaérobies (HR=0,46 [0,24 – 0,86]) ou de S. anginosus (HR=0,43 [0,19 – 0,97]) était associée à une meilleure survie alors que la présence de S. aureus (HR=5,80 [2,37 – 14,21]) ou la prédominance d’entérobactéries (HR=2,26 [1,03 – 4,93]) étaient associées à une diminution de la survie.

L’étude de cohorte prospective observationnelle PILOT 2, qui a inclus 546 patients présentant une pleurésie infectieuse, a permis de confirmer la capacité du RAPID score (basé sur l’urée, l’âge, la purulence du liquide, l’origine de l’infection et l’albuminémie) à prédire le risque de mortalité à 3 mois et à 12 mois. Ainsi, la mortalité à 3 mois était de 2,3% dans le groupe à faible risque (RAPID score 0-2, de 9,2% dans le groupe à risque modéré (RAPID score 3-4) et de 29,3% dans les groupes à haut risque (RAPID score 5-7). La mortalité à 12 mois était de 6,1% dans le groupe à faible risque (RAPID score 0-2, de 18,0% dans le groupe à risque modéré (RAPID score 3-4) et de 49,9% dans les groupes à haut risque (RAPID score 5-7). Ce score était également corrélé à la durée d’hospitalisation.

Suite aux études MIST-1 et MIST-2 3,4 l’intérêt des traitements fibrinolytiques (en particulier de l’association alteplase + DNAse) pour réduire le risque d’échec du traitement médical initial est désormais bien établi. Il persiste toutefois une controverse concernant la place de la prise en charge chirurgicale précoce par thoracoscopie vidéo-assisté (VATS). Pour répondre à cette question, l’étude randomisée MIST-3, actuellement en cours, compare 3 stratégies : 25 patients traités par VATS précoce, 25 patients traités précocement par l’association alteplase + DNAse et 25 patients traités sans fibrinolyse. L’objectif de cette petite étude est pour l’instant d’évaluer la faisabilité d’une étude randomisée sur un plus large effectif.

Damien Basille, Service de Pneumologie et Unité de Soins Continus Cardio Thoracique Vasculaire et Respiratoire, Centre Hospitalier Universitaire Amiens-Picardie, Amiens


D’après la session B2 The Richard Light symposium on pleural diseases : State of the art 2022, S. Shojaee

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Un nouvel outil pour le diagnostic des nodules périphériques ? La fibroscopie assistée par robot.


La biopsie pulmonaire trans-thoracique guidée par scanner est l’outil privilégié pour le diagnostic étiologique des nodules pulmonaires périphériques. Elle est parfois prise en défaut avec une sensibilité qui diminue entre 70% et 82% pour les nodules de petite taille et avec un risque de pneumothorax allant jusqu’à 20%. La bronchoscopie assistée par robot (FAR) est un nouvel outil dont les premières études de faisabilité chez l’homme datent de 2018. Depuis 2019, deux systèmes ont reçu l’autorisation de la Food and Drug Administration, la plateforme Monarch (Auris Health) et le système Ion Endoluminal (Intuitive Surgical).

Brièvement, les deux systèmes reposent sur le chargement d’un scanner thoracique dans le système de navigation associé à un fibroscope de petite taille (environ 4 mm) guidé par un bras robotisé, contrôlé par le pneumologue via un joystick. Il permet la réalisation de biopsies et de cytoponctions une fois la position du fibroscope à proximité du nodule vérifiée par EBUS ou fluoroscopie. La taille et la flexibilité du fibroscope permettent d’accéder à des nodules distaux, y compris dans les lobes supérieurs. Cette technique ne nécessite pas forcément la présence d’un champ magnétique, selon le modèle.

Les données disponibles concernant la performance diagnostique de ces deux systèmes sont regroupées dans un article publié en 2021 1. Les études étaient limitées à une trentaine de malades.

L’équipe de San Francisco 2 présente son expérience rétrospective, avec 65 FAR réalisées entre août et décembre 2021. L’équipe de Détroit 3 rapporte quant à elle 300 FAR réalisées entre avril 2019 et mai 2021.

Globalement, le nodule peut être prélevé dans 86% des cas. La performance diagnostique est influencée par la taille du nodule, sa localisation dans le poumon périphérique et la distance restant entre l’extrémité du fibroscope et le nodule (plus ou moins de 10 mm). Elle ne semble pas influencée par l’expérience de l’opérateur. Dans 80% des cas, un prélèvement des adénopathies médiastinales guidé par EBUS est réalisé dans le même temps opératoire.  Par ailleurs, le taux de complications était faible avec moins de 5% de pneumothorax.

Affaire à suivre. Deux études prospectives multicentriques avec la plateforme Monarch sont en cours de recrutement (étude CLEAR, NCT05231278 et étude POWER, NCT05299606).

Marjolaine Georges, Service de Pneumologie et Soins Intensifs Respiratoires, CHU Dijon


D’après la session A69 Toy Story 4: Adventures in interventional pulmonary procedures

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EBUS : avec ou sans ballonnet ?


L’obtention d’une image échographique de qualité est capitale lors de la réalisation d’une écho-endoscopie bronchique (EBUS), à la fois pour la précision de la procédure mais aussi pour la sécurité de sa réalisation. Un ballonnet peut être utilisé pour obtenir des images de meilleure qualité. Cependant, il n’est pas certain que son utilisation conduise à de meilleurs rendements diagnostiques. Le but de cette étude était d’analyser si l’utilisation du ballonnet pendant une EBUS 1) améliorait la précision du diagnostic, 2) réduisait la durée de la procédure et 3) améliorait la qualité de l’image échographique.

Les patients ayant une indication de ponction-biopsie par EBUS de l’aire ganglionnaire 4R ont été prospectivement randomisés en 2 groupes : avec ou sans l’utilisation d’un ballonnet. L’EBUS était réalisée par 4 endoscopistes différents avec ou sans ballonnet selon le groupe de randomisation. La procédure a été chronométrée à partir du moment où l’endoscope était inséré dans la bouche jusqu’à la fin de la ponction-aspiration de l’aire 4R. Les dimensions de l’adénopathie 4R à l’échographie étaient relevées et des vidéos séparées ont été enregistrées avec et sans le ballonnet gonflé pendant la procédure pour comparer la qualité de l’image. La qualité des vidéos échographiques était notée par ordre d’amélioration de la qualité de manière indépendante par deux pneumologues interventionnels externes en aveugle qui n’ont pas participé à l’essai clinique (1 = médiocre, 2 = moyen, 3 = bon, 4 = excellent). Le rendement diagnostique était défini comme un échantillon satisfaisant avec la présence de lymphocytes, des signes de malignité ou un diagnostic alternatif sur le compte-rendu histologique final.

Quarante-six patients ont été inclus. Il n’y avait pas de différence significative entre les deux groupes en termes d’âge, de démographie ou de dimensions de l’adénopathie de l’aire 4R. L’indication d’examen la plus fréquente était le diagnostic de cancer pulmonaire (76 %). Il n’y avait pas de différence significative dans le rendement diagnostique ou la durée de la procédure avec ou sans l’utilisation d’un ballonnet. Cependant, il existait une tendance à une meilleure qualité d’image lorsqu’un ballonnet était gonflé.

Cette étude a montré l’absence de différence significative dans le rendement diagnostique ou la durée de la procédure pendant la ponction-aspiration guidée par EBUS avec ou sans l’utilisation d’un ballonnet. Il faut tout de même proposer que l’utilisation du ballonnet pendant l’EBUS doive être laissée à la préférence de l’opérateur car cela n’a pas d’impact sur le rendement diagnostique de la procédure.

Marion Ferreira, Service de pneumologie, CHRU Bretonneau Tours, Boulevard Tonnellé, 37000 Tours.


D’après la session B110: The Midas touch interventional pulmonology in thoracic oncology. T. Huseini. AJRCCM, A3667

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Données à long terme inattendues du tréprostinil administré par voie inhalée dans les hypertensions pulmonaires associées à une pneumopathie interstitielle diffuse


Bien qu’une dizaine de molécules soient sur le marché pour la prise en charge des hypertensions pulmonaires du groupe 1 (HTAP), aucun traitement de l’HTAP n’a obtenu une autorisation de mise sur le marché en Europe pour la prise en charge des hypertensions pulmonaires (HTP) associées à une pneumopathie interstitielle diffuse (PID). Suite à la publication de l’essai INCREASE dans le NEJM en 2021, le tréprostinil inhalé est recommandé dans cette indication aux États-Unis. Les données à long-terme, après passage dans la phase ouverte de cette étude, ont été présentées au cours d’une session de communications orales.

Trois cent vingt-six patients avaient été inclus et randomisés dans la phase initiale de cette étude comparant l’effet du tréprostinil inhalé dans les HTP associées à une PID. Une amélioration significative du test de marche de 6 minutes (31 m) avait été mise en évidence entre le groupe tréprostinil inhalé et le groupe placebo à la seizième semaine. La phase d’extension de l’étude INCREASE s’est intéressée aux résultats à long terme (1 an) de cette molécule sur le test de marche de 6 minutes (critère de jugement principal de l’étude) et la capacité vitale forcée (CVF).

Deux-cent quarante patients ont été inclus dans la phase d’extension (52% d’hommes, âge médian 70 ans). Cent vingt et un patients recevaient précédemment le placebo. Une durée médiane de 6 mois séparait le diagnostic de l’HTP associée à une PID et l’inclusion dans l’étude. Vingt-huit pourcents des patients avaient une fibrose pulmonaire idiopathique, 18% une pneumopathie interstitielle non spécifique, 24% un syndrome emphysème-fibrose, 24% une connectivite et 5% une pneumopathie d’hypersensibilité. Parmi les patients recevant le placebo au cours de la phase initiale de l’étude, aucune amélioration du test de marche de 6 minutes n’a été mise en évidence après le passage dans la phase ouverte. Les patients recevant le tréprostinil inhalé depuis le début de l’étude ont quant à eux maintenu les bénéfices précédemment obtenus. Les auteurs interprètent cela comme un argument en faveur d’une initiation précoce du traitement. Concernant les explorations fonctionnelles respiratoires, les patients du groupe placebo puis tréprostinil inhalé ont amélioré leur CVF au cours de la phase d’extension (environ 100 mL), alors que les patients traités depuis le début de l’étude par le tréprostinil inhalé sont restés parfaitement stables tout au long de l’étude (pas d’amélioration ni d’aggravation). La tolérance du tréprostinil inhalé était bonne. Les effets secondaires étaient similaires à ceux observés avec les prostacyclines administrées par voie parentérale : céphalées, troubles digestifs, douleurs de la mâchoire…

Les résultats de cette phase d’extension sont inattendus et nécessitent des données complémentaires. En effet, il est inhabituel de ne pas observer d’amélioration fonctionnelle lors du passage en ouvert avec un traitement qui a montré son efficacité lors de la phase de double aveugle.

Athénaïs Boucly , Service de Pneumologie et de Soins Intensifs Thoraciques, Hôpital de Bicêtre, Le Kremlin Bicêtre


D’après la session B96 – Fisherman’s Wharf: Omics and translational approaches in pulmonary vascular disease Communication “Long-term effects of inhaled treprostinil in patients with pulmonary hypertension due to interstitial lung disease: The INCREASE study open-label extension”, A5671

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Une nouvelle cycline pour traiter les infections à Mycobacterium abscessus


Les infections à complexe Mycobacterium abscessus figurent parmi les plus difficiles à prendre en charge. Il est recommandé de débuter leur traitement par une phase d’attaque comportant au moins 2 molécules administrées par voie intraveineuse (IV) puis de faire un relai oral lors d’une phase d’entretien de plusieurs mois. Parmi les molécules régulièrement utilisées dans ce contexte figure la tigécycline. Une équipe de Caroline du Sud a rapporté son expérience avec l’utilisation d’une nouvelle amino-méthyl-cycline administrée par voie orale avec succès chez ces patients.

L’omadacycline est utilisable par voie IV ou orale et disponible aux Etats-Unis (mais pas en France) pour traiter certaines pneumopathies aiguës communautaires ou infections de la peau ou des tissus mous. Ici, les auteurs l’ont administré à la dose de 300 mg/j (soit 2 comprimés de 150 mg) chez 36 patients atteints d’infection à complexe M. abscessus âgés de 61 ± 16 ans (64% de femmes) et très majoritairement porteurs d’une forme pulmonaire à M. abscessus stricto sensu (seulement 5% de M. massiliense et 3% de M. boletti). Globalement, 53% des souches présentaient une résistance inductible aux macrolides. La durée médiane de ce traitement était de 4 mois avec des extrêmes allant d’une semaine à 23 mois. La raison invoquée pour utiliser cette molécule était principalement un relais du traitement par tigécycline IV (61% des cas) ou une intolérance à une autre molécule (28% des cas).

Parmi les 36 patients traités, 9 (25%) sont parvenus à négativer leurs prélèvements et donc à arrêter leur traitement tandis que seulement 3 (8%) sont décédés. La tolérance clinique a été moyenne, avec principalement des effets indésirables de type digestif (nausées, vomissements, diarrhée, œsophagite), mais aussi quelques augmentations des transaminases, anémies, hyperéosinophilies et rash. Chez 8 patients (22%), l’omadacycline a dû être arrêtée en raison de ces effets indésirables. Toutefois, 56% des patients étaient toujours sous traitement à la fin de l’analyse au 31 décembre 2021. De l’avis même des auteurs, l’omadacycline semble être une molécule prometteuse qui pourrait trouver une place rapide dans l’arsenal thérapeutique des infections à complexe Mycobacterium abscessus. Toutefois, ces données restent très préliminaires et devront impérativement être complétées dans les années à venir par des séries plus importantes.

François-Xavier Blanc, Université de Nantes; CHU de Nantes, l’institut du thorax, Hôpital G. et R. Laënnec, Service de Pneumologie; INSERM UMR 1087, CNRS UMR 6291, Nantes. 


D’après la communication de Mingora CM et al. One center’s experience with omadacycline for the treatment of Mycobacterium abscessus infections. Am J Respir Crit Care Med 2022;205:A3088.

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Tolérance et efficacité du nintédanib : résultats d’une analyse post hoc chez les patients âgés de plus de 75 ans inclus dans l’essai INBUILD.


Les effets indésirables du nintédanib nécessitent parfois une diminution de dose voire l’arrêt du traitement. Chez les patients les plus âgés souvent dénutris et avec plus de comorbidités, ces effets indésirables pourraient limiter les possibilités de traitement.

T. Moua a présenté les résultats d’une analyse post hoc comparant les patients de plus et moins de 75 ans ayant une pneumopathie interstitielle diffuse progressive (autre qu’une FPI) inclus dans l’essai INBUILD (essai randomisé nintédanib versus placebo). Parmi les 663 patients, 19% étaient âgés de plus de 75 ans avec un âge moyen de 78,5 ans. Il n’existait pas de différence en termes d’efficacité du traitement chez les patients plus âgés chez qui on observait également un ralentissement du déclin de la CVF. Cependant, chez les patients de plus de 75 ans, la proportion d’effets indésirables conduisant à l’arrêt du traitement était de 36,8% lorsqu’ils recevaient le nintédanib (18,8% dans le groupe placebo des patients du même âge) contre 18,9% chez les patients de moins de 75 ans sous nintédanib (13,5% chez les patients de moins de 75 ans dans le bras placebo). Chez les patients les plus âgés, il a été plus fréquemment nécessaire de recourir à une diminution de posologie. Les troubles digestifs représentent les effets indésirables principaux : diarrhée puis nausées et vomissements. La perte de poids et d’appétit est aussi plus fréquente chez les patients de plus de 75 ans traités par nintédanib par rapport aux patients de la même catégorie d’âge recevant le placebo mais également par rapport au groupe des patients de moins de 75 ans traités par nintédanib. De la même façon, une élévation des ASAT est également plus souvent constatée chez les patients de plus de 75 ans traités par nintédanib, peut-être en raison d’interactions médicamenteuses potentielles plus importantes dans cette population. La présentation ne précisait pas quels effets indésirables particuliers étaient en cause dans l’arrêt ou la diminution des traitements. Ces résultats soulignent l’importance de surveiller les effets indésirables, en particulier digestifs, chez les patients les plus âgés et de les prévenir au maximum dès la décision d’instaurer un traitement.

Diane Bouvry, Service de pneumologie et Centre de Référence-constitutif Maladies Pulmonaires rares, AP-HP hôpital Avicenne, Bobigny


D’après la Session B22: Emerging management of fibrotic ILDs D’après Moua T et al. Efficacity and safety of nintedanib in elderly patients with progressive fibrosing interstitial lung disease. Am J Respir Crit Care Med 2022; 205:

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Transplantation pulmonaire chez les patients COVID-19 compliqué de SDRA. Une option possible mais avec des indications très restrictives


La survenue d’un syndrome de détresse respiratoire aiguë (SDRA) est une complication bien connue et redoutée du COVID-19 se traduisant par une mortalité significative malgré la prise en charge optimale en réanimation. Pour les patients qui restent en détresse respiratoire à plusieurs semaines du début du SDRA, la discussion d’une transplantation pulmonaire (TP) peut maintenant se poser alors que le SDRA représentait jusqu’à l’épidémie actuelle une indication exceptionnelle de TP.

Dans le cadre d’une session animée par les éditeurs du JAMA et du New England Journal of Medicine (A2) et portant sur les articles à paraître ou parus récemment dans ces journaux, GS Budinger (Northwestern University, Chicago, Etats-Unis) a présenté les données rétrospectives de son centre concernant la TP pour SDRA lié au COVID-19 1 Sur les 102 TP réalisées dans ce centre de janvier 2020 à septembre 2021, 30 concernaient des patients COVID-19 atteints de SDRA. Ces patients dont l’âge médian était de 53 ans (extrêmes allant de 27 à 62 ans) ont été transplantés après un délai minimum de 40 jours après le début du SDRA (médiane >100 jours). Au moment de la TP, 17 patients étaient sous ECMO veino-veineuse, 7 sous oxygène nasal, 4 sous ventilation mécanique invasive et 2 sous oxygène à haut débit.

Les procédures opératoires ont été marquées par un taux plus élevé de transfusion et une durée d’intervention plus longue que chez les patients non COVID-19. En postopératoire, en comparaison avec les 72 patients non COVID-19, les patients COVID-19 transplantés avaient une plus grande fréquence de dysfonction primaire du greffon (de grade 1 à 3) à J3 et de recours à l’hémodialyse et une durée d’hospitalisation plus longue. La survie des patients COVID-19 était excellente puisqu’en novembre 2021, 100% des patients étaient en vie (suivi médian 351 jours). Ces résultats remarquables montrant que la TP est réalisable chez des patients COVID-19 en SDRA ne doivent pas faire oublier que ce traitement ne s’adresse qu’à un sous-groupe minoritaire et ultra sélectionné. En effet, les patients doivent satisfaire des critères très stricts. En particulier, en sus des critères habituels exigés pour envisager une TP, il faut laisser au poumon l’opportunité de se réparer (un délai minimum de 4 à 6 semaines après le début du SDRA est exigé) et s’assurer que le patient présente des signes d’atteinte pulmonaire irréversible, qu’il n’est plus porteur du SARS-CoV-2, qu’il est réveillé et capable de comprendre le projet de TP et qu’il est capable de faire une réhabilitation musculaire minimale. Ce processus strict de sélection est illustré par un diagramme éclairant, figurant dans l’étude : entre novembre 2020 et décembre 2021, sur un total de 234 patients avec SDRA compliquant un COVID-19 dont les dossiers ont été adressés pour discussion d’un projet de TP, 80% ont été récusés pour des motifs divers et seuls 9% ont été transplantés dans ce centre.

Hervé Mal, Service de pneumologie et transplantation pulmonaire, Hôpital Bichât, Paris


D’après la communication de GS Budinger, dans la session « The New England Journal of Medecine and JAMA discussion on the edge: report of recently published pulmonary research  » (A2).

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L’oxygène humidifié portable : vers un meilleur confort ?


L’oxygénothérapie à domicile à faibles débits (< 5 à 6 L/mn) peut générer un certain inconfort chez les patients qui se plaignent fréquemment, entre autres, de sécheresse nasale. Une équipe de Charleston a présenté des résultats préliminaires sur la tolérance d’un dispositif clos d’humidification réchauffée approuvé par la FDA et utilisable pour de faibles débits d’oxygène.

Trente-deux patients porteurs de BPCO avec déficit en α1-antitrypsine ont été inclus. Ils étaient tous sous oxygénothérapie (entre 0,5 et 6 L/mn) depuis au moins 6 mois. L’analyse a porté sur 30 patients à 2 semaines et 29 à 4 semaines. La majorité était des femmes (n=22, 73,3%) d’âge moyen 62,8 ans. Vingt-quatre (80%) avaient une oxygénothérapie depuis plus de 4 ans, en moyenne 14,3 heures par jour. Vingt-six (86,7%) le portaient à l’effort et 29 (96,7%) pendant la nuit. Pour 8 d’entre eux (26,7%) à 2 semaines et 9 (31%) à 4 semaines, il n’y avait pas de modification dans le ressenti (sécheresse nasale). Dix-huit (60%) à 2 semaines et 12 (41,4%) à 4 semaines ressentaient une moindre sécheresse nasale (estimée à 4 sur une échelle de 0 à 5). Le même résultat était constaté sur la sécheresse de bouche (60% entre 4 et 5 à 2 semaines) et sur le confort global (40% ressentaient plus de confort à 2 semaines). De façon surprenante, l’effet tendait à s’estomper à 4 semaines avec 6 patients (20,6%) qui ressentaient même plus d’inconfort à ce moment-là. Globalement, le bénéfice semblait plus important durant la nuit (meilleure qualité de sommeil, moins de réveils, moins de saignements de nez, moins de sécheresse le matin…). En moyenne, le dispositif était utilisé 7 heures en priorité la nuit, mais certains patients l’ont utilisé pendant l’exercice et la déambulation.

Le dispositif a l’avantage d’être portable et léger. La base chauffante reste chaude pendant quelques heures (non précisé par les auteurs). Cela pourrait donc ouvrir des perspectives pour une humification plus optimale chez certains de nos patients.

Sandrine Pontier-Marchandise USIR et service de Pneumologie, CHU de Toulouse, France


D’après R.A. SandhausC. StrangeK.E. Holm . Pilot study of O2asis: a novel, closed-system heated humidification device for individuals with COPD requiring supplemental oxygen at home. Am J Respir Crit Care Med 2022 ; 205 : A 2797.
Dans la session : B39. COPD management : from pharmacologic treatment to novel therapies.

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Vers une nouvelle définition des exacerbations de BPCO ?


Depuis plus de 35 ans, l’exacerbation aiguë (EA) de BPCO est définie par une majoration des symptômes respiratoires dont la toux, la dyspnée, l’abondance et la purulence des expectorations 1. Cette définition évolue et le GOLD 2022 retient une « aggravation de la symptomatologie respiratoire nécessitant l’ajout d’un traitement supplémentaire » 2 Par ailleurs, la sévérité de l’exacerbation est estimée par le recours aux soins et la consommation de traitement : elle est considérée comme « légère » si elle nécessite la prise de bronchodilatateurs de courte durée d’action seuls, « modérée » si une corticothérapie orale et/ou une antibiothérapie sont nécessaires et « sévère » si elle conduit à une hospitalisation. Cependant, ces définitions sont basées sur des critères diagnostiques subjectifs, peu spécifiques de la BPCO, et la sévérité de l’évènement n’est évaluée qu’à postériori en fonction la prise en charge.

Dans l’étude présentée ce jour et ayant fait l’objet d’une publication 3 , 17 experts de 8 pays différents ont passé en revue 80 items afin de proposer une nouvelle définition et classification des exacerbations de BPCO. La définition retenue est celle d’une « majoration de la dyspnée, toux ou expectorations inférieure ou égale à 14 jours causée par une infection, la pollution ou un autre agent irritant qui peut être accompagnée de tachypnée et tachycardie et qui est fréquemment associée à une majoration du syndrome inflammatoire local et systémique ». Les experts soulignent la nécessité de prendre en compte l’insuffisance cardiaque, la pneumonie et l’embolie pulmonaire comme diagnostics alternatifs ou co-existants des exacerbations.

Ils soulignent également qu’avec la définition actuelle, la variabilité régionale de l’accès aux soins peut conduire à une mauvaise classification de la sévérité de l’exacerbation. Or, les exacerbations modérées à sévères sont souvent le critère de jugement principal utilisé dans les essais contrôlés randomisés, ce qui souligne l’importance d’une définition plus précise. Ces experts ont donc proposé d’utiliser 6 critères objectifs : dyspnée [échelle visuelle analogique de 0 à 10, < 5 (EA légère) vs > ou = 5 (EA modérée)], saturation en oxygène (> ou = 92% ou variation < ou = 3% (EA légère) vs < 92% ou variation > 3% (EA modérée)], fréquence respiratoire [<24/min (EA légère) vs > ou = 24/min (EA modérée)], fréquence cardiaque [<95 bpm (EA légère) vs > ou = 95 bpm (EA modérée)], CRP [< 10 mg/L (EA légère) vs > ou = 10 mg/L (EA modérée)] et, dans certains cas, les gaz du sang (PO2 < 60 mmHg, PCO2 > 45 mmHg sans acidose (EA modérée) vs pH < 7,35 et PCO2 > 45 mmHg (EA sévère)]. Trois critères sont nécessaires pour définir une exacerbation modérée. Le critère d’acidose respiratoire non compensée est suffisant pour classer une EA comme « sévère ». A noter que la toux et la majoration de l’abondance et de la purulence des expectorations restent dans la définition mais ne sont pas pris en compte dans l’évaluation de la sévérité étant donné l’absence de critère d’évaluation objectif.

Cette définition actualisée se baserait donc sur des éléments cliniques et biologiques objectifs permettant une homogénéisation diagnostique. Elle nécessite cependant une validation prospective avant utilisation en pratique courante.

Marina Guecamburu, Service des Maladies Respiratoires, CHU Bordeaux, Bordeaux Service des Maladies Respiratoires, CHU Bordeaux


D’après la session : B1-Clinical Year In Review 2. BD.Hobbs (Boston)

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Prise en charge des exacerbations aiguës de BPCO en réanimation : quelle évolution de 1997-2018 ?


L’histoire naturelle de la BPCO est ponctuée d’exacerbations aiguës (EA-BPCO) conduisant à l’hospitalisation des formes les plus sévères en réanimation. Leur prise en charge médicamenteuse (corticoïdes, β2mimétiques, antibiotiques) et ventilatoire (ventilation mécanique invasive : VMI, et non invasive : VNI) n’a fait qu’évoluer au cours du temps et ces changements contextuels pourraient avoir modifié le profil des patients admis et leur devenir en réanimation.

Le réseau français « Outcomerea » a donc évalué, sur une période de 22 ans, l’évolution du profil clinique et de prise en charge des EA-BPCO et son impact sur le devenir des patients hospitalisés en réanimation. Mille huit cent seize patients admis pour EA-BPCO ont été inclus prospectivement à partir de 32 unités de réanimation. A l’admission en réanimation, peu de modifications anthropométriques étaient observées en dehors d’une faible augmentation de l’indice de masse corporelle (+0,32%/an, p=0,01), mais la gravité des patients était retrouvée plus élevée (+ 0,6% de l’IGS II/an, p<0,01). Au fil du temps, était rapportée une réduction de la prescription de corticoïdes (- 4,7%/an, p<0,01) et d’antibiotiques (- 5,8%/an, p<0,01), sans que ces changements soient corrélés à l’évolution de la mortalité en réanimation. La proportion de patients traités par VMI diminuait aussi progressivement (-3,7%/an, p=0,01) et s’avérait corrélée avec la diminution de la mortalité observée en réanimation (p<0,01). Le taux d’échecs de la VNI diminuait au cours du temps (-6,2%/an, p<0,01) avec, parallèlement, développement de celle-ci pour faciliter le sevrage de la VMI (+8,1%/an, p<0,01). Une réduction des durées de séjour en réanimation (-3,2%/an, p<0,01) et d’hospitalisation globale (-2,6%/an, p<0,01) était également retrouvée. Finalement, il en résultait une amélioration significative du pronostic des patients (-4,1%/an de décès en réanimation, p=0,03 ; -4,2%/an de décès en hospitalisation post-réanimation, p=0,02 et -4,98%/an de mortalité à J90, p=0,02).

Ces données épidémiologiques apparaissent donc tout à fait intéressantes et rassurantes quant à la prise en charge et à l’amélioration du pronostic des EA-BPCO admises en réanimation au cours de ces dernières décennies. Il va sans dire que l’amélioration et l’optimisation de la prise en charge ventilatoire (VNI), tout au long de ces années, y sont probablement pour beaucoup !

Christophe Girault, Service de Réanimation Médicale, Hôpital Charles Nicolle, CHU-Hôpitaux de Rouen, Université de Rouen, Rouen


D’après la communication de Galerneau L., et al. Management of acute exacerbations of chronic obstructive pulmonary disease in the intensive care unit: The Outcomerea database, 1997-2018. Am J Respir Crit Care Med 2022; 205: A1453. Session A39.

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